Du sense of wonder à la SF métaphysique

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MF
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Message par MF » mer. janv. 27, 2010 12:29 pm

Erion a écrit :Et il vaut mieux une étude imparfaite, que des études doigt mouillé qui datent d'Hérode (parce que même 10 ans en arrière, ca ne tient pas compte des évolutions énormes depuis 3-4 ans).
L'étude a surtout du sens, vu du présent débat, par les modes de questionnement.

On en conclu, assez facilement, que pour le ministère de la culture, le mainstream c'est :
- JK Rowling (Harry Potter)
- Dan Brown (Da Vinci code)
- Marc Levy
- Michel Houellebecq
- Danielle Steel
- Amélie Nothomb
- Mary Higgins Clark
- Bernard Werber
- Fred Vargas
- Jean d'Ormesson
- Stephen King
- Zep (Titeuf)
- Goscinny (Astérix)
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » mer. janv. 27, 2010 12:57 pm

Gérard Klein a écrit :Ça dit non. C’est du réel. Le feu en fait partie. Ça peut faire très mal, mais ça s’utilise aussi.
Tu emploies parfois les mêmes mots ("Ça dit non") pour qualifier le réel tel qu'on le postule derrière les déconcertants phénomènes de la mq si on n'est pas un instrumentaliste strict. Est-ce pour désigner la même chose ? (Si oui, quelle chance ; tu as trouvé ton principe pan-organisateur.)
Alors, cet humain, histoire de réduire l’inhumain à de l’altérité (je reviendrai sur ce terme qui n’est pas synonyme du précédent) inventa quelque chose d’extraordinaire: d’étendre sa théorie de l’esprit à de l’inhumain et de prêter de l’intention ou de l’intentionnalité (…) à cet inhumain teigneux. Dans un premier temps (enfin, c’est à voir), cela s’appelle l’animisme.
Ce paragraphe est-il métaphorique ? Le processus d'animisation (d'animation ?) tel que décrit ici semble le jaillissement ou la projection soudaine de l'intentionnalité humaine à tout ce qui est perçu. C'est parlant ; ça ressemble au Big Bang. Mais, pour ce que nous en savons, cet état psychique pourrait aussi bien être la dernière trace des origines animales de la pensée (de la pensée animale originelle), l'arrière-plan dont l'humain se détache par retraits successifs.
Puis dans un second temps, l’animisme fit place à la création des dieux (…) Et enfin au dieu monothéiste. (…) Donc, du rapport problématique entre l’humain et l’inhumain, il y a, depuis longtemps. Bien supporté, c’est une autre affaire. Vaudrait mieux s’en débarrasser. Ce que fait Protagoras, cité par Platon, dans le Protagoras: « L'homme est la mesure de toute chose : de celles qui sont, du fait qu’elles sont ; de celles qui ne sont pas, du fait qu’elles ne sont pas.» Dans la deuxième partie de la proposition (qui dans son ensemble a fait l’objet d’innombrables interprétations dont je vous fais grâce), le germe du déni pointe son nez. L’humain décidera souverainement du sort de l’inhumain. À commencer qu’il n’existe pas.
Donc, si je comprends bien le processus que tu décris :
– il y a de l'inhumain (du réel) avec quoi on ne négocie pas.
– on lui prête de l'intentionnalité parce que ça permet au moins de faire semblant de négocier (rituels). Ça donne l'animisme, les dieux et finalement Dieu.
– mais on préfèrerait s'en débarrasser ("I won"t take no for an answer") et la logique terminale du processus, c'est précisément ça : dire que l'inhumain n'existe pas.
(Note : ce qui revient à réduire le sens du mot exister. On dit encore quotidiennement de tel ou tel humain qu'il est "un démon", "un dieu", "Dieu", "un ange", "un pur esprit", "un fantôme", "un monstre", "un dinosaure", "un mutant", "un extraterrestre"… Ces choses sont toujours. Mais dans un régime linguistique particulier : elles sont-comme. Elles sont des métaphores. Nous vivons toujours au milieu de l'inhumain métaphorique.)

