Du sense of wonder à la SF métaphysique

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Shalmaneser
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Message par Shalmaneser » mer. janv. 13, 2010 10:36 pm

Lensman a écrit : Je parle pour la SF. C'est vrai qu'elle est écrite avec des mots et imprimées sur du papier (pour l'instant...). La notion de progrès technique en matière d'écriture de texte est certes fort discutable et discutée, mais entre une antho de SF des années Gernsback et une antho du Livre de Poche (Grande anthologie), on ne forcera pas trop le trait en parlant, disons, d'amélioration (je veux bien mettre ça à la place de "progrès", pour ma part!)
Voilà qui me semble relever du jugement de goût ; or, le progrès est objectif, ou n'est pas.
Lensman a écrit :Mais sur la notion de progrès en matière culturelle, je pense que nous ne sommes pas tellement en désaccord. Ce que je pense, c'est qu'on ne peut faire tellement de comparaison. Les Beatle, c'est mieux Beethoven? La question n'a pas tellement de sens... c'est comme comparer Heinlein et Proust.
Nous sommes d'accord sur ce point.
Lensman a écrit :Par contre, Heinlein et Smith, il y a vraiment des choses à dire. Comme entre Haydn et Beethoven, sur leur manière de composer (et pour l'un de faire des choses que l'autre ne pouvait pas faire). Mais il faut tenir un discours expert, et dans un domaine relativement circonscrit. Ce discours peut passer au-dessus de la tête de pas mal de gens, et en polariser d'autres...
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Mouais. Sur un plan purement technique et formel, ça se tient ; et encore, seulement du point de vue du critique ou de l'historien de la littérature qui étudierait l'évolution formelle du genre. Je ne sais pas, pour autant, si l'on peut réellement parler ici de "progrès".
Modifié en dernier par Shalmaneser le mer. janv. 13, 2010 10:53 pm, modifié 1 fois.

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Erion
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Message par Erion » mer. janv. 13, 2010 10:37 pm

Shalmaneser a écrit : Bon, d'abord Georges : je ne suis pas d'accord ; je ne vois pas ce qui te permet de dire que la SF fonctionne en intégrant progressivement les acquis des livres précédents, "par accumulation de références et de règles." C'est peut-être le cas du jeu vidéo, mais absolument pas de la SF. A l'intérieur d'une même oeuvre, à la rigueur, ça peut se concevoir ; mais je ne pense pas que les auteurs de SF conçoivent leurs bouquins en vertu d'un principe d'"accumulation" ou même de "progrès".
On parle pas des robots comme Asimov, ni de l'espace comme Jules Verne. Parce qu'entre temps, des oeuvres ont été écrites, les technologies ont évolué. Et les auteurs en tiennent compte.

Ils en tiennent tellement compte que sans cet élément, le steampunk n'existerait pas.
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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mer. janv. 13, 2010 10:43 pm

Shalmaneser a écrit :mais je ne pense pas que les auteurs de SF conçoivent leurs bouquins en vertu d'un principe d'"accumulation" ou même de "progrès".
Grave erreur.

La science-fiction est une littérature collective.
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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mer. janv. 13, 2010 10:44 pm

Lensman a écrit :Enfin, Homère et Dan Simons, c'est pas évident à cause de la langue, déjà...
Et puis Dan Simmons, ça serait plutôt une régression par rapport à Homère.
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Shalmaneser
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Message par Shalmaneser » mer. janv. 13, 2010 10:48 pm

