Ursula K. Le Guin - Aux douze vents du monde

Aux douze vents du monde

Une des grandes voix de la science-fiction américaine

Décédée en 2018, auteur des Dépossédés (Robert Laffont, 1975) et du cycle de Terremer, Ursula Le Guin a marqué le fandom par sa capacité à proposer des mondes crédibles et aussi par sa conception du genre qui la poussait à baser ses anticipations sur les sciences « douces » : en cela, elle est typique de son époque où les auteurs proposaient ce qu’on appelle couramment de la « Speculative fiction ». Le Guin s’est aussi intéressée à la fantasy dans le cycle de Terremer. Aux douze vents du monde rassemble un échantillon de ses nouvelles publiées aux USA en recueil en 1975, dont certaines avaient été éditées par Gérard Klein dans le livre d’or qu’il avait consacré à l’auteur (là, je parle d’un temps que les moins de vingt ans ne connaissent pas…). Elles sont toutes précédées par une présentation rapide d’Ursula Le Guin.

Un recueil très varié

On commence avec Avril à Paris, aimable histoire de voyage dans le temps, réunissant un professeur de littérature du XXe et un alchimiste du XVe. Puis il y a Les maitres, une nouvelle où l’humanité, à la suite d’une catastrophe (ou d’une guerre nucléaire ?), vit sous des nuages sombres et est retourné au moyen-âge, l’église pourchassant les rares qui enseignent encore les mathématiques et l’usage du 0. Dans la boîte d’ombre, on voit Le Guin se mettre à la fantasy avec un résultat plaisant. Elle explore aussi l’univers de ses romans : Le mot de déliement est un récit se déroulant dans l’univers de Terremer alors qu’A la veille de la Révolution se passe dans le monde des dépossédés. Elle livre une très bonne nouvelle sur le clonage avec Neuf existences : comment un clone peut-il survivre à la mort de ses frères à qui il est lié par la conscience ? Enfin notons Les choses, écrite originellement pour un volume de l’anthologie Orbit de Damon Knight sur un apocalypse annoncé.

De l’écrivain

On est frappé ici par la variété des styles et des thèmes abordés par Ursula Le Guin même si ce recueil date des années 70. Comme on l’a dit, elle est typique de cette génération (pensons à Silverberg) qui écrivaient de la science-fiction avec une ambition littéraire. Par contre, on ne sent pas chez elle une envie de reconnaissance à laquelle un Damon Knight, par exemple, aspirait ardemment. Aux douze vents du monde constitue en tout cas une bonne introduction à son talent, pour ceux qui ignoreraient encore qui elle est : il faut savoir combler ses manques !

Sylvain Bonnet