Le drame de certains récits est que, malgré les qualités évidentes du texte, on s'y ennuie. L'action ne progresse pas. Ou mal. Oh !, le sujet est tout à fait intéressant et servi par une intrigue qui le met en valeur, les personnages sont bien posés, mais on s'ennuie, ça ne décolle pas vraiment. On ne voit pas bien, pourtant, ce qui cloche. L'ensemble est trop sage ou trop lisse. Trop évident, peut-être. Une évidence qui ne réserve pas réellement de surprise au lecteur. En fait, il manque une montée en puissance du récit.
Il faut de la tension, qui crée un horizon d'attente, mais une attente craintive qui fasse douter de l'issue de l'action. Quand bien même le lecteur saurait que la victoire du héros est acquise, il ne sait pas comment. Or, le suspense consiste à présenter un événement comme certain, voire inéluctable, mais dont les effets ne sont pas entièrement connus. C'est bien pour cela qu'il est redouté. Ça ressemble à la convocation chez le proviseur, le patron ou le juge, l'heure et le motif sont connus, les craintes justifiées, la sanction assurée, mais l'issue est plus opaque que la prochaine base d'imposition fiscale. Vous avez déjà dû connaître ça. Ah oui ! il y a aussi le rendez-vous galant dont vous espérez tant que vous en avez déjà les mains moites, ce qui est un très mauvais commencement pour finir, moites, sous des draps. Pour amener le lecteur dans cet état d'esprit, il faut que tous les fils de l'intrigue soient tendus jusqu'au point de rupture.
Quels sont les meilleurs moyens d'y parvenir ?
En premier lieu, il faut que la progression soit continue. On a déjà vu qu'on ne peut infliger à un prisonnier ayant subi l'estrapade, le pilori et le chevalet, une brûlure de la langue avec une soupe trop chaude, ni ajouter au malheur de celui qui a vu sa femme écrasée sous le véhicule des pompiers venus éteindre l'incendie de sa maison la déconvenue d'une chute dans la boue le jour des obsèques. Ce serait régresser dans la gradation des évènements.
Il faut aussi respecter une progression par paliers distincts. Rien n'est plus pénible que l'avancée constante, d'une régularité qui rend l'action prévisible. Ce que Boileau reprochait au style dans son Art poétique est valable pour la progression dramatique :
Un style trop égal et toujours uniforme
En vain brille à nos yeux, il faut qu'il nous endorme.
On lit peu ces auteurs, nés pour nous ennuyer,
Qui toujours sur un ton semblent psalmodier.
Si le suspense consiste à annoncer ce qui va se passer, le lecteur ne doit pas être en mesure de le prévoir avant l'annonce de l'auteur. On n'a sinon plus qu'une hâte : en finir avec ce qui ne recèle plus aucune inconnue.
Le résultat est encore pire si le récit ne joue pas la carte du suspense mais se contente de dérouler son histoire à la vitesse d'un escargot-vapeur, une unité si inférieure à celle du cheval qu'on ne l'a, à vrai dire, jamais utilisée. À trop vouloir amener discrètement une situation dramatique, celle-ci ne présente plus aucun aspect alarmiste lorsqu'elle se présente. C'est un peu l'histoire de la grenouille qu'on ébouillante progressivement : plutôt que de chercher à fuir, elle s'accommode de la situation. Si donc vous désirez faire bondir votre lecteur, contrastez vos scènes.
Le développement trop progressif recèle un autre piège que le débutant ne parvient pas toujours à déjouer, c'est celui d'être entraîné dans des directions qu'il n'a pas prévues. Qu'un personnage justifie trop longuement son point de vue le fait paraître rigide ou donne l'impression qu'il se dispute avec son interlocuteur. De telles scènes peuvent en amener d'autres qui emmènent l'auteur toujours plus loin de son sujet ou modifient excessivement la psychologie de ses personnages. Le diable est dans les détails, c'est bien connu. Ces longueurs provoquent aussi des incidences temporelles qui peuvent rapprocher des événements éloignés dans le temps, voire implanter trop durablement un détail dans la tête du lecteur pour bénéficier par la suite de l'effet de surprise escompté. Attention donc à ne pas s'égarer jusqu'au point de non-retour !
Il faut de la tension, qui crée un horizon d'attente, mais une attente craintive qui fasse douter de l'issue de l'action. Quand bien même le lecteur saurait que la victoire du héros est acquise, il ne sait pas comment. Or, le suspense consiste à présenter un événement comme certain, voire inéluctable, mais dont les effets ne sont pas entièrement connus. C'est bien pour cela qu'il est redouté. Ça ressemble à la convocation chez le proviseur, le patron ou le juge, l'heure et le motif sont connus, les craintes justifiées, la sanction assurée, mais l'issue est plus opaque que la prochaine base d'imposition fiscale. Vous avez déjà dû connaître ça. Ah oui ! il y a aussi le rendez-vous galant dont vous espérez tant que vous en avez déjà les mains moites, ce qui est un très mauvais commencement pour finir, moites, sous des draps. Pour amener le lecteur dans cet état d'esprit, il faut que tous les fils de l'intrigue soient tendus jusqu'au point de rupture.
Quels sont les meilleurs moyens d'y parvenir ?
En premier lieu, il faut que la progression soit continue. On a déjà vu qu'on ne peut infliger à un prisonnier ayant subi l'estrapade, le pilori et le chevalet, une brûlure de la langue avec une soupe trop chaude, ni ajouter au malheur de celui qui a vu sa femme écrasée sous le véhicule des pompiers venus éteindre l'incendie de sa maison la déconvenue d'une chute dans la boue le jour des obsèques. Ce serait régresser dans la gradation des évènements.

Un style trop égal et toujours uniforme
En vain brille à nos yeux, il faut qu'il nous endorme.
On lit peu ces auteurs, nés pour nous ennuyer,
Qui toujours sur un ton semblent psalmodier.
Si le suspense consiste à annoncer ce qui va se passer, le lecteur ne doit pas être en mesure de le prévoir avant l'annonce de l'auteur. On n'a sinon plus qu'une hâte : en finir avec ce qui ne recèle plus aucune inconnue.
Le résultat est encore pire si le récit ne joue pas la carte du suspense mais se contente de dérouler son histoire à la vitesse d'un escargot-vapeur, une unité si inférieure à celle du cheval qu'on ne l'a, à vrai dire, jamais utilisée. À trop vouloir amener discrètement une situation dramatique, celle-ci ne présente plus aucun aspect alarmiste lorsqu'elle se présente. C'est un peu l'histoire de la grenouille qu'on ébouillante progressivement : plutôt que de chercher à fuir, elle s'accommode de la situation. Si donc vous désirez faire bondir votre lecteur, contrastez vos scènes.
Le développement trop progressif recèle un autre piège que le débutant ne parvient pas toujours à déjouer, c'est celui d'être entraîné dans des directions qu'il n'a pas prévues. Qu'un personnage justifie trop longuement son point de vue le fait paraître rigide ou donne l'impression qu'il se dispute avec son interlocuteur. De telles scènes peuvent en amener d'autres qui emmènent l'auteur toujours plus loin de son sujet ou modifient excessivement la psychologie de ses personnages. Le diable est dans les détails, c'est bien connu. Ces longueurs provoquent aussi des incidences temporelles qui peuvent rapprocher des événements éloignés dans le temps, voire implanter trop durablement un détail dans la tête du lecteur pour bénéficier par la suite de l'effet de surprise escompté. Attention donc à ne pas s'égarer jusqu'au point de non-retour !