Roland C. Wagner a écrit :
Shalmaneser a écrit :Et donc, tu serais prêt à affirmer, par exemple, que les récits de Heinlein sont plus perfectionnés que ceux, mettons, de Proust ? Et je ne parle pas d'Homère...
Ben ouais.
Pour une fois, une réponse aussi lapidaire que la tienne : ben non. C'est pratique, y'a pas besoin d'argumenter.
Roland C. Wagner a écrit :
Shalmaneser a écrit :Encore une fois, l'idée de progrès appliquée à la littérature impliquerait l'idée d'une perfection visée, au terme de son histoire, ce qui n'est absolument pas le cas.
Mais pourquoi donc ?.
Je pense que nous serons tous d'accord pour dire que le but ultime de la science-fiction n'est pas de produire, à la fin de son histoire, le récit le plus perfectionné possible - peut-être même pour dire que l'histoire de la SF n'a pas de finalité globale de cet ordre. Si ce n'est pas le cas, je commencerai vraiment à me dire que nous ne vivons pas dans le même monde.
Roland C. Wagner a écrit :
Shalmaneser a écrit :Par ailleurs, "sur le plan du traitement de l'information" est une expression séduisante, parce qu'elle semble impliquer un critère objectif ; mais je ne pense pas qu'elle résiste à un examen plus précis.
Tu penses donc que la science-fiction traite l'information de la même manière que Balzac, Proust ou Rinaldi ?
Certainement pas "de la même manière" ; mais ce n'est pas pour autant de manière plus perfectionnée. A moins que tu aies décidé de prendre Balzac et Proust pour des arriérés : je ne crois pas si je m'y risquerais.
Roland C. Wagner a écrit :
Shalmaneser a écrit :As-tu un exemple d'"innovation sur le plan du traitement de l'information" impliquant un réel et indéniable progrès dans le texte ?
Bien sûr, et ce type d'exemple est fort bien résumé par ce paragraphe :
Sylvie Denis a écrit :Dans un roman de science-fiction « traditionnel », les premières pages, voire les premières lignes, servent à donner, le plus rapidement possible, un certain nombre d'indices au lecteur qui doit les utiliser pour inférer la nature et les règles du monde dans lequel il est en train d'entrer. Le rôle du début du roman est donc de placer le lecteur dans un cadre narratif. Il lui donne des indications sur les structures de l'univers fictionnel dans lequel il s'apprête à entrer.
Où veux-tu en venir ? Même si les auteurs plus récents privilégient le début "in medias res", je ne suis pas certain, d'abord, qu'on ne puisse pas dégoter un récit plus ancien fonctionnant de la même manière ; mais surtout, même s'il s'agit d'une réelle innovation, je ne vois pas bien en quoi on pourrait l'assimiler à un progrès : ce n'est pas mieux, ni même plus perfectionné, juste différent.

Shalmaneser
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Message par Shalmaneser » mer. janv. 13, 2010 10:52 pm

Roland C. Wagner a écrit : La science-fiction est une littérature collective.
Il n'y a qu'à lire ce thread pour s'apercevoir que c'est faux.

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Lensman
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Message par Lensman » mer. janv. 13, 2010 10:52 pm

Shalmaneser a écrit :
Mouais. Sur un plan purement technique et formel, ça se tient ; et encore, seulement du point de vue du critique ou de l'historien de la littérature qui étudierait l'évolution formelle du genre. Je ne sais pas, pour autant, si l'on peut réellement parler ici de "progrès".
Le problème est aussi dans la définition même de culture... et du concept de progrès.
Pour certaines personnes (une minorité, peut-être, mais c'est une idéologie qui n'est pas rare), la médecine, telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui sous nos climat, n'a pas "progressé". Pour eux, elle est brutale, dangereuse, etc. Il faut plutôt soigner les gens avec les plantes, des bains de pieds, etc. Certes, je caricature, mais il n'est pas si évident de parler de "progrès" dans un domaine donné sauf accord préalable, et cet accord ne peut s'appuyer que sur des gens qui se sont mis d'accord sur des critères (par exemple, les scientifiques, dans leurs différentes disciplines, arrivent à peu près à un accord, mais qui est soumis à une vérification permanente, et les changements de paradigmes peuvent être des crises).
Ce qui fait que, pour la chose culturelle, c'est encore plus compliqué. La simple évaluation d'un texte est liée à tellement de facteurs, qu'elle n'a généralement de sens que dans un système déterminé (exemple de système: les amateurs de SF de ce forum). Nous ne représentons que nous même et nos pairs, des gens assez dissemblables sur des tas de points hors SF, et qui divergeront aussi, même au sein du corpus de la SF. Mais qui ont suffisamment de culture commune dans ce domaine pour pouvoir se comprendre, même s'il y a désaccord.
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Message par bormandg » mer. janv. 13, 2010 10:55 pm

Shalmaneser a écrit :
Je pense que nous serons tous d'accord pour dire que le but ultime de la science-fiction n'est pas de produire, à la fin de son histoire, le récit le plus perfectionné possible - peut-être même pour dire que l'histoire de la SF n'a pas de finalité globale de cet ordre.
Simplement de produire des récits nouveaux et, si possibles, meilleurs que le précédents. Sans jamais prétendre atteindre l'ultime.
Est-ce que le progrès scientifique viserait à une machine ultime?
Est-ce que progrès signifie recherche de l'ultime?
Ce serait nouveau.
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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Message par bormandg » mer. janv. 13, 2010 10:58 pm

