Livre
Photo de H.P. Lovecraft et le jeu vidéo

H.P. Lovecraft et le jeu vidéo

Date de parution : 17/03/21  -  Livre
ISBN : 9782376971047
Commenter
CelineGuillet   - le 17/04/2021

H.P. Lovecraft et le jeu vidéo

Les éditions Ynnis nous proposent un livre essai qui traite d’un sujet mille fois abordé, discuté, et pourtant jamais traité en profondeur : celui de l’influence de H.P. Lovecraft, l’auteur américain sur la culture pop, et la culture en général. Ynnis est une maison d’édition spécialisée dans les ouvrages sur la culture pop notamment, mais aussi sur la culture japonaise et le jeu vidéo.

L’auteur, Carlos Gomez Gurpegui, né en 1991, a travaillé comme journaliste dans le milieu du jeu vidéo, et a aussi une activité plus académique pour des rencontres et colloques. Il avait donc 1 an lorsque Alone in the dark est sorti, mais visiblement il a pu percevoir l’importance de ce jeu dans la culture vidéoludique actuelle.

Le livre est découpé en 2 parties distinctes : la première, la plus importante au niveau pagination, revient sur la vie de l’auteur, et la seconde constitue la promesse du livre : le lien entre Lovecraft et le jeu vidéo. A première vue les connaisseurs diront que la moitié du livre est nouvelle, en fait l’argumentaire de l’auteur se nourrit de l’approche bibliographique, ce qui justifie cette partie si fournie.

Une redécouverte des mythes de Cthulhu : plutôt Lovecraft ou plutôt Derleth ?

Après une biographie rapide, mais permettant de resituer Lovecraft dans son contexte et parler de sa production, l’auteur de l’essai détaille les différentes inspirations de l’auteur, puis ses différents écrits, avant de décortiquer ce qui fait le mythe. Il explique alors la différence entre le mythe pour Lovecraft, une vision presque « potache », un jeu partagé entre plusieurs auteurs, qui enrichissent un corpus de divinités, créatures, lieux et livres, et la vision d’Auguste Derleth. Celle-ci, est celle qui a prédominé en France (et a priori partout dans le monde) lorsque Derleth a permis de redécouvrir ces écrits du maître de Providence, et a perduré pendant de nombreuses années. Cette vision est plus proche de l’approche catholique de Derleth, opposant le bien et le mal, donnant un sens aux desseins des créatures. Bien loin de l’esprit initial des écrits de Lovecraft comme de nombreux auteurs du premier cercle. La synthèse est très intéressante, et notre essayiste en connait un sacré rayon sur l’œuvre et sa genèse. C’est assez amusant de se retrouver dans les exemples décrits par Carlos Gomez Gurpegui : oui moi aussi j’ai longtemps cru que le Rodeur devant le Seuil était un livre de Lovecraft (bah oui c’était écrit sur la couverture), et que la Trace de Cthulhu est plus proche d’un récit pulp tiré d’une partie de Jeu de rôle foireuse (« bon maintenant on va atomiser R’lyeh ») que de toute production de Lovecraft.

Une sélection de jeu étroite mais approfondie

En transition après la partie bio et bibliographique, Carlos Gomez Gurpegui parle rapidement des différentes approches qui permettent de jouer dans les mondes de Lovecraft, des jeux de rôle aux jeux de plateau, dont la liste est non exhaustive mais contient les classiques du genre. On se rend compte alors que l’on joue plus à des jeux qui ont une vision derlethienne du mythe qu’une approche lovecraftienne…

L’auteur aborde donc ensuite plusieurs jeux vidéo, les décrivant et montrant ce qui fait leurs forces, leurs faiblesses, leur rattachement à un univers purement lovecraftien. On y retrouve des titres anciens, comme plus récents. Le livre intègre même des éléments sur des jeux en projets, pas encore sortis. L’auteur nous fait part de sa grande érudition sur le sujet, en parlant de la genèse souvent très complexe de ces jeux vidéos.

Cela commence donc avec Alone in the Dark, titre emblématique, révolutionnaire à sa sortie pour sa réalisation, et aussi parfaitement réussi au niveau de l’ambiance. Puis viennent Shadow of the comet et Prisoner of ice, autres titres d’Infogramme. A chaque titre Carlos Gomez Gurpegui nous livre son avis et son jugement sur la fidélité à Lovecraft. On trouve ensuite les titres Eternal Darkness : Sanity’s requiem, Call of Cthulhu : Dark Corners of the Earth, Penumbra, Amnesia, Bloodborne et Everybody’s Gone to the Rapture. L’auteur décrit ce qui fait l’originalité de chaque titre, enrichissant l’approche du jeu vidéo avec de nouveaux concepts comme la santé mentale, et ce qui le rapproche de tel ou tel titre de l’œuvre originale de Lovecraft.  Il est juste dommage que le propos soit compliqué à suivre lorsque l’on n’a pas joué au jeu vidéo correspondant, je conseille donc d’avoir un écran pas loin pour voir ce que veut dire l’auteur.

Ce livre apporte de nombreuses informations, et rafraîchit l’approche de l’œuvre de Lovecraft. Il s’adresse autant aux joueurs de jeux vidéo qu’aux lecteurs de Lovecraft voulant savoir ce que l’on peut faire de ses écrits en jeux vidéo. Paradoxalement j’ai plus apprécié la partie sur le mythe que celle sur les jeux vidéo, plus indigeste au niveau de l’écriture, avec pas mal de répétitions dans des paragraphes successifs. Pour pleinement apprécier cette seconde moitié du livre il est selon moi indispensable d’avoir une solide culture vidéoludique, ce que je n’ai pas, ou seulement partiellement (j’avais joué / terminé à 5 jeux cités). Mais ça donne envie de découvrir de nouveaux jeux, et de redécouvrir ceux que l’on connait… donc objectif accompli.

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?