Une seule exception à cette évolution imperceptible, le récit où on mesure soudain la distance parcourue. Mais oui, vous savez bien !, la surprise dite de la pente douce, si fréquente dans le policier et le fantastique, nom d'un p'tit savon !, où le piège devient soudain évident, où la personne a évolué dans le mauvais sens sans s'en rendre compte. La révélation est si saisissante que le lecteur en éprouve un choc, car il n'a rien vu venir. Mais ce genre de procédé ne constitue pas, en général, le point culminant du récit, plutôt le début des ennuis.
Or votre but est d'aligner des scènes toujours plus saisissantes jusqu'au dernier temps fort, ce climax qui constituera son apogée, cet apex vers lequel tout converge, qu'on désigne au théâtre comme la grande scène du trois.
La grande scène finale demande à être dramatisée, mais pas de façon brouillonne, ni artificielle. Les auteurs qui appliquent mécaniquement les procédés du page turner, à savoir des effets purement techniques, un peu comme au cinéma la musique lancinante ou les violons romantiques, la bouche ouverte sur un cri de terreur ou les yeux brouillés de larmes, bref, une accumulation de stéréotypes avec le sentiment que si l'un ne marche pas, les autres se révéleront efficaces, laissent froid tant cette débauche est artificielle : la promesse de scènes fortes et le désir de savoir amènent à tourner les pages, mais les espoirs déçus ne débouchent finalement que sur de la déception. La terreur attendue, l'émotion martelée finissent par fatiguer. Le final, c'est la réunion de tout ce que vous avez mis dans votre roman. S'il n'y a que du vide, ou du bluff, vous concluez par une grande pétarade qui, pour être spectaculaire, ne laissera pas moins insensible.
Ceci suppose une logique dramatique interne. La grande scène finale s'insère parfaitement dans le récit car tout y conduit logiquement. C'est sur ces hauteurs qu'on ramasse les éléments de l'intrigue et ce qui était au cœur de l'histoire. Louper ce sommet, et c'est le récit qui se ramasse lamentablement. Reste qu'il n'est pas forcément facile de parvenir à cet acmé quand on est jeune auteur tout juste bourgeonnant… A vous de convoquer ce que vous avez mis dans votre récit et de mobiliser tout ce qui peut l'être. Plus vous arrivez à tirer de fils pour les amener à cet endroit précis, plus vous aurez un final réussi.
Comment procéder ?
Or votre but est d'aligner des scènes toujours plus saisissantes jusqu'au dernier temps fort, ce climax qui constituera son apogée, cet apex vers lequel tout converge, qu'on désigne au théâtre comme la grande scène du trois.
La grande scène finale demande à être dramatisée, mais pas de façon brouillonne, ni artificielle. Les auteurs qui appliquent mécaniquement les procédés du page turner, à savoir des effets purement techniques, un peu comme au cinéma la musique lancinante ou les violons romantiques, la bouche ouverte sur un cri de terreur ou les yeux brouillés de larmes, bref, une accumulation de stéréotypes avec le sentiment que si l'un ne marche pas, les autres se révéleront efficaces, laissent froid tant cette débauche est artificielle : la promesse de scènes fortes et le désir de savoir amènent à tourner les pages, mais les espoirs déçus ne débouchent finalement que sur de la déception. La terreur attendue, l'émotion martelée finissent par fatiguer. Le final, c'est la réunion de tout ce que vous avez mis dans votre roman. S'il n'y a que du vide, ou du bluff, vous concluez par une grande pétarade qui, pour être spectaculaire, ne laissera pas moins insensible.
Ceci suppose une logique dramatique interne. La grande scène finale s'insère parfaitement dans le récit car tout y conduit logiquement. C'est sur ces hauteurs qu'on ramasse les éléments de l'intrigue et ce qui était au cœur de l'histoire. Louper ce sommet, et c'est le récit qui se ramasse lamentablement. Reste qu'il n'est pas forcément facile de parvenir à cet acmé quand on est jeune auteur tout juste bourgeonnant… A vous de convoquer ce que vous avez mis dans votre récit et de mobiliser tout ce qui peut l'être. Plus vous arrivez à tirer de fils pour les amener à cet endroit précis, plus vous aurez un final réussi.
Comment procéder ?
EFFETS DIVERS
Ces questions ont déjà été évoquées de façon disparate ; à présent on passe aux exercices pratiques. Vous avez à votre disposition des moyens techniques et des procédés narratifs, n'hésitez pas à puiser dans vos boîtes à outils. Les recettes éprouvées sont des ficelles, c'est entendu. Mais elles le sont devenues parce qu'elles ont fait leurs preuves. Et elles continueront à fonctionner tant que le lecteur ne se rendra pas compte que vous les réutilisez. Il n'est jamais mécontent de se faire avoir, mais il est déçu de vous prendre sur le fait. On sait que les prestidigitateurs ont des trucs, et on les apprécie, tant qu'ils les réussissent. À vous de distraire suffisamment l'attention du lecteur pour masquer vos ficelles en cordon de sonnette, ceinture de robe de chambre ou tendeur pour bagage à vélo.
Les moyens techniques usent de règles simples ajustables à chaque type de récit :
– Pour commencer, on prendra garde à ne pas partir trop brutalement, faute de quoi on se trouve condamné à la surenchère, qui risque fort de finir par une crise d'épilepsie. Il a déjà été dit que les débuts nerveux sont suivis de temps morts. S'ils constituent de bonnes mises en bouche, il convient de remarquer qu'ils sont souvent extérieurs au récit : une manière musclée de présenter le personnage ou l'ambiance, avant d'embrayer sur l'histoire proprement dite. Dans tous les cas, une introduction mouvementée demande un temps d'apaisement correspondant à l'énoncé de l'intrigue et à l'exposé des données nécessaires pour démarrer le récit. En faire l'économie déboucherait sur des scènes d'action dépourvue de tout affect, car le scénario n'a pas laissé au lecteur le temps de s'identifier à un personnage ou de saisir toute la portée des enjeux. L'autre solution serait d'apporter des précisions en cours de route, ce qui constituerait des ralentissements malvenus, en tout cas, plus nombreux.
Au début de Blade Runner, Rick Deckard est présenté en même temps que l'environnement, saisissant par sa pesanteur, du Los Angeles de 2019. Pour mémoire, ce conte de fées moderne raconte l'évasion de marionnettes d'un magasin de jouets, à la recherche de piles qui durent un peu plus longtemps. Le riant de Funès traquant ces Pinocchios du futur les repère à leur regard fuyant (regardez-moi dans les yeux !), car c'est au fond des prunelles et non à la longueur du nez que se détectent à présent leurs mensonges. Une scène d'action liminaire donne le ton et l'ambiance, mais l'intrigue réelle est plus longue à se mettre en place et prend corps au fil de dialogues et de rencontres, jusqu'à celle de Gepetto lui-même. Chaque nouvelle étape de l'enquête s'ouvre ou débouche cependant sur un épisode violent ou mouvementé, afin de soutenir l'intérêt.
