
Michel Pagel ! Quand Philippe Ward m'a demandé un recueil pour Rivière Blanche, j'ai saisi sur l'occasion de rassembler toutes les nouvelles parues ici et là au fil des années et pas encore réunies. Comme je ne suis pas un grand créateur d'univers, j'ai tendance à réutiliser ceux que je me fatigue à créer, donc la plupart de mes nouvelles s'inscrivent dans des cycles comme "La Comédie Inhumaine", "Orages en Terre de France" ou "Le Cycle de la Fusion". J'ai privilégié pour ce recueil les titres indépendants mais j'ai tout de même dû inclure deux ou trois nouvelles appartenant aux cycles précités, pour faire le poids et parce qu'elles revêtent pour moi une signification particulière. J'ai juste ignoré le cycle de la Fusion parce qu'un autre éditeur compte lui consacrer un recueil spécial un jour ou l'autre.
Actusf : Il y a aussi bien de l'uchronie que de la science fiction ou du fantastique dans votre recueil. Est-ce que cela veut dire que tous les genres vous intéressent et que vous vous retrouvez dans l'étiquette "Imaginaire" ?
Michel Pagel : Grosso modo oui. Je fonctionne beaucoup par "périodes". Pendant un moment, je ne vais lire que de la SF, ou que du Fantastique ou que de la Fantasy, mais tout m'intéresse, oui. Et c'est un peu pareil en ce qui concerne l'écriture. Parfois, j'ai envie d'écrire de la SF, parfois autre chose. Cela dit, mon esprit très rationnel fait que, même quand je parle de sorcières ou de démons, je gomme souvent l'aspect surnaturel. A cet égard, on peut dire que l'essentiel de mon oeuvre relève de la science-fiction.
Actusf : Êtes-vous parfois tenté par d'autres genres comme le thriller ou le polar ?
Michel Pagel : Tenté, oui. Il m'arrive même d'essayer d'en écrire. Mais il ne me faut en général pas dix pages pour qu'un élément d'imaginaire vienne se mêler à la sauce et que ça se transforme au minimum en fantastique. Je ne sais pas à quoi ça tient. J'ai réussi à écrire quelques textes très courts sans imaginaire ("Adieu, Prince Charmant" ou "L'Index Brisé" dans le recueil, par exemple) mais dès que j'entreprends une oeuvre plus longue, mes vieux démons (c'est le cas de le dire) me reprennent. Il est donc probable que je ne publierai jamais un pur polar ou un pur roman de littérature générale. Ce n'est pas grave, c'est juste comme ça.

Michel Pagel : "La Comédie inhumaine", en fait, c'est un titre pratique pour regrouper tous mes textes fantastiques, y compris plusieurs qui n'ont aucun
rapport entre eux. Cela dit, il y a bien une trame principale, qui part de Nuées Ardentes pour aboutir à l'Oeuvre du Diable, et cette trame-là est a priori terminée. Mais je dis bien "a priori". Il est tout à fait possible qu'un jour ou l'autre, l'envie de retrouver certains personnages me taraude et que j'écrive un nouveau roman les mettant en scène. L'avenir le dira.
Actusf : Vous semblez avoir un gout prononcé pour l'Histoire. Pour quelles raisons ?
Michel Pagel : Parce que j'ai en fait un goût prononcé pour les histoires, et que l'Histoire en est pleine. Je n'ai pas vocation d'historien, et je dirai même que certaines périodes m'ennuient profondément - dès qu'il y a des armes à feu, mon intérêt décline et plus on se rapproche de nous, plus il décline. Je n'étudie pas l'histoire dans le but de comprendre notre époque, mais j'y puise des personnages hauts en couleur et des intrigues échevelées: je suis un auteur populaire. Tout cela, à mon avis, vient des romans et des films historiques qui m'ont beaucoup marqué quand j'étais gamin. Cela dit, quand je choisis une période pour un situer un bouquin, je fais l'effort de l'étudier à fond et de la rendre aussi fidèlement que possible, je ne me contente pas d'un décor fait de clichés hollywoodiens.
Actusf : Il y a plusieurs inédits dans ce recueil. D'où viennent-ils ? Ont-ils été écrit récemment ?
Michel Pagel : En fait, il n'y en a qu'un : "Les Hérauts d'Hier". Et il a été écrit
spécialement pour le recueil. C'était une idée qui me trottait dans la tête depuis un moment, donc j'ai profité de la proposition de Philippe Ward pour la concrétiser.
Actusf : Vous avez publié d'autres nouvelles qui ne sont pas dans ce livre. Un second recueil de nouvelles est-il envisageable ?
Michel Pagel : Les seules nouvelles "indépendantes" que je n'ai pas choisies pour ce recueil sont celles que j'ai trouvées trop mauvaises pour être republiées. Pour le reste, il y aura peut-être d'autres recueils de mes différents cycles mais je n'ai rien en prévision du même type que La Vie à ses Rêves.
Actusf : Votre relative absence ces dernières années signifie-t-elle que vos activités de traducteur prennent une part de plus en plus importante de votre temps ?
Michel Pagel : Oui. Pour des raisons essentiellement financières. Il y a moins
d'éditeurs qu'à une certaine époque pour me proposer des sommes conséquentes pour écrire des romans, donc je compense avec des traductions.
Actusf : Êtes-vous attiré par le numérique et les possibilités d'expérimentations littéraires que ce type d'édition pourrait permettre, et que l'on pourrait envisager comme un équivalent des effets spéciaux au cinéma ?
Michel Pagel : A dire vrai, non, pas du tout. Mais c'est un domaine que je connais mal. Si je m'y intéresse un jour, j'y découvrirai peut-être des possibilités à exploiter mais ça ne m'attire pas a priori.
Actusf : Quels sont vos projets ?
Michel Pagel : Un roman paraître cette année chez Rivière Blanche, une uchronie
intitulée "Le Dernier des Francs". Je suis par ailleurs en train de travailler sur un autre roman mais le projet n'est pas assez avancé pour que j'en parle.