Question : inscris-tu pleinement, comme il semble, la philosophie et sa fille, la pensée scientifique, dans ce processus de liquidation de l'inhumain ? Quand Laplace dit au début du XIXème siècle à propos de Dieu "je n'ai pas besoin de cette hypothèse", exprime-t-il cela : l'espoir d'un monde entièrement humain, c'est à dire connaissable et négociable ? Et si c'est bien le cas, comment fondes-tu la distinction, implicite à la fois dans ta prose et dans le cadre de ce fil, entre l'inhumain et le métaphysique ? (hormis le désir évident de t'appuyer sur un mot-image qui rende compte du caractère archaïque, voire immémorial de ce que tu essaies de décrire ?
Bref, l’humain n’aime pas trop l’inhumain et qu’on le lui rappelle. Or c’est ce que fait la science et son improbable sous-produit, la science-fiction. Depuis fort longtemps, la quasi-totalité des humains vivent et pensent dans ce que j’appelle l’humanière. (…) La quasi-totalité de l’humanité n'en sort jamais et ce qu’elle appelle littérature ne traite que de l’humanière. Ce qui en déborde ne mérite ni attention ni intérêt ni respect.
Mais ça n'a pas toujours été le cas. Si j'utilise le cadre que tu mets en place, le christianisme représente une phase décisive de l'humanisation : le moment où l'inhumain radical (le Dieu des Juifs, dont rabbins et kabbalistes aimeraient sans doute beaucoup ta description : "il est ce qui dit non") se donne un intercesseur humain, un visage avec lequel on peut négocier. Même au plus fort de la civlisation chrétienne, le rappel est constant qu'au-delà du Dieu Fait Homme, il y a de "l'impénétrable" (du non-négociable) et qu'en dernier ressort, c'est lui qui s'impose puisqu'il faut faire confiance et mourir sans savoir.
A contrario, la science ne traite effectivement l'inhumain que pour le réduire et avec l'ambition de le réduire totalement. Cette ambition semble sur le point de triompher au XIXème siècle et ce n'est qu'au suivant que l'inhumain réapparaît comme – au minimum et pour rester prudent – limite épistémologique. La deuxième phrase du paragraphe cité juste au-dessus, où tu inscris "la science et la science-fiction" dans le même rapport à l'inhumain me semble une simplification excessive. La science veut réduire l'inhumain ; la science-fiction le cultive comme spectacle et culmine lorsqu'elle constate son caractère irréductible, comme dans les exemples que tu cites après (Solaris et L'invicible). En ce sens, la science-fiction me paraît au moins autant la compensation de la puissance scientifique que sa démultiplication fantasmée.
Sur la sortie de l’humanière, je citerai un auteur avec lequel je me sens rarement en confidence, Damasio, sauf ici dans un entretien sur le Cafard Cosmique, lorsqu’il dit: ”L’humanité s’est construite et élevée dans et par le combat contre le hors-humain, par les rapports tissés avec ce hors-humain aussi - et c’est ce combat qui aujourd’hui s’efface. Dans un monde anthropisé, l’énergie n’a plus de point d’application. Elle se retourne contre elle-même. Il n’y a plus de chaos extérieur où puiser ses forces et duquel apprendre. Le dehors, les dehors, sont devenus une zone. Notre jeunesse se construit dans Second Life, dans des univers virtuels ultrariches mais autogénérés et infiniment trop humains. Il n’y a plus de dehors. Les fenêtres ouvrent toujours sur d’autres salles et d’autres fenêtres.”
La science-fiction moderne est née au tournant du XIXème siècle, à une époque où la science se déclare sur le point d'ouvrir "la dernière fenêtre sur la dernière salle" pour reprendre la métaphore d'Alain. Elle est née à l'époque où Nietszche discerne dans chaque chose qu'il contemple de "l'humain, trop humain". Anticipe-t-elle ce triomphe définitif ou travaille-t-elle déjà à réinscrire l'inhumain dans la réalité ? Et si le deuxième cas est le bon, comme je le crois, pourquoi le fait-elle ? Pourquoi l'inhumain nous est-il encore nécessaire, au moins comme spectacle fictionnel ? Pourquoi ne parvenons-nous pas à nous contenter du monde enregistré par la littérature blanche (il n'y a que de l'humain, l'altérité n'est que la figure générale de "l'autre humain" – je simplifie). S'agit-il d'une structure archaïque de la pensée que nous ne parvenons pas à liquider ? Ou bien est-il licite de faire l'hypothèse que l'inhumain est la condition de la pensée, qu'il y participe en tant qu'élément de structure (les nœuds borroméens ; "I am a strange loop" ; pour ne prendre que des formules récentes). Si la pensée peut espérer, non comprendre le réel mais lui être homothétique, doit-elle réinscrire l'inhumain en elle-même puisqu'il est "réapparu" dans le monde scientifique ? Tu te rends évidemment compte que ces questions ont des répercussions énormes sur le plan anthropologique ?
Modifié en dernier par Lem le mer. janv. 27, 2010 4:42 pm, modifié 5 fois.