– Pour commencer, on prendra garde à ne pas partir trop brutalement, faute de quoi on se trouve condamné à la surenchère, qui risque fort de finir par une crise d'épilepsie. Il a déjà été dit que les débuts nerveux sont suivis de temps morts. S'ils constituent de bonnes mises en bouche, il convient de remarquer qu'ils sont souvent extérieurs au récit : une manière musclée de présenter le personnage ou l'ambiance, avant d'embrayer sur l'histoire proprement dite. Dans tous les cas, une introduction mouvementée demande un temps d'apaisement correspondant à l'énoncé de l'intrigue et à l'exposé des données nécessaires pour démarrer le récit. En faire l'économie déboucherait sur des scènes d'action dépourvue de tout affect, car le scénario n'a pas laissé au lecteur le temps de s'identifier à un personnage ou de saisir toute la portée des enjeux. L'autre solution serait d'apporter des précisions en cours de route, ce qui constituerait des ralentissements malvenus, en tout cas, plus nombreux.

– Pour les mêmes raisons, on évite de s'appesantir d'emblée sur la portée du récit – une fois de plus, donner à voir, et distiller cette impression de façon progressive est préférable à l'exposé brut. Si on part d'emblée sur une émotion figée, étalée sur la durée du récit, comme l'indignation face à un système inique, le sordide d'un quartier ou d'un milieu sans foi ni loi, on ne tiendra pas jusqu'au bout. Le lecteur ne saurait garder le même état d'esprit tout du long. Au final, il y aurait plus de sarcasmes et de plaisanteries douteuses que de stupeur muette devant l'horreur de la situation. C'est une erreur fréquente de débutant que de présenter dès la première page tout un univers de noirceur vu par les yeux d'un héros si désabusé qu'il devrait logiquement se suicider à la fin du prologue. Une fois ceci posé, on raconte quoi ? La suite ne pourra qu'atténuer l'impression initiale. Ce que l'auteur cherche à dénoncer, ou à placer au centre du récit, doit donc s'imposer en cours de route avec la force de l'évidence. Celui-ci peut, bien sûr, évoquer son sujet d'entrée, histoire de placer le lecteur dans de bonnes dispositions, le rendre réceptif au propos, mais de façon annexe, sans donner l'air d'insister. Rien ne signale à ce stade qu'il s'agit de l'élément central, ni dans quelle perspective il sera considéré. Commencez par poser des contours, ajoutez les détails ensuite.
Carrie, de Stephen King, est un savant démarquage du Norman Bates de Psychose, par Robert Bloch, adapté par Alfred Hitchcock. La jeune fille renfermée du fait d'une mère castratrice développe des dons encore plus fantastiques que l'art du travestissement de son modèle. King n'a même pas besoin d'un bras armé d'un couteau pour l'épisode de la douche, il se contente de respecter les règles du genre en montrant Carrie hurler devant l'écoulement du sang dans la bonde. Si on ne voit pas de couteau, il y a en revanche beaucoup de monde sous la douche. King présente les principaux protagonistes ainsi que le sujet de son livre dans une scène qui ne devient éclairante qu'après coup : on ne comprendra que plus tard que les personnes présentes sont toutes coupables. Le personnage de Carrie est bien exposé, le thème discrètement présenté : cette scène fixe tous les éléments constitutifs du récit, lesquels seront amplifiés jusqu'au tragique final. Mais rien ne permet, à ce stade, de deviner la direction que prendra l'histoire.

En corollaire :
– Graduez vos effets. Procédez donc par petits chocs. Puis par d'autres de plus en plus forts. Et de plus en plus fréquents. Mais jamais avec une régularité permettant d'anticiper le suivant ; le lecteur doit juste être assuré que celui-ci finira par intervenir.
Le Seigneur des anneaux de J. R. R. Tolkien commence avec des scènes bucoliques bien éloignées de la noirceur du troisième épisode. La thématique n'est pas encore au centre du récit. Qui se douterait qu'on amplifierait le refus de mettre une bague au doigt jusqu'à montrer le divorce de nations entières ? Si le récit avait débuté avec des combats à l'épée ou des sortilèges dès le premier chapitre, le récit se serait essoufflé bien avant la fin. En revanche, les menaces, les enjeux, les forces en présence et la lutte pour la possession de l'anneau sont progressivement présentés, de façon à rendre la suite toujours plus dramatique.
Le Seigneur des anneaux de J. R. R. Tolkien commence avec des scènes bucoliques bien éloignées de la noirceur du troisième épisode. La thématique n'est pas encore au centre du récit. Qui se douterait qu'on amplifierait le refus de mettre une bague au doigt jusqu'à montrer le divorce de nations entières ? Si le récit avait débuté avec des combats à l'épée ou des sortilèges dès le premier chapitre, le récit se serait essoufflé bien avant la fin. En revanche, les menaces, les enjeux, les forces en présence et la lutte pour la possession de l'anneau sont progressivement présentés, de façon à rendre la suite toujours plus dramatique.
– Variez vos effets. Boileau, dont les conseils n'ont décidément pas pris une ride, poursuivait ainsi le passage ci-dessus :
Heureux qui, dans ses vers, sait d'une voix légère
Passer du grave au doux, du plaisant, au sévère !
La variété éloigne de la lourdeur de la répétition – à condition de progresser dans l'intrigue et de ne pas aligner des scènes sans lien avec l'ensemble. Au niveau du suspense, un choc chasse l'autre, mais on garde néanmoins l'impression d'aller sans faillir vers des sommets toujours plus échevelés. C'est un peu le principe de la douche écossaise. Dans cette optique, le faux suspense a sa place car il se trouvera bien employé. Une dramatisation qui fait craindre le pire mais s'achève de façon plaisante permet d'assener le coup suivant avec un effet de surprise accru. La vieille ficelle de la porte qui s'entrouvre face au protagoniste qui redoute ce qui se trouve derrière, alors qu'il ne s'agissait que d'un chat est difficilement réutilisable telle quelle, mais son principe est déclinable à l'infini. Une dispute qui risque de dégénérer et qui s'achève sur un rassurant statu quo permet de faire apparaître le tueur à la fenêtre de façon plus saisissante.
D'entre les morts de Boileau et Narcejac donne des suées au seul vu des changements de titre, intitulé From Among the Dead pour l'adaptation de Hitchcock jusqu'à six mois avant la sortie de ce qui sera Vertigo, devenu Sueurs froides en France. Dans ce récit les occasions de passer de la surprise à l'ironie, voire à la perplexité ou à la méfiance, ne manquent pas, depuis l'acrophobie du héros, Flavières, jusqu'à son absence de sexualité, la répétition des chutes mortelles et les séquences d'adoration amoureuse.
Le faux suspense ne sert pas uniquement à maintenir une tension lorsque la progression de l'intrigue est mesurée, mais permet également de rompre avec la linéarité du récit.
