Du sense of wonder à la SF métaphysique

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Lensman
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Message par Lensman » ven. févr. 12, 2010 6:28 pm

Lem a écrit :
Lensman a écrit :Qui parle ?
Un être hypothétique dont j'essaie de reconstituer l'arc-réflexe. Ça te paraît plausible ?
Ah oui... c'est quelqu'un de vraiment intéressant…
Quelque part, cela m'inquièterait qu'un pareil imbécile en vienne à apprécier les mêmes choses que moi. enfin, je veux dire en littérature. Pour la cuisine, je ne dis pas…
Oncle Joe

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Lensman
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Message par Lensman » ven. févr. 12, 2010 6:32 pm

Lem a écrit : Il y a un consensus plus ou moins explicite sur littérature et rapport au langage (d'où mon intérêt pour le problème de la métaphore) mais le seul référentiel vraiment fiable, c'est l'histoire.
Plus ou moins explicite? Compréhensible, ça serait plus utile.
Oncle Joe

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Message par Lensman » ven. févr. 12, 2010 6:35 pm

Lem a écrit : Quand on consulte une histoire de la littérature, on a en gros une idée de ce que, à un moment donné, on considère comme de la littérature.
D'où le projet d'une Histoire de la science-fiction en France.
C'est la stratégie en l'état.
Avec plaisir.
Et aussi, à moment donné, le jazz est devenu de la musique, parce qu'il a été mentionné dans les histoires de la musique.
Un peu de sérieux!
Oncle Joe

Lem

Message par Lem » ven. févr. 12, 2010 6:37 pm

Lensman a écrit : sur ce fil, on va arriver à trouver une définition "littéraire" de la SF?
Il me semble que quelques-uns ont fait remarquer qu'il y avait des aspects thématiques, éditoriaux, sociaux, etc, qui intervenaient de manière furieuse dans la caractérisation de la SF.
Je vais te présenter la chose autrement.
Tous les récits SF ne se passent pas dans le futur, ne sont pas centrées sur la science, n'ont pas de visé sociale, ne paraissent pas sous le label, etc. De ce point de vue (l'inventaire des objets ou des procédures éditoriales), on ne trouvera pas d'élément définitionnel.
Pourtant, tous les récits SF possèdent un point commun indiscutable.
Ils font appel au langage.
A la limite, on peut trouver un cas-limite dans une BD muette, comme Arzach. Mais elle a encore un titre (qui est d'ailleurs un néologisme typiquement SF). Et puis, la narration en cases peut sans problème être considérée comme une forme de langage – mais peu importe, c'est vraiment un cas à part.

On peut donc en déduire que si SF il y a, elle est quelque part dans le langage.
Or – miracle – que se passe-t-il si on dit ça ? On est déjà dans la littérature. Il n'y a même pratiquement rien d'autre à faire. Personne ne viendra dire à notre place "la SF, c'est de la littérature". C'est à nous de le faire. Mais pour ça, il faut accepter de renoncer à la définition-par-les-objets (impossible de toute façon) et à regarder du côté du langage. S'il y a un acte théorique refondateur à produire, c'est celui-là.

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Lensman
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Message par Lensman » ven. févr. 12, 2010 6:37 pm

Je vais aussi boire un coup (j'en ai besoin, après cette immense réflexion sur la nature de la littérature).
A bientôt, les amis!
Oncle Joe

Lem

Message par Lem » ven. févr. 12, 2010 6:39 pm

Lensman a écrit :Quelque part, cela m'inquièterait qu'un pareil imbécile en vienne à apprécier les mêmes choses que moi. enfin, je veux dire en littérature. Pour la cuisine, je ne dis pas…
Je pourrais le prendre mal. Les phrases qui composent la reconstitution, je les ai entendues mille fois dans la bouche de ma mère, mon père, des amis, des gens croisés ici et là, elles sont d'une banalité terribles, comme tous les lieux communs… (Mais la cuisine maternelle est bonne, effectivement.)

