Les Retombées

 

Né en 1937, Jean-Pierre Andrevon est un cas dans le microcosme de la science-fiction française. Auteur d’un classique,  Les hommes-machines contre Gandahar (adapté en dessin animé par le grand René Laloux), il s’est aussi fait un nom comme  « leader » de la science-fiction politique des années 1970, notamment en animant la série d’anthologies Retour à la Terre, publiées dans la défunte collection Présences du futur (dont, cher lecteur, je suis nostalgique : chacun sa madeleine de Proust). Or ce courant, privilégiant un message politique gauchiste et écologiste typique de ces années un peu folles, a pris un énorme coup de vieux avec les années 1980 et le triomphe cinématographique de sagas comme Star Wars (ou, auprès d’un public plus adulte, de Blade Runner). Les éditions « Le passager clandestin », connues pour leur engagement écologiste, rééditent ici une longue novella intitulée Les Retombées, parue en 1979 après l’accident de Three Mile Island. Le tout est de savoir si ça a bien vieilli ou pas…

 

 

Lorsque l’explosion retentit, ils sont à l’écart de l’impact mais en subissent le souffle. François se retrouve avec un couple – Marie-Françoise et Jacques, une jeune femme puis un paysan. Ils errent dans les alentours, redoutant les radiations. François, qui sort d’une séparation assez douloureuse, se met  à fantasmer sur la jeune femme. Le groupe est cependant bientôt pris en charge par l’armée française qui les emmène dans un camp de regroupement où hommes et femmes sont séparés. Aucune explication ne leur est donnée, tant sur les origines de l’explosion (guerre ou accident ?) que sur ce qui les attend désormais. François comprend que, désormais, il n’a plus le contrôle de sa vie…

 

 

Les Retombées offre un tableau « réaliste » des retombées d’une frappe nucléaire (ou en tout cas qui sonne « vrai ») et en même temps assez archétypale : l’armée arrive, les enferme dans des camps, sans rien dire, prête à des expériences (Andrevon fait même référence à Auschwitz). On sent ici l’ambiance de toute une époque : nous voilà repartis dans ces bonnes vieilles années 1970, si lointaines et si proches, antimilitaristes et libertaires ! L’histoire proposée possède des qualités : solides descriptions, choix d’un narrateur « distant » (François subit les évènements et Andrevon réussit l’exploit de nous le rendre à la fois proche et lointain). Malgré une empreinte politique gauchiste qui peut agacer, cette novella mérite d’être relue. Et l’opacité du lobby nucléaire, quel que soit l’avis que l’on puisse avoir sur cette technologie, rend de plus pertinent une partie du propos de l'auteur...