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » mer. janv. 27, 2010 1:10 pm

La première fois où j'ai choisi moi-même un livre de science-fiction en l'identifiant comme tel — ou plutôt en identifiant la collection susceptible de m'apporter ce que je recherchais — c'est son quatrième de couverture qui a décidé de ce choix. Le texte commençait par cette phrase, majuscules comprises :

Partir en mission pour explorer le cosmos lointain n'est qu'une affaire de routine, mais découvrir, au cours d'un tel voyage, que l'on n'est pas ce que l'on croyait être, QUE L'ON N'EST PAS HUMAIN, est une aventure qui risque de vous conduire aux confins de la folie.

Fans are Slans ?


EDIT : aurtograffes
Modifié en dernier par Roland C. Wagner le mer. janv. 27, 2010 1:23 pm, modifié 1 fois.
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Message par MF » mer. janv. 27, 2010 1:18 pm

Vous faites ch.. J'avais dit que j'arrêtais...
Lem a écrit :
Bref, l’humain n’aime pas trop l’inhumain et qu’on le lui rappelle. Or c’est ce que fait la science et son improbable sous-produit, la science-fiction. Depuis fort longtemps, la quasi-totalité des humains vivent et pensent dans ce que j’appelle l’humanière. (…) La quasi-totalité de l’humanité n'en sort jamais et ce qu’elle appelle littérature ne traite que de l’humanière. Ce qui en déborde ne mérite ni attention ni intérêt ni respect.
Mais ça n'a pas toujours été le cas. Si j'utilise le cadre que tu mets en place, le christianisme représente une phase décisive de l'humanisation : le moment où l'inhumain radical (le Dieu des Juifs, dont rabbins et kabbalistes aimeraient sans doute beaucoup ta description : "il est ce qui dit non") se donne un intercesseur humain, un visage avec lequel on peut négocier. Même au plus fort de la civlisation chrétienne, le rappel est constant qu'au-delà du Dieu Fait Homme, il y a de "l'impénétrable" (du non-négociable) et qu'en dernier ressort, c'est lui qui s'impose.
A contrario, la science ne traite effectivement l'inhumain que pour le réduire et avec l'ambition de le réduire totalement. Cette ambition semble sur le point de triompher au XIXème siècle et ce n'est qu'au suivant que l'inhumain réapparaît comme – au minimum et pour rester prudent – limite épistémologique. La deuxième phrase du paragraphe cité juste au-dessus, où tu inscris "la science et la science-fiction" dans le même rapport à l'inhumain me semble une simplification excessive. La science veut réduire l'inhumain ; la science-fiction le cultive comme spectacle et culmine lorsqu'elle constate son caractère irréductible, comme dans les exemples que tu cites après (Solaris et L'invicible). En ce sens, la science-fiction me paraît au moins autant la compensation de la puissance scientifique que sa démultiplication fantasmée.
Je crois que ce que Gérard nomme "négociation", je le nomme "mesure" (et que c'est le même "acte").
Et que la science a compris qu'elle ne pouvait pas "réduire l'inhumain".
C'est cela la notion d'"incertitude".

Si, pour cet inhumain, la science déterministe a eu pour "ambition de le réduire totalement", je crois que ce n'est plus le cas depuis... 30 ans, 50 ans, 80 ans ou 100 ans (les visions diffèrent).

Je suis aussi d'accord sur le fait que la SF dite "du bord d'attaque" ou "de la pointe" cultive comme spectacle les aspects irréductibles (Egan, Benford, Pratchett, Gibson...).

Mais il y a aussi toute une SF (Gérard a cité comme exemple Damasio) qui, me semble-t-il, est sur un autre registre ? Ce n'est plus l'incertain, c'est l'autre/outre (Tigres Pourpres) ? Est-on encore dans le domaine de la négociation ?
Modifié en dernier par MF le mer. janv. 27, 2010 3:46 pm, modifié 1 fois.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » mer. janv. 27, 2010 2:00 pm

MF a écrit :Je crois que ce que Gérard nomme "négociation", je le nomme "mesure" (et que c'est le même "acte")
Le métaphysique (inaccessible à la vérification). L'inhumain (inaccessible à la négociation). L'incommensurable (inaccessible à la mesure).
Trois candidats au même poste.