– le timing est à ce stade essentiel. On avait déjà recommandé d'éviter les temps morts. Les intervalles entre les scènes d'action, qui sont nécessaires à l'intrigue, doivent être de plus en plus brefs. Usez d'ellipses, de raccourcis, pour vous cantonner à l'essentiel et condenser les informations dans un espace minimum. Vous n'avez pas besoin de montrer la scène au complet. Pour une fois, vous ne serez pas obligés d'indiquer par quels moyens le protagoniste se rend sur les lieux ni les étapes de son trajet. Pas plus que vous n'êtes tenu de clore une scène. C'est ici qu'on se rend compte que l'auteur doit soigner les détails uniquement dans la phase d'élaboration de l'intrigue, lorsque celle-ci se complexifie. Lors de la mise en place du climax, celle-ci n'est plus en construction mais amorce les phases de dénouement, ce n'est plus le moment de fignoler ni de poser des repères. En fin de récit, le détail, si détail il doit y avoir, ne saurait être qu'un rappel. On le rend visible et on l'explicite pour faciliter la compréhension de l'intrigue. Ainsi, le médaillon au cou du sosie de Madeleine permet à Flavières/Scotty de comprendre qu'il a été victime d'une machination, et qu'on l'a choisi lui parce qu'il était sujet au vertige. C'est la première étape vers le dénouement : les scènes sont à partir de là plus rapides que celles de mise en place.
Heureux qui, dans ses vers, sait d'une voix légère
Passer du grave au doux, du plaisant, au sévère !
La variété éloigne de la lourdeur de la répétition – à condition de progresser dans l'intrigue et de ne pas aligner des scènes sans lien avec l'ensemble. Au niveau du suspense, un choc chasse l'autre, mais on garde néanmoins l'impression d'aller sans faillir vers des sommets toujours plus échevelés. C'est un peu le principe de la douche écossaise. Dans cette optique, le faux suspense a sa place car il se trouvera bien employé. Une dramatisation qui fait craindre le pire mais s'achève de façon plaisante permet d'assener le coup suivant avec un effet de surprise accru. La vieille ficelle de la porte qui s'entrouvre face au protagoniste qui redoute ce qui se trouve derrière, alors qu'il ne s'agissait que d'un chat est difficilement réutilisable telle quelle, mais son principe est déclinable à l'infini. Une dispute qui risque de dégénérer et qui s'achève sur un rassurant statu quo permet de faire apparaître le tueur à la fenêtre de façon plus saisissante.

Le faux suspense ne sert pas uniquement à maintenir une tension lorsque la progression de l'intrigue est mesurée, mais permet également de rompre avec la linéarité du récit.
– le timing est à ce stade essentiel. On avait déjà recommandé d'éviter les temps morts. Les intervalles entre les scènes d'action, qui sont nécessaires à l'intrigue, doivent être de plus en plus brefs. Usez d'ellipses, de raccourcis, pour vous cantonner à l'essentiel et condenser les informations dans un espace minimum. Vous n'avez pas besoin de montrer la scène au complet. Pour une fois, vous ne serez pas obligés d'indiquer par quels moyens le protagoniste se rend sur les lieux ni les étapes de son trajet. Pas plus que vous n'êtes tenu de clore une scène. C'est ici qu'on se rend compte que l'auteur doit soigner les détails uniquement dans la phase d'élaboration de l'intrigue, lorsque celle-ci se complexifie. Lors de la mise en place du climax, celle-ci n'est plus en construction mais amorce les phases de dénouement, ce n'est plus le moment de fignoler ni de poser des repères. En fin de récit, le détail, si détail il doit y avoir, ne saurait être qu'un rappel. On le rend visible et on l'explicite pour faciliter la compréhension de l'intrigue. Ainsi, le médaillon au cou du sosie de Madeleine permet à Flavières/Scotty de comprendre qu'il a été victime d'une machination, et qu'on l'a choisi lui parce qu'il était sujet au vertige. C'est la première étape vers le dénouement : les scènes sont à partir de là plus rapides que celles de mise en place.
COMPOSER AVEC LE PASSÉ
Les moyens narratifs sont inhérents à l'intrigue et aux personnages : s'ils ont été bien nourris, ils fourniront maintes occasions de faire du point culminant une réussite.
– Développer une intrigue parallèle était un conseil délivré pour meubler le récit entre deux scènes et éviter les temps morts. On en tirera un meilleur profit en la mettant en lien avec le thème principal, lequel sera décliné sur le mode contradictoire ou bien répétera le motif sur un mode mineur. Il ne s'agit pas d'insérer le même motif jusqu'à la nausée, sauf si vous désirez la provoquer chez le lecteur, mais de faire des variations dessus, un peu comme des gammes. L'avantage est de multiplier les approches et les points de vue ou d'apporter plusieurs réponses : si la confrontation à la mort est surmontée chez le héros, elle peut ne pas l'être dans l'intrigue secondaire mettant en scène un personnage annexe proposant sa propre vision des choses. D'ailleurs, ceci peut vous aider quand vous ne savez pas quelle solution retenir : optez pour les deux, déclinées de deux façons différentes, et voyez dans quelles directions elles vous mènent.
Le film polonais Dom Zly (aussi connu sous le nom de Dark House), de Wojciech Smarzowski, se déploie précisément autour des intrigues annexes Autour de la reconstitution d'une scène de meurtre se greffent une multitude d'histoires parallèles, à propos de coucheries, de fraudes, de mésententes et de conflits d'intérêt… Le regard n'est pas le même à l'échelle du particulier et du dignitaire, de sorte que même si l'ensemble fonctionne comme une fractale, les réflexions qui en découlent sont différentes et donnent son sens à la principale.
Par ailleurs, l'intrigue parallèle participe avantageusement à la dramatisation dans la mesure où le lecteur n'est pas immédiatement en mesure de déterminer son importance dans le récit. Cette incertitude est profitable à l'auteur pour soutenir l'intérêt dans les phases creuses et lui évite le recours au faux suspense, surtout si l'artificialité de ce dernier est trop évidente.
– L'intrigue parallèle centrée sur le personnage rappelle que celui-ci a aussi une histoire, même au plus fort de l'action. Une bonne idée ne suffit pas si elle n'est pas incarnée par des personnages qui y mettent de la chair et la rendent remarquable. L'action est un soutien dramatique fréquemment exploité. Mais sans des personnages forts, la montée en puissance ne se fera pas. C'est ce qui explique que des intrigues médiocres fonctionnent, car les personnages sont réussis.
Dans les polars, les déboires conjugaux ou d'alcool du flic ou du privé vont presque systématiquement de pair avec l'enquête. Ils pèsent sur celle-ci, pas seulement parce que l'épouse sur le point de divorcer jouera l'équivalent de la princesse à sauver dans la tour ou de la bimbo de l'espace enlevée par un monstre de l'espace, mais parce qu'on écorne un peu l'image trop nette du héros pur et dur, arborant en toutes circonstances l'éternel sourire de Tom Cruise, même quand il est de dos. Il va de soi qu'il vaut mieux s'arranger pour que l'histoire du personnage interfère avec l'histoire principale de façon un peu moins mécanique que ces sauvetages familiaux qui, dans les scénarios hollywoodiens, permettent de conclure sur une image de bonheur conjugal. La faille du héros taciturne commençant à son tour à faire cliché, on lui prête désormais des défauts plus conséquents qu'un penchant pour la boisson : menteur, flagorneur, roublard ou trafiquant, il cesse à présent de s'élever au-dessus du commun des mortels. Les faiblesses du héros n'ont cette fois plus rien pour émouvoir. C'est le prix de la crédibilité.