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MF
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Message par MF » ven. févr. 12, 2010 6:45 pm

Lem a écrit :
MF a écrit :tu affiches un objectif auto-contradictoire
Réifions une métaphore.
J'ai une boîte cubique de dix centimètres de côté dans laquelle je veux faire entrer une bouteille de vin pour l'envoyer à Oncle, à cause d'un pari perdu.
Je prends un morceau de bois, je taille les parties manquantes, j'agrandis la boîte et à la fin, j'y mets la bouteille.
Ai-je fait entrer la bouteille dans la boîte ? Oui.
Ai-je agrandi la boîte ? Oui.
Où j'ai rien compris à ce qu'est une métaphore réifié (tu le savais) ou tu as des problèmes avec la topologie (je le savais) ^^

Sérieux, si tu veux bien la refaire au ralenti...
Quand tu interprètes ma démarche comme le désir de me plier à la norme,
A ton tour, lis moi. Je n'ai jamais fait cette interprétation.
tu suggères, implicitement ou clairement, que je veux briser la bouteille.
Non. Ni implicitement ni explicitement.
Je pense que c'est le bruit de fond de ce fil que tu entends.
Mais ce n'est pas ce que je veux faire. je-veux-agrandir-la-boîte. Je-veux-élargir-la-norme.
Tu parviens d'ailleurs à la même conclusion
Merci de me reconnaître de t'avoir correctement lu. Car je ne suis parvenu, personnellement, à aucune conclusion : j'ai, simplement, lu ta proposition.:
Comme je l'ai dit à Oncle plus haut, il n'y a pas de définition objective, consensuelle, de la littérature. C'est même frappant quand on lit de la théorie littéraire : les débats y sont pratiquement les mêmes que ceux qu'on a ici. On y trouve même des phrases un peu désespérées du genre "la littérature, c'est ce que je désigne comme tel".
Il y a un consensus plus ou moins explicite sur littérature et rapport au langage (d'où mon intérêt pour le problème de la métaphore) mais le seul référentiel vraiment fiable, c'est l'histoire.
Non plus. L'histoire n'est pas un référentiel fiable.
C'est une collection des traces laissés par les référentiels qui se sont succédés.
Quand on consulte une histoire de la littérature, on a en gros une idée de ce que, à un moment donné, on considère comme de la littérature.
D'où le projet d'une Histoire de la science-fiction en France.
C'est la stratégie en l'état.
Tu vois bien sûr la difficulté : mettre en confrontation une histoire de la SF et une histoire de la littérature, sans point commun, avec l'espoir du développement d'une nouvelle souche de la littérature, hybride s'appuyant sur ces deux histoires originelles.
Il va donc te falloir être un peu plus fourbe ou sournois que tu ne l'es pour vendre l'idée d'une déconstruction des murailles par leur soin à des gens réfugiés à l'intérieur de cette exception culturelle française.
Mais, comme j'aime les impossibilités récréatives, je suis tout prêt à te donner un coup de main.
Merci. J'en ai bien besoin.
Quant à la population réfugiée dans l'exception… comment dire ? Je les connais un peu. Ils sont fermés. Souvent bornés. Parfois méchants ou étroits. Mais la plupart savent qu'ils sont réfugiés et n'aiment pas ça (Ils se souviennent de l'époque où c'étaient eux, les mâles alpha.) C'est juste qu'ils n'ont pas la moindre idée de ce qu'il faut faire pour ouvrir les portes – d'où leur tendance à les ouvrir à n'importe quoi du moment que ça a du succès. Il y a un coup à jouer.
Les investir par la poterne ou les assiéger pour les affamer ?
Plus sérieusement, je partage le point de vue que tu exprimes ici.
Mais je ne vois pas bien comment la SF pourrait jouer le rôle d'un du Guesclin boutant l'anglois hors de Saintonge.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
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Message par MF » ven. févr. 12, 2010 6:48 pm