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Lensman
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Message par Lensman » mer. janv. 27, 2010 2:26 pm

Lem a écrit :
MF a écrit :Je crois que ce que Gérard nomme "négociation", je le nomme "mesure" (et que c'est le même "acte")
Le métaphysique (inaccessible à la vérification). L'inhumain (inaccessible à la négociation). L'incommensurable (inaccessible à la mesure).
Trois candidats au même poste.
Attention au terme "incommensurable", qui n'est pas employé dans le même sens selon les corps de métier…
Oncle Joe

Giangi
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Message par Giangi » mer. janv. 27, 2010 2:27 pm

Lem a écrit : Le métaphysique (inaccessible à la vérification). L'inhumain (inaccessible à la négociation). L'incommensurable (inaccessible à la mesure).
Trois candidats au même poste.
Tout ça fait quand même furieusement penser à la... fantasy.
Giangi

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Sylvaner
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Message par Sylvaner » mer. janv. 27, 2010 2:29 pm

Bull a écrit :
Sylvaner a écrit :je ne peux pas m'empêcher de rebondir sur une si jolie parenthèse biologique...

Mes compétences en microbiologies sont certes moins pointues et plus généralistes que ce qui vient d'être énoncé, mais quand bien même Escherichia coli a une stratégie d'évitement de la phagocytose originale, il (ou elle ?) présente de façon ostentatoire à sa surface un super-antigène, le LPS, qui entraîne dès son accumulation dans le sang une activation débridée du système immunitaire !

S'en suit le choc septique avec effondrement de la pression sanguine, CIVD, collapsus vasculaire... et la mort de l'hôte !

Ce que je veux dire, c'est que malgré la petite fantaisie que s'autorise le bacille, c'est bien son caractère ostensiblement "autre" qui fait réagir l'hôte, et c'est bien la réaction disproportionnée de l'hôte... qui tue tout le monde.

D'autre part, j'avais sans doute compris de travers la "vadrouille hors du côlon" initialement mentionnée par GK : je pensais aux Escherichia coli qui s'autorisent une excursion dans les eaux contaminées par des matières fécales, Escherichia coli entéro-pathogènes ou entérotoxiques (ECEP ou ECET), qui lorsqu'elles se retrouvent dans l'eau de boisson sont responsables à la fois de la tourista occasionnelle et (plus tragiquement) d'une part importante de la mortalité infantile dans les pays pauvres.

Ce qui n'est pas "autre" pour un individu (celui à l'origine de la contamination....) devient profondément inhumain et mortel pour un autre.

Tout ça me donne envie de parler de Listeria, de la syphillis et de la théorie endosymbiotique de Margulis. Pas nécessairement dans cet ordre. Mais rassurez-vous, je sais me retenir.
Sylvaner, si tu veux que je te réponde plus en détail, ouvre un sujet dans la section "science du forum".

Avant de relaisser les Actusfeux à leurs débats quelques rapides précisions quand même car il y a des imprécisions/erreurs dans les deux points que tu as soulevé.

-Oui, les conséquences dans les premières heures d'une bactérièmie à E. coli peuvent être dramatique (Cf. le tragique décès de Robert Holdstock).

Mais :

-LPS/TLR est tout sauf spécifique de E. coli. Et en amont, c'est la liaison avec le CD16 qui pemettra à E. coli et pas aux autres Gram négatifs du tube digestif de se retrouver dans le sang. Donc responsable initial du décès, E. coli et sa stratégie d'évitement pas l'hôte et sa réaction, secondaire, non spécifique, disproportionnée.
Une mini-réponse ici, juste pour ne pas laisser cette fibre de ce fil "en l'air" : je n'ai rien à redire scientifiquement à la précision que tu apporte (je ne voulais en aucun cas dire que l'endotoxine était spécifique d'E.coli), mais la notion de "responsabilité", éminemment non scientifique, est discutable ...
-Les sous-espèces de E. coli que tu cites (EPEC, ETEC) mais aussi EIEC, EHEC et cie, contrairement à ce que tu as écrit
Ce qui n'est pas "autre" pour un individu (celui à l'origine de la contamination....) devient profondément inhumain et mortel pour un autre.
sont aussi bien pathogènes pour le sujet à l'origine de la contamination et que pour les autres. Ce sont des E. coli pathogènes et pas commensaux.
Au temps pour moi... je me suis encore emmêlé dans les sous-espèces.
Il reste que cette notion de "pathogènes stricts" est un peu confuse pour moi : on l'emploie aussi pour le pneumocoque (Streptococcus pneumoniae) et pourtant, le gros des contaminations ont pour origine un porteur sain...
Bref. Rendez-vous pour un fil "microbio" dans la partie sciences, le jour où j'aurai le courage...[/i]
---
"Il aura fallu des millions d'années à l'espèce humaine pour descendre des arbres et seulement dix de plus pour se mettre en vitrine." R. Powers