Si chez Tolkien Frodon lutte continuellement contre lui-même pour ne pas céder à l'attraction de l'Anneau, Deckard dans Blade Runner a moins de scrupules pour partir avec la réplicante qu'il est censé traquer. La faille du héros de Sueurs froides est plus pathologique, non pas son sujet au vertige mais son blocage sexuel qui pousse ce puceau à accentuer la ressemblance d'un sosie avec la morte qu'il aimait. Ici, l'intrigue principale, la machination pour maquiller un meurtre, est étroitement liée avec la secondaire, justifiée par le choix du témoin au faux suicide, qui se trouve même à égalité avec elle : la pathologie de Flavières/Scottie semble même prendre le pas sur l'intrigue policière, ce que confirme le changement de sens véhiculé par le titre, le roman D'entre les morts mettant l'accent sur la machination et Vertigo sur le personnage. Dans le roman de Stephen King également, les intrigues sont entremêlées au point que l'une sert à révéler l'autre : Carrie est l'histoire d'une fille dotée de pouvoirs télékinésiques, mais son destin est aussi bien révélé par la folie mystique de la mère que par la cruauté des lycéens de son entourage.
– L'évolution des personnages concourt, comme l'intrigue parallèle, à mettre en valeur le récit. Dans Le Seigneur des Anneaux, où les protagonistes sont nombreux, une telle évolution est facile à mettre en œuvre, la lâcheté des uns et le caractère belliqueux des autres, les amours contrariées d'Éowyn et Aragorn, Gimli et Galadriel, l'évolution de Samsagace en héros de légende, soutien sans faille de Frodon, autorisent des rebondissements aptes à donner du relief à la fresque. Dans les étapes vers la grande scène finale, les changements de psychologie demandent un soin particulier : ils doivent être suffisamment progressifs pour ne pas surprendre. Même un épisode choquant, qui amène un personnage à modifier sa conduite, ne le transforme pas radicalement mais pas petites touches discrètes. L'évènement fondateur marque le début de la métamorphose mais ne la borne pas. Si la colère de Carrie se déploie avec une telle violence à la fin, c'est parce qu'une série de déconvenues et d'agressions ont préparé le terrain. Rick Deckard, un rien stéréotypé dans la version cinématographique (il n'a rien du flic veuf et solitaire dans Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques, de Dick : marié, il se révèle aussi plus vénal), change progressivement de point de vue, pas seulement parce qu'il tombe amoureux de Rachel, mais parce qu'il éprouve de la compassion pour les réplicants et que ceux-ci se révèlent capables d'émotions.
– Souligner les métaphores, exploiter la symbolique présente dans le récit est indispensable. Si un récit ne doit pas se contenter d'être la métaphore d'une réflexion ou d'une idée, il ne doit pas non plus passer à côté de ce qui pourrait servir à le caractériser ou à appuyer ses intentions. Une histoire a un sens. Des scènes additionnelles peuvent aider à les renforcer. Souvent, d'ailleurs, les intrigues secondaires sont récupérées ou détournées dans ce but, étant entendu que celles qui laissent une impression contraire sont abandonnées. Des compléments d'enquête, une prise de conscience, une conversation éclairante, permettent d'aller plus loin : en entrant dans les détails, et en sélectionnant les plus signifiants, l'intrigue principale ne peut que gagner en relief.
Dom Zly est remarquable dans sa dénonciation de la violence, la corruption et l'alcoolisme en Pologne par la répétition systématique de ces pratiques au niveau des citoyens, des forces de l'ordre, des cadres jusqu'aux hauts fonctionnaires.
Renforcer une métaphore apparente est indispensable pour ne pas laisser le lecteur sur un sentiment d'incomplétude. Car si celui-ci la remarque, il ne comprend pas que le lien ne soit pas accentué, voire qu'il se trouve affaibli par des détails annexes. C'est ainsi que Hitchcock a entre autres modifié le lieu de l'action de Vertigo pour resserrer sa vision du personnage de Boileau et Narcejac. Ceux-ci avaient établi un lien avec le mythe d'Orphée, d'ailleurs nommé cité : l'obsession de Flavières est de ramener à la vie la femme dont il était tombé amoureux en travestissant le sosie qu'il a un jour croisé, pour accentuer la ressemblance avec la défunte. Hitchcock se focalise sur sa chasteté, déjà qualifiée d'impuissance dans le roman, qu'il amplifie en pathologie sexuelle proche de la nécrophilie. Le réalisateur va donc multiplier les symboles phalliques, des substituts utilisés de façon à souligner cette défaillance. Une page de Wikipedia assortie de liens résume très bien pour quelles raisons Hitchcock situe l'intrigue à San Francisco de façon à filmer en arrière plan la Coit Tower, monument phallique censé représenter une lance de pompier, érigé par Lillie Hitchcock Coit en remerciement au corps de pompier pour son intervention durant le tremblement de terre de 1906. C'est dire s'il s'amuse à multiplier les références et les pistes. La même page analyse les mouvements de caméra suggérant le vertige, ainsi que les choix esthétiques d'Alfred Hitchcock : on voit combien chez lui les détails sont soignés et donnent à l'œuvre sa dimension magistrale.
– Développer une intrigue parallèle était un conseil délivré pour meubler le récit entre deux scènes et éviter les temps morts. On en tirera un meilleur profit en la mettant en lien avec le thème principal, lequel sera décliné sur le mode contradictoire ou bien répétera le motif sur un mode mineur. Il ne s'agit pas d'insérer le même motif jusqu'à la nausée, sauf si vous désirez la provoquer chez le lecteur, mais de faire des variations dessus, un peu comme des gammes. L'avantage est de multiplier les approches et les points de vue ou d'apporter plusieurs réponses : si la confrontation à la mort est surmontée chez le héros, elle peut ne pas l'être dans l'intrigue secondaire mettant en scène un personnage annexe proposant sa propre vision des choses. D'ailleurs, ceci peut vous aider quand vous ne savez pas quelle solution retenir : optez pour les deux, déclinées de deux façons différentes, et voyez dans quelles directions elles vous mènent.

Par ailleurs, l'intrigue parallèle participe avantageusement à la dramatisation dans la mesure où le lecteur n'est pas immédiatement en mesure de déterminer son importance dans le récit. Cette incertitude est profitable à l'auteur pour soutenir l'intérêt dans les phases creuses et lui évite le recours au faux suspense, surtout si l'artificialité de ce dernier est trop évidente.
– L'intrigue parallèle centrée sur le personnage rappelle que celui-ci a aussi une histoire, même au plus fort de l'action. Une bonne idée ne suffit pas si elle n'est pas incarnée par des personnages qui y mettent de la chair et la rendent remarquable. L'action est un soutien dramatique fréquemment exploité. Mais sans des personnages forts, la montée en puissance ne se fera pas. C'est ce qui explique que des intrigues médiocres fonctionnent, car les personnages sont réussis.