Lensman a écrit :Allez, je décomplexe tout le monde, je lance le débat: Gurdjieff, c'est du barjo, ou de la métaphysique sérieuse? (j'accepte les réponses nuancées, mais il faut argumenter, tout de même).
Ni l'un, ni l'autre (comme ce n'est pas nuancé, je n'argumente pas). C'est juste de l'arnaque.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
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Message par MF » ven. févr. 12, 2010 6:53 pm

Lem a écrit :Pourtant, tous les récits SF possèdent un point commun indiscutable.
Ils font appel au langage.
Je te ferai juste remarquer que si je supprime "SF" dans la première phrase, ça continue de marcher.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
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Aldaran
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Message par Aldaran » ven. févr. 12, 2010 6:59 pm

Lem a écrit :"C'est leur truc. Un truc de civilisation jeune, de grands gosses qui croient encore naïvement en Dieu, à la science et au progrès. C'est du western transposé dans l'espace, l'idéologie des pionniers, de la frontière, de la force. Ça ne nous concerne pas. Ça ne dit rien de ce qu'on est ici, de la vie telle qu'on la connaît ici. Et quand les auteurs français essayent d'en faire, c'est encore pire, ça sent le copié-collé servile, c'est comme imiter un mauvais produit dérivé."
Lem a écrit :
Lensman a écrit :Quelque part, cela m'inquièterait qu'un pareil imbécile en vienne à apprécier les mêmes choses que moi. enfin, je veux dire en littérature. Pour la cuisine, je ne dis pas…
Je pourrais le prendre mal. Les phrases qui composent la reconstitution, je les ai entendues mille fois dans la bouche de ma mère, mon père, des amis, des gens croisés ici et là, elles sont d'une banalité terribles, comme tous les lieux communs… (Mais la cuisine maternelle est bonne, effectivement.)
Ne le prends pas mal.
Ce sont certaines phrases que tu as entendues prononcées par tes père et mère. Pas le discours qu'elles construisent quand on les assemble dans cet ordre. Et les assembler dans cet ordre, ça fait effectivement penser à un discours d'imbécile qui se prononce sur un sujet qu'il ne connait visiblement pas.

Lem

Message par Lem » ven. févr. 12, 2010 7:00 pm

MF a écrit :[Tu vois bien sûr la difficulté : mettre en confrontation une histoire de la SF et une histoire de la littérature, sans point commun, avec l'espoir du développement d'une nouvelle souche de la littérature, hybride s'appuyant sur ces deux histoires originelles.
"Sans point commun" est une erreur.
Il y a énormément de points communs. Pourquoi crois-tu que j'insiste autant sur Rosny ? Ce n'est pas mentir que de rappeler qu'il est l'un des pères fondateurs de la SF mondiale. Ce n'est pas mentir non plus que de rappeler qu'il est l'un de ceux qui ont mis à mort le naturalisme.
Et les deux choses ont eu lieu la même année !
Pourquoi crois-tu que je m'intéresse à Jarry ? Il est à l'origine de quasiment toute la contre-culture littéraire française (et d'une bonne partie du reste du monde). Ce type était réellement un fou génial. Mais il se trouve aussi qu'il a été l'un des premiers admirateurs de Wells, qu'il a écrit sur les romanciers scientifiques, etc.
Et tu veux qu'on continue la liste ? Queneau, dans l'histoire de la littérature française au XXème siècle, c'est quelqu'un de central. Vian aussi. Juste en signalant le va-et-vient entre SF et surréalisme, SF et Nouveau Roman, SF et Perpendiculaire, on a un pointillé de relations qui couvrent tout le siècle.

