Jérôme Noirez et Gombrowicz

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Je ne t’ai pas encore assez lu pour poser une question intéressante sur ton œuvre. Mais un jour, je suis tombé sur cette phrase de toi, sur le site du Cafard, à propos d’un livre de Gombrowicz, et ça m’a donné des frissons (d’émerveillement, pas d’horreur) :

« Après, que restait-il, à mon regard, de la science-fiction ? Pas grand-chose. À quoi bon les mondes lointains, les futurs, les espèces extraterrestres, quand on peut, en glissant la tête sous un meuble, dans la contemplation des moutons de poussière à la dérive, en levant les yeux vers le plafond, à la découverte de fissures douteuses, de ratures qui pourraient être des flèches, qui pourraient indiquer une direction, vers un signe, un autre signe, un autre, connaître le frisson de l’infinité des possibles ? »

Cela m’inspire deux questions :

- Est-ce ce que tu cherches à faire dans tes livres : disséminer des flèches, des indices, sans carcan défini, pour pousser le lecteur à découvrir de lui-même des choses qui le toucheront ?

Jérôme, je te remercie de citer mon article sur Gombrowicz, car il constitue pour moi un texte important. J'y dis en tout cas des choses moins superficielles que d'habitude. Je ne cherche pas à produire sur le lecteur un effet autre que celui des émotions fugaces. Je n'ai aucun projet politique ou philosophique. Mais je pourrais faire mien ce que tu dis. En tout cas, si je peux inspirer r une telle impression, ça me convient très bien.



- Que penses-tu de la notion de genre en littérature ? Est-ce que tu choisis consciemment le genre dans lequel tu écris, ou bien est-ce quelque chose d’anecdotique, de secondaire ?

J'ai la conscience des genres, oui. Je sais, plus ou moins, ce qui les borne. Ils sont néanmoins anecdotiques dans ma pratique, parce qu'ils ne déterminent pas mes choix narratifs. La novella dans Retour sur l'Horizon, oui, c'est de la sf, il y a des extraterrestres, etc. Mais j'aurais pu écrire un même maillage d'émotions dans un tout autre contexte. Ca aurait pu devenir un thriller, une histoire sentimentale, une épopée en vers...

Et plus spécifiquement, te sens-tu concerné par les remous qui agitent régulièrement le milieu de la science-fiction à propos de ce qu’elle doit être, ou ce qu’elle ne doit pas être ?

Pas concerné du tout, non. Du "Grand Fil", j'ai dû lire trois pages. Ce n'est pas du tout par mépris, c'est par incompétence. J'ai lu la préface de Serge, je me suis dit, ah, oui, tiens, merde, il connaît son sujet. J'ai lu le contrefeu de Roland dans Bifrost, et je me suis dit exactement la même chose. Ils maîtrisent un sujet, un domaine, pas moi. Je n'ai pas le bagage qui me permettrait de me sentir concerné.
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