Dans les polars, les déboires conjugaux ou d'alcool du flic ou du privé vont presque systématiquement de pair avec l'enquête. Ils pèsent sur celle-ci, pas seulement parce que l'épouse sur le point de divorcer jouera l'équivalent de la princesse à sauver dans la tour ou de la bimbo de l'espace enlevée par un monstre de l'espace, mais parce qu'on écorne un peu l'image trop nette du héros pur et dur, arborant en toutes circonstances l'éternel sourire de Tom Cruise, même quand il est de dos. Il va de soi qu'il vaut mieux s'arranger pour que l'histoire du personnage interfère avec l'histoire principale de façon un peu moins mécanique que ces sauvetages familiaux qui, dans les scénarios hollywoodiens, permettent de conclure sur une image de bonheur conjugal. La faille du héros taciturne commençant à son tour à faire cliché, on lui prête désormais des défauts plus conséquents qu'un penchant pour la boisson : menteur, flagorneur, roublard ou trafiquant, il cesse à présent de s'élever au-dessus du commun des mortels. Les faiblesses du héros n'ont cette fois plus rien pour émouvoir. C'est le prix de la crédibilité.


– Souligner les métaphores, exploiter la symbolique présente dans le récit est indispensable. Si un récit ne doit pas se contenter d'être la métaphore d'une réflexion ou d'une idée, il ne doit pas non plus passer à côté de ce qui pourrait servir à le caractériser ou à appuyer ses intentions. Une histoire a un sens. Des scènes additionnelles peuvent aider à les renforcer. Souvent, d'ailleurs, les intrigues secondaires sont récupérées ou détournées dans ce but, étant entendu que celles qui laissent une impression contraire sont abandonnées. Des compléments d'enquête, une prise de conscience, une conversation éclairante, permettent d'aller plus loin : en entrant dans les détails, et en sélectionnant les plus signifiants, l'intrigue principale ne peut que gagner en relief.
Dom Zly est remarquable dans sa dénonciation de la violence, la corruption et l'alcoolisme en Pologne par la répétition systématique de ces pratiques au niveau des citoyens, des forces de l'ordre, des cadres jusqu'aux hauts fonctionnaires.
Renforcer une métaphore apparente est indispensable pour ne pas laisser le lecteur sur un sentiment d'incomplétude. Car si celui-ci la remarque, il ne comprend pas que le lien ne soit pas accentué, voire qu'il se trouve affaibli par des détails annexes. C'est ainsi que Hitchcock a entre autres modifié le lieu de l'action de Vertigo pour resserrer sa vision du personnage de Boileau et Narcejac. Ceux-ci avaient établi un lien avec le mythe d'Orphée, d'ailleurs nommé cité : l'obsession de Flavières est de ramener à la vie la femme dont il était tombé amoureux en travestissant le sosie qu'il a un jour croisé, pour accentuer la ressemblance avec la défunte. Hitchcock se focalise sur sa chasteté, déjà qualifiée d'impuissance dans le roman, qu'il amplifie en pathologie sexuelle proche de la nécrophilie. Le réalisateur va donc multiplier les symboles phalliques, des substituts utilisés de façon à souligner cette défaillance. Une page de Wikipedia assortie de liens résume très bien pour quelles raisons Hitchcock situe l'intrigue à San Francisco de façon à filmer en arrière plan la Coit Tower, monument phallique censé représenter une lance de pompier, érigé par Lillie Hitchcock Coit en remerciement au corps de pompier pour son intervention durant le tremblement de terre de 1906. C'est dire s'il s'amuse à multiplier les références et les pistes. La même page analyse les mouvements de caméra suggérant le vertige, ainsi que les choix esthétiques d'Alfred Hitchcock : on voit combien chez lui les détails sont soignés et donnent à l'œuvre sa dimension magistrale.
C'est en jouant avec tous ces éléments qu'il est possible de maintenir un suspense constant, et en apparence croissant, jusqu'au climax, qui constituera l'apogée en même temps que le début de la conclusion. Le montage du scénario s'apparente ici à une symphonie classique, où l'envolée des notes ne semblent pas pouvoir monter davantage, mais y parvient toutefois. Un des principes est de plaquer en arrière plan le leitmotiv ou un thème secondaire, qui est amplifié au moment où le premier air atteint son sommet et se substitue à lui, donnant l'impression d'une montée incessante.
Cet effort soutenu devrait conduire à l'apogée, si vous l'envolez bien, et parce qu'il en faut bien une, au climax qui sera le morceau de bravoure de votre récit. Revenons au Boileau du XVIIe, celui qui officiait sans Narcejac, on ne s'en lasse pas :
Que le trouble toujours croissant de scène en scène
À son comble arrivé se débrouille sans peine.
Cet effort soutenu devrait conduire à l'apogée, si vous l'envolez bien, et parce qu'il en faut bien une, au climax qui sera le morceau de bravoure de votre récit. Revenons au Boileau du XVIIe, celui qui officiait sans Narcejac, on ne s'en lasse pas :
Que le trouble toujours croissant de scène en scène
À son comble arrivé se débrouille sans peine.
L'ÉVOLUTION DU CLIMAX
Même si les récits d'action en font un violent concentré d'adrénaline et de testostérone, le climax n'est pas forcément un baroud spectaculaire. L'impact se traduit davantage sur le plan émotionnel que physique. Le choc est avant tout psychologique. Le climax passe par l'émotion et donc par les personnages. On s'en rend compte à la lecture de séries B, où le spectaculaire laisse froid parce que sans affect. Du coup, les conventions du genre sautent aux yeux, à condition de ne pas avoir 13 ans ou de n'avoir pas beaucoup lu ni vu. Ce qu'on qualifie de nos jours de récit pour ados renvoie moins à leur psychologie qu'à leur relative naïveté ou innocence, qui ne les a pas encore lassés des pires clichés des intrigues populaires. C'est une manne en or pour les auteurs qui peuvent sans se fouler réutiliser les sacro-saintes règles des souverains poncifs. Il suffit de moderniser le décor, et le vampire retrouve tout son mordant entre les draps moites de la bit-lit.
Le climax n'est pas non plus un coup de théâtre. Le coup de théâtre ne véhicule pas toujours l'émotion des personnages : il est une stupeur qu'on inflige au lecteur et entre dans une équation entre l'auteur et son lecteur, tout au moins toutes les fois où l'onde de choc n'atteint pas les personnages mais influe seulement sur le cours de l'action. C'est le cas chaque fois que le héros, par un deus ex machina quelconque, s'en sort au dernier moment et n'en semble pas autrement affecté : il a eu de la chance, c'est tout, et c'est dans sa nature de prendre de tels risques. Bref, le coup de théâtre, quand il ne s'ajuste pas correctement, ne fonctionne pas pour le grand final. En tout cas, il ne fonctionne pas uniquement grâce à lui.