Et je précise avant qu'Erion ne hurle qu'il ne s'agit en aucun cas de réduire la SF à ces "épisodes supposés légitimes". Il s'agit juste de les signaler et de les relier – ce que personne n'a fait jusqu'ici de manière systématique. Tout le monde ici semble trouver que c'est incompatible avec la SF telle qu'on la connaît. Moi pas. Ça ne me pose aucun problème de parler, dans le même livre, de Jarry et la Hire. De Messac et Gernsback. De Queneau et Campbell. De Wul et Robbe-Grillet. De Gibson et Volodine. Au contraire, je trouve ça enthousiasmant. La SF, c'est la dernière grande histoire que la littérature française ne s'est pas encore racontée à elle-même. Si quelqu'un doit le faire, autant que ce soit nous.

(C'est aussi une réponse au problème DuGuesclin : les gars vont réaliser, stupéfaits, qu'ils n'ont plus besoin de vivre comme des réfugiés. Que dehors, c'est à eux aussi. C'est du moins ce qu'on peut espérer.)

Lem

Message par Lem » ven. févr. 12, 2010 7:01 pm

MF a écrit :
Lem a écrit :Pourtant, tous les récits SF possèdent un point commun indiscutable.
Ils font appel au langage.
Je te ferai juste remarquer que si je supprime "SF" dans la première phrase, ça continue de marcher.
C'est pour ça que la SF est de la littérature.

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Message par MF » ven. févr. 12, 2010 7:06 pm

Lem a écrit :
MF a écrit :
Lem a écrit :Pourtant, tous les récits SF possèdent un point commun indiscutable.
Ils font appel au langage.
Je te ferai juste remarquer que si je supprime "SF" dans la première phrase, ça continue de marcher.
C'est pour ça que la SF est de la littérature.
Hop, encore un raccourci détecté.
Pas la SF. Les récits SF (sous-entendu, bien sur, les récits écrits).

Sinon, je pourrais tout aussi bien écrire :
Pourtant, tous les films SF possèdent un point commun indiscutable.
Ils font appel à l'image.

et en conclure que la SF est du cinéma.
Le message ci-dessus peut contenir des traces de second degré, d'ironie, voire de mauvais esprit.
Son rédacteur ne pourra être tenu pour responsable des effets indésirables de votre lecture.

Lem

Message par Lem » ven. févr. 12, 2010 7:12 pm

Aldaran a écrit :[Ne le prends pas mal.
Ne t'inquiète pas.
Ce sont certaines phrases que tu as entendues prononcées par tes père et mère. Pas le discours qu'elles construisent quand on les assemble dans cet ordre. Et les assembler dans cet ordre, ça fait effectivement penser à un discours d'imbécile qui se prononce sur un sujet qu'il ne connait visiblement pas.
Le déni, ce n'est pas une opération rationnelle fondée sur un examen sérieux et approfondi de l'objet dénié.

Dans le cas de la SF, c'est une somme de préjugés, de malentendus, de contre-sens qui occultent tellement l'objet qu'il finit par disparaître et qu'on peut faire comme s'il n'existait pas.

La SF est aussi bien (ou mal) écrite que le reste de la littérature, je t'assure. La phrase "la SF est mal écrite" n'est pas un jugement, c'est un a priori.

La phrase "la SF, c'est de la science et moi j'ai horreur de la science" est aussi un a-priori. Il y a des miliiers de récit où la science ne joue aucun rôle. On a même plus de chance de tomber sur eux que sur de la hard science, statistiquement.

Etc.

La reconstitution du déni pour cause american-only est basique. L'image de la SF comme "truc pour civilisation dans l'adolescence, qui croit à tout (naïf) etc." est vraiment banale ; on en trouve même déjà une pré-représentation dans le texte de Th. Bentzon que j'ai posté l'autre jour. Je l'ai entendue des dizaines de fois, et chez des gens très différents – dont mes parents, en effet.

Lem

Message par Lem » ven. févr. 12, 2010 7:13 pm

MF a écrit :Sinon, je pourrais tout aussi bien écrire :
Pourtant, tous les films SF possèdent un point commun indiscutable.
Ils font appel à l'image.

et en conclure que la SF est du cinéma.
Heu…
Tu peux l'écrire.
Tous les films de SF sont du cinéma.

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