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Message par MF » mer. janv. 27, 2010 3:18 pm

Lem a écrit :Le métaphysique (inaccessible à la vérification). L'inhumain (inaccessible à la négociation). L'incommensurable (inaccessible à la mesure).
Trois candidats au même poste.
Serait-ce alors les proportions de dosage de ces 3 candidats que nous [avons/sommes] chacun qui expliqueraient les différences de "corpus" (ou de mode définitionnel) ?

Comme je le crois pour le dosage "game player" / "gambler" / "killer" qui peut aussi être une explication des positionnements différents du lecteur/critique vis à vis de la SF ?
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » mer. janv. 27, 2010 3:45 pm

MF a écrit :Serait-ce alors les proportions de dosage de ces 3 candidats que nous [avons/sommes] chacun qui expliqueraient les différences de "corpus" (ou de mode définitionnel) ?
Dans la mesure où chacun des trois candidats se laisse exprimer sous la forme "inaccessible à-", on pourrait même aller jusqu'à dire qu'on dégage un noyau définitionnel.
Mais n'anticipons pas les réponses et la conclusion de GK.

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Message par Lensman » mer. janv. 27, 2010 3:49 pm

Gérard Klein a écrit :On pourrait dire précisément de la science-fiction qu’elle est la littérature de ce manque. Et, page 48, il ajoute: “ “Ce qui n’est pas entouré incertitude ne peut être la vérité”, disait le physicien Richard Feynman, prix Nobel de physique en 1965. “C’est dans l’ombre de cette incertitude que peut persister la sensation d’un manque sans lequel il n’est pas d’émerveillement. Pas de questionnement. Pas de véritable respect.” Certes, je sollicite ici un peu le texte en l’extrayant de son contexte mais ce questionnement, cet émerveillement, ce respect, c’est par extension ce dont la science-fiction est, plus ou moins habilement, une traduction poétique. (Je recommande aussi de lire le Magazine Littéraire de janvier consacré à Spinoza et son enquête: Le retour de la métaphysique.)
Voilà en tout cas une position que je comprends (le questionnement), et j'y vois bien une "traduction poétique" dans la science-fiction, au moins dans une bonne partie de cette dernière. Et plus ou moins habilement, en effet…
Je qualifierais sans problème ce "questionnement" comme une position métaphysique ("je vais faire comme si il y avait des choses à trouver et à "comprendre""), parce que seulement ce que j'observe et ce que je "sais" déjà me pousse à penser que je peux trouver mieux encore, mais c'est tout, ce n'est qu'un espoir. Il n'y a peut-être rien à trouver de très important. La recherche n'est pas forcée d'aboutir à des choses intéressantes. La mener est donc un "pari".
On peut aussi adopter une autre position métaphysique radicale, qui serait:
"Bon. On voit bien que nous n'avons aucune chance (sic) d'obtenir une compréhension complète du fonctionnement de l'univers. C'est trop mystérieux, ou trop complexe, ou trop compliqué, etc. On laisse donc tomber."
Ce serait dommage… Non?
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Message par bormandg » mer. janv. 27, 2010 3:53 pm

Lensman a écrit : On peut aussi adopter une autre position métaphysique radicale, qui serait:
"Bon. On voit bien que nous n'avons aucune chance (sic) d'obtenir une compréhension complète du fonctionnement de l'univers. C'est trop mystérieux, ou trop complexe, ou trop compliqué, etc. On laisse donc tomber."
Oncle Joe
Tu viens de définir l'alliance mainstream-fantasy! 8) :twisted: 8)
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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Message par Lem » mer. janv. 27, 2010 4:02 pm

