Que je n'arrive pas à quoi ? "En tant que lecteur", à neutraliser les mauvaises perceptions, justifier l'élasticité, nuancer la réputation US ? Je ne sais pas quel sens donner à ta question.MF a écrit :Est-ce que ça veut dire que tu n'y arrives pas en tant que lecteur ?Lem a écrit :Tant que je me perçois comme un écrivain de SF, un critique ou un historien de la SF, je me sens en demeure de neutraliser les mauvaises perceptions de l'étiquette et du genre, de justifier son élasticité, de nuancer sa perception "american only", etc.
(Dans le cadre ancien, avant la speculative fiction) : la même chose que quand je lis La bibliothèque de Babel. Quand je découvre que le texte prend mon appétit de "merveille" au sérieux – qu'il ne se défile pas – ; quand je vois que la bibliothèque est vraiment infinie et que c'est ça qui intéresse l'auteur, que c'est ça qu'il explore (et non prend pour prétexte d'une satire ou d'une allégorie) ; il y a un instant de transition où j'ai l'impression d'assister à quelque chose de primordial ; l'impression de voir des idées, des concepts "tomber" dans la matière ; et où j'éprouve une sorte de sidération. Comme si le texte tenait une promesse que le monde ordinaire passe son temps à décevoir… (Je n'interprète pas ce qui se passe, hein ; je me contente de décrire ce que j'éprouve.)Parce que c'est bien cela que je te demandais : ton analyse de ta perception de lecteur.
Ce qui fais que tu considéres que L'Enfer quand Dieu n'est pas présent ou En remorquant Jéhovah sont de la SF
Si maintenant j'analyse ce que j'éprouve quand je lis… je ne sais pas… Rendez-vous avec Rama, pour prendre de la SF pure et dure, j'ai la même impression au moment critique où l'éclairage intérieur de l'objet s'allume et où le narrateur découvre qu'il est suspendu à une échelle de deux kilomètres de long. Et encore quand Rama se dégèle, que l'océan cylindrique craque, que la vague se forme, etc. Je suis conscient, bien sûr, du caractère particulier que confère aux images leur plausibilité scientifique mais sous ce caractère, je crois profondement que l'impression est la même. Voilà pourquoi j'ai cherché le point commun.