Aldaran a écrit :Gérard Klein a écrit :Juste sorti d'une belle librairie à l'angle rue des Écoles, rue de Poissy que je fréquente de temps en temps.
Vient de changer de propriétaire.
Le précédent à qui je demandais un jour: Vous n'auriez pas un peu de science-fiction?
me répondit, lèvres pincées et narines contractées : 'Ici, monsieur, c'est une librairie."
Je suppose qu'il avait cru que je lui demandais des préservatifs ou de la poudre de cantaride.
Pourtant il avait un petit rayon de porno chic.
Bref, achetant ce jour un livre pour faire cadeau à une amie, je pose la même question à la nouvelle dame. Elle me répond: oh si, voyez au fond.
Après être passé entre des tables et rayons pleins de romans convenables et d'essais très propres sur eux, et d'un très gros rayon polars, j'arrive dans la zone enfants et je tombe sur un rayon étiqueté science-fiction. Il y avait des Harry Potter en Folio junior et quelques vampireries.
Encore des qui ont lu attentivement le rapport du MInistère dit de la culture.
Et ça à deux pas de la fac Jussieu.
Il me semble qu'on est en plein dans notre débat.
Toujours rue des Écoles mais à l'angle de la Place Paul Painlevé cette fois, la Librairie Compagnie a, elle, un petit rayon SF. Tout petit. Au sous-sol. À une brassée des revues
Futuribles.
Dans ce (tout petit) rayon SF, on y remarque
La Parabole du semeur et
La Parabole des talents de Butler. Pas vraiment une nouveauté. Renseignement pris : le jeune homme qui s'occupe du rayon estime que "ce sont des livres qu'on doit avoir lu".
Soyez fous : changez de librairie si la vôtre est nulle, quitte à faire un détour...
Oui, je connais bien cette librairie. C'est généralement là que je vais me fournir en philosophie et en sciences. Mais côté sf, c'est vraiment en dessous du minimum syndical. Le vendeur que j'ai plusieurs fois interrogé m'a toujours gentiment répondu: oh, on n'a pas ce public là.
ÉvIdemment, en face de la Sorbonne (et à deux pas de chez Gibert).
En revanche, ils ont un plein rayon de métaphysique. Oncle Joe devrait aller s'y ressourcer. Il y a aussi un rayon et un mur entier de polars.
On est bien, sinon dans le rejet, dans une forme de déni, et dans une librairie par ailleurs étendue, importante, de bonne qualité générale et très fréquentée.
Nous sommes bien au cœur du problème. Je connais à peu près toutes les librairies du cinquième, du sixième et du quatrième arrondissement. La quasi totalité, qui ont parfois des choses vraiment très étranges, n'ont rien mais ce qui s'appelle rien en matière de science-fiction, je ne parle pas du bas de gamme, je parle du plus haut niveau de qualité, le meilleur Bradbury, Gene Wolfe, Dan Simmons, Silverberg, Herbert, Dick (un peu, très peu dans 10/18), Jeury, et il est inutile que je vous cite à vous dix douzaines d'écrivains qui sont de véritables auteurs à la fois du point de vue des idées et de l'écriture et qui valent largement ce qu'on trouve dans ces librairies. Vous ferez la liste à votre idée. Je pense aussi à la librairie à côté du Flore, sans parler de la Hune déjà fréquemment alludée.
J'ai parcouru en France des dizaines, je n'ose pas dire des centaines de librairies appartenant au groupe des 500 premières, dites catégorie A si je me souviens bien du jargon. En général, c'est affligeant sauf quand il y a un libraire qui connaît ou du moins s'intéresse à la chose. Les représentants m'en parlent à l'occasion, pas tellement à propos de l'office, parce que là, ça passe dans le lot Laffont, mais au niveau de la possibilité de réassort. C'est du reste la même chose, et ça donne à réfléchir, pour les livres d'information scientifique de bon niveau. En philo, je ne sais pas, ce n'est pas vraiment mon truc sauf exception.
Le problème c'est que la plupart des libraires ont une formation littéraire quand ils en ont une. Et que la science-fiction, comme la science du reste, ça ne passe pas. Amélie Nothomb, oui. Gavalda, éventuellement (de toute façon, il y en a partout), Werber aussi du reste mais ils pensent (comme certains d'entre nous) que ce n'est pas de la sf.
Ce n'est pas un problème récent; j'y suis confronté depuis quarante ans et plus et Opta a eu le même. Comme je l'ai déjà dit, sans les FNAC puis Virgin, la collection Ailleurs et demain n'aurait peut-être pas résisté. Dimensions, la collection de Robert Louit, affreuse certes, mais qui a publié du beau monde, en est morte. Il y avait d'autres raisons mais celle-là a compté.
Alors Amazon et Internet, on verra, mais ça reste peanuts.
Mon immortalité est provisoire.