Lensman a écrit :Je qualifierais sans problème ce "questionnement" comme une position métaphysique ("je vais faire comme si il y avait des choses à trouver et à "comprendre""), parce que seulement ce que j'observe et ce que je "sais" déjà me pousse à penser que je peux trouver mieux encore, mais c'est tout, ce n'est qu'un espoir. Il n'y a peut-être rien à trouver de très important. La recherche n'est pas forcée d'aboutir à des choses intéressantes. La mener est donc un "pari".
On pourrait faire un parallèle avec cette vieille astuce rhétorique qui consiste à dire que la science "mutliplie les points de contact avec l'inconnu". C'est une sorte d'anti-définition (ou de définition paradoxale) puisqu'elle opère cette multiplication dans le même mouvement qui la pousse à réduire l'inconnu. En le réduisant, elle l'augmente.
Dans cette optique, on peut se demander ce que la SF emprunte réellement à la science : sa capacité à réduire l'inconnu ou à multiplier les points de contacts avec lui ? (En gardant en tête que de l'inconnu à l'inconnaissable, donc à l'inhumain, il y a un cheminement logique.) Le fait que l'exemple archétypal du sense of wonder soit le surgissement final d'un mot inconnu/inconnaissable/inhumain dans une phrase dont la portée semble être l'univers lui-même ("nous connaissons désormais la race qui va régner sur le sevagram") me paraît un indice significatif.
Modifié en dernier par Lem le mer. janv. 27, 2010 4:41 pm, modifié 2 fois.

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dracosolis
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Message par dracosolis » mer. janv. 27, 2010 4:28 pm

arrête de citer Isher, chaque fois j'ai la mort d'Innelda qui me remonte
(oué parce que je suis persuadée qu'en fait elle meurt)
(je sais, je sais)
(mais c'est trop facile)
Antéchrist N°4
Idéologue Relativiste à mi-temps
Antéchrist N°4 :

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Message par Lensman » mer. janv. 27, 2010 4:39 pm

Lem a écrit :
Lensman a écrit :Je qualifierais sans problème ce "questionnement" comme une position métaphysique ("je vais faire comme si il y avait des choses à trouver et à "comprendre""), parce que seulement ce que j'observe et ce que je "sais" déjà me pousse à penser que je peux trouver mieux encore, mais c'est tout, ce n'est qu'un espoir. Il n'y a peut-être rien à trouver de très important. La recherche n'est pas forcée d'aboutir à des choses intéressantes. La mener est donc un "pari".
On pourrait faire un parallèle avec cette vieille astuce rhétorique qui consiste à dire que la science "mutliplie les points de contact avec l'inconnu". C'est une sorte d'anti-définition (ou de définition paradoxale) puisqu'elle opère cette multiplication dans le même mouvement qui la pousse à réduire l'inconnu. En le réduisant, elle l'augmente.
Dans cette optique, on peut se demander ce que la SF emprunte réellement à la science : sa capacité à réduire l'inconnu ou à multiplier les points de contacts avec lui ? (En gardant en tête que de l'inconnu à l'inconnaissable, donc à l'inhumain, il y a un cheminement logique.) Le fait que l'exemple archétypal du sense of wonder soit le surgissement final d'un mot inconnu/inconnaissable/inhumain dans une phrase dont la portée semble être l'univers lui-même ("nous connaissons désormais la race qui va régner sur le sevagram") me paraît un indice significatif.
Pour moi, mais ce n'est que ma position personnelle, dire "réduire l'inconnu", ou "multiplier les point de contacts avec l'inconnu", etc, ce ne sont que des facilités de langage, parce qu'il nous est très difficile de raisonner autrement qu'en faisant comme s'il y avait un monde donné, bien posé, et que nous observons et décrivons.
Nous sommes (me semble-t-il) obligé de "faire" comme cela, sans doute parce que c'est une attitude "naturelle", ou "habituelle", dans la quotidienneté (au sens très large). C'est une image facile et très commode, très utile, mais qui peut conduire à des conceptions trompeuses dans leur apparente clarté, du genre:

"Il y a le monde. Une partie nous est compréhensible (j'y vais à la louche, hein), mais il y a un pan qui nous restera inaccessible, une espèce de Grand Ailleurs. Et nous devons transiger d'une manière ou d'une autre avec ce Grand Ailleurs" (d'où des discussions philosophico-métaphysiques sans fin…)

Pour moi (mais puisqu'on parle de nos positions philosophiques), ce type de représentation n'a pas lieu d'être, car rien ne peut être dit sur le monde dans sa totalité.
Le "monde dans sa totalité" est d'ailleurs un concept vide de sens. Il est vain de le découper en morceau (connaissable, inconnaissable, etc.) Cela ne veut au fond rien dire.
D'un point de vue "pratique" (en sciences, par exemple), on est pourtant assez obligé de "faire comme si", car autrement il est impossible de mener des recherches.

Voilà en gros ma positon, que mes amis qualifient de "matérialiste". Je ne sais pas s'ils me comprennent toujours très bien…

Oncle Joe

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