Comme le signale Boileau dans son vers, quand le trouble doit se débrouiller sans peine, l'apogée est ce morceau de bravoure où tout se dénoue. On n'assiste pas seulement à la bataille finale au bord de la falaise, mais on y voit le héros rattrapé par son passé et le méchant périr par où il a péché (impossible de ne pas penser ici à une aventure de Tintin, L'Oreille cassée, où les deux voleurs continuent de se disputer la possession de la statuette alors qu'ils se noient), tandis que les opinions émises se vérifient ou se démentent. L'apex est d'autant plus réussi qu'il combine un certain nombre de ces caractéristiques.
Mais pour y convoquer tout ce qui constitue le récit, il faut avoir songé à nouer les fils au préalable, de façon à ce qu'ils se retrouvent tous à cet endroit précis. Les scènes les plus spectaculaires sont à l'image de ces nœuds marins passablement embrouillés duquel il suffit de tirer un fil, un seul, pour retrouver la ficelle d'origine. Impossible de réussir ce tour de passe-passe sans une certaine préparation en amont.
Dans Blade Runner, le héros, qui combat le dernier réplicant évadé, est sur le point de faire une chute mortelle, scène d'autant plus spectaculaire qu'elle se pare d'une symbolique dimension religieuse où la créature affronte son créateur. La thématique sur la notion d'humanité est elle aussi présente lorsque Roy, le réplicant, sauve Rick Deckard : il gaspille les dernières secondes de sa vie programmée, faisant ainsi preuve d'une humanité de plus en plus absente chez son impitoyable poursuivant, ce qui est renforcé par une envolée très rimbaldienne de ce qu'il a vécu aux confins de l'espace, expérience unique qui fait de lui un être à part entière. Il gagne ainsi sa rédemption, ce que symbolise l'envol de la colombe.
Sueurs froides cumule pareillement les dénouements : la scène en haut du clocher donne la solution de l'intrigue tout en confrontant le héros à son passé et à sa névrotique peur du vide. Elle répète celle du début du récit, en y ajoutant les dimensions symboliques qui se sont greffées entre-temps, celle de la sexualité avec ce clocher de forme phallique, et celle, religieuse, puisque la mort de Judy est provoqué par une nonne, qui correspond à un châtiment divin. N'oublions pas que dans le mythe d'Orphée, Eurydice qu'il a pu aller chercher aux enfers lui est retiré par Hadès car il avait rompu le pacte qui le liait à ce dieu, lequel lui interdisait de parler ni même de regarder Eurydice tant qu'ils n'auraient pas quitté les enfers. On voit combien le symbolisme renforce l'intrigue initiale et la met en valeur.
Carrie s'achève sur un final terrifiant où toutes les frustrations et le ressentiment de la jeune fille débouche sur un déchaînement de violence sans précédent. Il a été provoqué par l'ultime vacherie, après une longue suite de moqueries, soigneusement orchestrée elle aussi (la préparation est aussi celle des tourmenteurs). Ce seau de sang versé sur une Carrie toute de blanc vêtue, faisant lors de ce bal ses premiers pas dans le monde, rejoint, sur le plan symbolique la scène d'ouverture où coulait sous la douche le premier sang, celui de son passage vers l'état de femme. Cependant, l'histoire de Carrie a besoin d'une seconde conclusion, à savoir le châtiment de la mère responsable de ses phobies et de son état. Il était impossible de dénouer dans la même scène le double problème de Carrie, à savoir sa mère et ses tourmenteurs.
La fresque du Seigneur des anneaux est si vaste, riche de tant d'intrigues, qu'elle a elle aussi besoin de plusieurs scènes, d'ailleurs enchevêtrées, pour se diriger vers sa conclusion. Il y a d'une part les batailles épiques, où des renforts inattendus se présentent quand tout semble perdu, d'autre part l'équipée de Frodon et Sam pour se débarrasser de l'anneau, où Sam gagne définitivement son statut de héros. Le roman a encore besoin d'en finir avec Saroumane, qui a poursuivi ses méfaits dans la Comté. Le film l'expédie ad patres dans le même grand final, et uniquement dans la version longue. Reste que, comme pour Carrie, on peut considérer comme apogée réel la destruction de l'anneau, épisode centré sur les héros, et qui reprend les thèmes principaux, l'attrait néfaste du pouvoir, la détermination opposée aux moments de faiblesse, bref, tout ce qui a été posé auparavant se retrouve concentré dans cette lutte entre le bien et le mal.
Voilà qui vérifie cet immortel adage forgé pour la circonstance : Si tu veux l'apex, prépare naguère !
Ce que ne saurait qu'approuver un auteur comme Jean-Claude Dunyach. Il a d'ailleurs prouvé que l'apogée d'un récit n'a pas forcément l'intensité dramatique et spectaculaire des exemples qui précèdent, choisis pour leur popularité grâce au cinéma. Sa nouvelle Déchiffrer la trame, tout en finesse et en demi-teintes, ne comporte aucune scène de ce type. Et les lecteurs qui n'ont pas encore goûté cette délicieuse prose feraient bien de sauter le paragraphe qui suit.
L'apex se situe au moment de la révélation de la nature extraterrestre du tisserand partageant la vie de la femme afghane exilée dans la montagne. La déduction faite à partir de la finesse et du nombre de doigts permet de conclure que la femme qu'il a pu approcher était aveugle, déduction qui débouche à son tour sur l'aveu de la cécité de la conservatrice et de son aide : dans la même scène, deux histoires, passée et présente, se révèlent et déclinent des motifs identiques tandis que le lecteur est amené à reconsidérer sa lecture à la lumière de cette révélation, et la prouesse d'écriture qui a permis de dissimuler cette information dans la trame du récit, sans tricher. La lecture des fils avec les doigts, ce déchiffrage, devient encore plus pertinent, s'agissant de personnes privées de la vue et appelle à une réflexion sur les apparences et les préjugés.
C'est probablement ce qui illumine un texte, le fait de ramasser un grand nombre d'informations, d'impressions et d'émotions en une seule scène. Le climax a d'autant plus d'impact qu'il est riche de sens multiples.
Passé cet instant, il faut conclure très vite car les développements ultérieurs n'apportent rien de plus. Les romans fleuve, on l'a vu avec Le Seigneur des anneaux, ont besoin de revenir à un récit d'intensité normale par paliers, comme un plongeur évitant les accidents de décompression.
Quand l'auteur ne parvient pas rassembler tous les fils de ses intrigues au même endroit, ce qui est le cas quand la trame secondaire a soutenu les baisses de régime de la première sans jamais la rejoindre, il est obligé d'ajouter un coda à son climax, lequel perd en intensité dramatique. Il existe des recettes pour compenser cette perte, par exemple en déplaçant les scènes secondaires avant le climax, ou encore en condensant celles-ci dans la conclusion, ce qui est un moyen de finir sur une note élevée.
Dans tous les cas, la cause est entendue. Le final est un rubik's'cube qui nécessite que l'auteur ait à l'esprit les faces cachées : il les a suffisamment retournées pour savoir quelle ultime rotation mettra tous les éléments en place et donnera au cube son unité. Ou le motif qu'il aura choisi de faire apparaître. Cela nécessite de la mémoire, de l'anticipation et une spatialisation des événements afin de tenir compte de tous les fils tirés.
De fait, un auteur n'a jamais fini de tourner son intrigue dans tous les sens. Car il sait qu'avec de l'entraînement, il acquerra cette agilité mentale qui fait tant d'effet.