Shalmaneser a écrit :
Roland C. Wagner a écrit : Tu penses donc que la science-fiction traite l'information de la même manière que Balzac, Proust ou Rinaldi ?
Certainement pas "de la même manière" ; mais ce n'est pas pour autant de manière plus perfectionnée. A moins que tu aies décidé de prendre Balzac et Proust pour des arriérés : je ne crois pas si je m'y risquerais.
Ai-je jamais prétendu que la SF serait un progrès sur Proust? j'ai écrit que la SF a une notion interne de progrès, qu'il y a recherche d'un progrès par rapport aux livres existants (sauf quand on ouvre une thématique nouvelle, bien sûr).
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Message par Lensman » mer. janv. 13, 2010 10:59 pm

Shalmaneser a écrit :
Roland C. Wagner a écrit : La science-fiction est une littérature collective.
Il n'y a qu'à lire ce thread pour s'apercevoir que c'est faux.
C'est pourtant l'inverse qui est flagrant! la collectivité montre là sa vitalité! (c'est déstabilsant pour moi que tu dises ça! moi qui lis des revues et des fils sur la musique classique, si tu voyais les empoignades!!! ("tel truc n'est pas de la musique", "c'est honteux d'avoir fait, ci, ou ça...", "Beethoven est tout, sauf métaphysique", "Beethoven est la métaphysique incarnée", "je ne comprends pas la question sur Beethoven", etc, etc pourtant, ils forment bien une communauté, à leur niveau, je peux te le garantir!)

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Message par bormandg » mer. janv. 13, 2010 10:59 pm

Roland C. Wagner a écrit :
Lensman a écrit :Enfin, Homère et Dan Simons, c'est pas évident à cause de la langue, déjà...
Et puis Dan Simmons, ça serait plutôt une régression par rapport à Homère.
Je ne vois pas en quoi. Mais alors pas du tout.
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Message par Lensman » mer. janv. 13, 2010 11:01 pm

bormandg a écrit :
Shalmaneser a écrit :
Je pense que nous serons tous d'accord pour dire que le but ultime de la science-fiction n'est pas de produire, à la fin de son histoire, le récit le plus perfectionné possible - peut-être même pour dire que l'histoire de la SF n'a pas de finalité globale de cet ordre.
Simplement de produire des récits nouveaux et, si possibles, meilleurs que le précédents. Sans jamais prétendre atteindre l'ultime.
Est-ce que le progrès scientifique viserait à une machine ultime?
Est-ce que progrès signifie recherche de l'ultime?
Ce serait nouveau.
Ou métaphysique, peut-être? (j'ai compris qu'on peut sortir le terme à toute occasion, ça ne dépare jamais!)
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Message par Shalmaneser » mer. janv. 13, 2010 11:02 pm

bormandg a écrit : Simplement de produire des récits nouveaux et, si possibles, meilleurs que le précédents. Sans jamais prétendre atteindre l'ultime.
Est-ce que le progrès scientifique viserait à une machine ultime?
Est-ce que progrès signifie recherche de l'ultime?
Ce serait nouveau.
Pas de l'ultime : de l'Absolu, oui. Pour Hegel, c'est le sens du progrès dans l'Histoire.
Et oui, le progrès scientifique vise la compréhension absolue du réel, et l'absolu de la technique. Bien sûr.
Donc, il s'agirait pour l'écrivain de SF de produire un récit "meilleur que les précédents" ? Là, je pense qu'il faudrait interroger chaque auteur ; je pense que tu serais assez surpris de leurs réponses, dans l'ensemble. A mon avis, il n'y en aurait pas deux pareilles.

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Message par bormandg » mer. janv. 13, 2010 11:03 pm

Shalmaneser a écrit :
Roland C. Wagner a écrit : La science-fiction est une littérature collective.
Il n'y a qu'à lire ce thread pour s'apercevoir que c'est faux.
Collectif ne veut pas dire dirigiste, voix de son maître et Cie. Je ne vois rien dans ce thread qui contredise le fait que les auteurs de SF se répondent entre eux. pas toujours par des acquiescements, mais je rappel que collectif ne veut pas dire unissonique.
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Message par bormandg » mer. janv. 13, 2010 11:05 pm

Lensman a écrit : Ou métaphysique, peut-être? (j'ai compris qu'on peut sortir le terme à toute occasion, ça ne dépare jamais!)
Oncle Joe
Tu le ranges, Lem n'est pas là.
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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