Claude Ecken
Le climax n'est pas non plus un coup de théâtre. Le coup de théâtre ne véhicule pas toujours l'émotion des personnages : il est une stupeur qu'on inflige au lecteur et entre dans une équation entre l'auteur et son lecteur, tout au moins toutes les fois où l'onde de choc n'atteint pas les personnages mais influe seulement sur le cours de l'action. C'est le cas chaque fois que le héros, par un deus ex machina quelconque, s'en sort au dernier moment et n'en semble pas autrement affecté : il a eu de la chance, c'est tout, et c'est dans sa nature de prendre de tels risques. Bref, le coup de théâtre, quand il ne s'ajuste pas correctement, ne fonctionne pas pour le grand final. En tout cas, il ne fonctionne pas uniquement grâce à lui.

Mais pour y convoquer tout ce qui constitue le récit, il faut avoir songé à nouer les fils au préalable, de façon à ce qu'ils se retrouvent tous à cet endroit précis. Les scènes les plus spectaculaires sont à l'image de ces nœuds marins passablement embrouillés duquel il suffit de tirer un fil, un seul, pour retrouver la ficelle d'origine. Impossible de réussir ce tour de passe-passe sans une certaine préparation en amont.
Dans Blade Runner, le héros, qui combat le dernier réplicant évadé, est sur le point de faire une chute mortelle, scène d'autant plus spectaculaire qu'elle se pare d'une symbolique dimension religieuse où la créature affronte son créateur. La thématique sur la notion d'humanité est elle aussi présente lorsque Roy, le réplicant, sauve Rick Deckard : il gaspille les dernières secondes de sa vie programmée, faisant ainsi preuve d'une humanité de plus en plus absente chez son impitoyable poursuivant, ce qui est renforcé par une envolée très rimbaldienne de ce qu'il a vécu aux confins de l'espace, expérience unique qui fait de lui un être à part entière. Il gagne ainsi sa rédemption, ce que symbolise l'envol de la colombe.
Sueurs froides cumule pareillement les dénouements : la scène en haut du clocher donne la solution de l'intrigue tout en confrontant le héros à son passé et à sa névrotique peur du vide. Elle répète celle du début du récit, en y ajoutant les dimensions symboliques qui se sont greffées entre-temps, celle de la sexualité avec ce clocher de forme phallique, et celle, religieuse, puisque la mort de Judy est provoqué par une nonne, qui correspond à un châtiment divin. N'oublions pas que dans le mythe d'Orphée, Eurydice qu'il a pu aller chercher aux enfers lui est retiré par Hadès car il avait rompu le pacte qui le liait à ce dieu, lequel lui interdisait de parler ni même de regarder Eurydice tant qu'ils n'auraient pas quitté les enfers. On voit combien le symbolisme renforce l'intrigue initiale et la met en valeur.
Carrie s'achève sur un final terrifiant où toutes les frustrations et le ressentiment de la jeune fille débouche sur un déchaînement de violence sans précédent. Il a été provoqué par l'ultime vacherie, après une longue suite de moqueries, soigneusement orchestrée elle aussi (la préparation est aussi celle des tourmenteurs). Ce seau de sang versé sur une Carrie toute de blanc vêtue, faisant lors de ce bal ses premiers pas dans le monde, rejoint, sur le plan symbolique la scène d'ouverture où coulait sous la douche le premier sang, celui de son passage vers l'état de femme. Cependant, l'histoire de Carrie a besoin d'une seconde conclusion, à savoir le châtiment de la mère responsable de ses phobies et de son état. Il était impossible de dénouer dans la même scène le double problème de Carrie, à savoir sa mère et ses tourmenteurs.
La fresque du Seigneur des anneaux est si vaste, riche de tant d'intrigues, qu'elle a elle aussi besoin de plusieurs scènes, d'ailleurs enchevêtrées, pour se diriger vers sa conclusion. Il y a d'une part les batailles épiques, où des renforts inattendus se présentent quand tout semble perdu, d'autre part l'équipée de Frodon et Sam pour se débarrasser de l'anneau, où Sam gagne définitivement son statut de héros. Le roman a encore besoin d'en finir avec Saroumane, qui a poursuivi ses méfaits dans la Comté. Le film l'expédie ad patres dans le même grand final, et uniquement dans la version longue. Reste que, comme pour Carrie, on peut considérer comme apogée réel la destruction de l'anneau, épisode centré sur les héros, et qui reprend les thèmes principaux, l'attrait néfaste du pouvoir, la détermination opposée aux moments de faiblesse, bref, tout ce qui a été posé auparavant se retrouve concentré dans cette lutte entre le bien et le mal.
Voilà qui vérifie cet immortel adage forgé pour la circonstance : Si tu veux l'apex, prépare naguère !

L'apex se situe au moment de la révélation de la nature extraterrestre du tisserand partageant la vie de la femme afghane exilée dans la montagne. La déduction faite à partir de la finesse et du nombre de doigts permet de conclure que la femme qu'il a pu approcher était aveugle, déduction qui débouche à son tour sur l'aveu de la cécité de la conservatrice et de son aide : dans la même scène, deux histoires, passée et présente, se révèlent et déclinent des motifs identiques tandis que le lecteur est amené à reconsidérer sa lecture à la lumière de cette révélation, et la prouesse d'écriture qui a permis de dissimuler cette information dans la trame du récit, sans tricher. La lecture des fils avec les doigts, ce déchiffrage, devient encore plus pertinent, s'agissant de personnes privées de la vue et appelle à une réflexion sur les apparences et les préjugés.
C'est probablement ce qui illumine un texte, le fait de ramasser un grand nombre d'informations, d'impressions et d'émotions en une seule scène. Le climax a d'autant plus d'impact qu'il est riche de sens multiples.
Passé cet instant, il faut conclure très vite car les développements ultérieurs n'apportent rien de plus. Les romans fleuve, on l'a vu avec Le Seigneur des anneaux, ont besoin de revenir à un récit d'intensité normale par paliers, comme un plongeur évitant les accidents de décompression.
Quand l'auteur ne parvient pas rassembler tous les fils de ses intrigues au même endroit, ce qui est le cas quand la trame secondaire a soutenu les baisses de régime de la première sans jamais la rejoindre, il est obligé d'ajouter un coda à son climax, lequel perd en intensité dramatique. Il existe des recettes pour compenser cette perte, par exemple en déplaçant les scènes secondaires avant le climax, ou encore en condensant celles-ci dans la conclusion, ce qui est un moyen de finir sur une note élevée.
Dans tous les cas, la cause est entendue. Le final est un rubik's'cube qui nécessite que l'auteur ait à l'esprit les faces cachées : il les a suffisamment retournées pour savoir quelle ultime rotation mettra tous les éléments en place et donnera au cube son unité. Ou le motif qu'il aura choisi de faire apparaître. Cela nécessite de la mémoire, de l'anticipation et une spatialisation des événements afin de tenir compte de tous les fils tirés.
De fait, un auteur n'a jamais fini de tourner son intrigue dans tous les sens. Car il sait qu'avec de l'entraînement, il acquerra cette agilité mentale qui fait tant d'effet.
Claude Ecken