Conf. Imaginales "Déclin de la sf, essor de la fantasy

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » lun. juin 07, 2010 8:27 am

Don Lorenjy a écrit :Appel : il y a-t-il dans la salle des auteurs qui s'estiment suffisamment doués pour relever le défi d'une narration orientée non-affrontement ? Si oui, MP, 'rci. Et si non-affrontement c'est pas clair, MP aussi.
À ton avis ?

Mais là, j'ai pas le temps.
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Erion
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Message par Erion » lun. juin 07, 2010 8:29 am

Eric a écrit :
Ecrire une SF optimiste ne demande pas seulement une croyance en une possibilité de futur meilleur. Elle exige un vrai travail de désamorçage de tout ce qui pourrait merder. Et ça, c'est à la fois long et chiant, narrativement parlant. À moins d'être vraiment très doué.
Ouaip... Et rien que ça, c'est une vraie mine d'or science-fictive.

Par contre, je ne sais pas trop si il faut s'en réjouir.
Se réjouir de quoi ? Que ce soit une mine ? ou que ce soit difficile ?
Modifié en dernier par Erion le lun. juin 07, 2010 8:39 am, modifié 1 fois.
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Papageno
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Message par Papageno » lun. juin 07, 2010 8:35 am

Il y a un grand nombre de récits de Simak (par exemple) ou il n’y a aucun affrontement.
Dans d’autres, il désamorce complètement l’affrontement (« Pour sauver la guerre », « honorable adversaire »)
Simak est-il optimiste ? (pas certain!)

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LDavoust
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Message par LDavoust » lun. juin 07, 2010 9:07 am

Salut à tous,

Heureux que le débat ait un peu plu :)
Par contre, je crois que c'est Lionel Davoust qui dit que les amateurs d'imaginaire sont un grand groupe qui accepte le décalage avec la réalité et, sur ça, je plussoie totalement.
Yep, c'était moi. Plus ça va et plus je trouve qu'à morceler les littim en sous-genres, non seulement on se dessert (à la framboise) pour mille raisons, sur le plan du franchissement des a-priori du public du public comme de la liberté de création, mais en plus cela ne reflète que partiellement la réalité du lectorat (quoique Stéphane Marsan a visiblement une autre analyse, et il connaît foutrement mieux le marché que moi!). Simplement, je pense qu'un lecteur de Kafka ne peut qu'apprécier Dick, alors qu'un lecteur assidu de Sophie Kinsella ne trouvera pas forcément son bonheur chez Garcia Marquez.

RC Wilson disait également pendant le festival, en substance, que fantasy et SF partagent un énorme point commun (je résume et mes souvenirs peuvent avoir dévié de la vérité): celui du vertige suscité par le plus-grand-que-soi. Savoir s'il s'agit de science ou de magie derrière est un problème périphérique parce que, ce qui compte, c'est le rapport humain à la chose. Je suis entièrement d'accord avec cette analyse. (Ca nous renvoie aussi à la 2e loi de Clarke: toute technologie suffisamment avancée est indistinguable de la magie.)

Ce qui m'amène à la question de la science et le rapport de celle-ci au public. Oui, dans les années 50, il y avait la guerre froide et la menace d'une troisième guerre mondiale, mais je crois que la science suscitait encore quelque chose de "numineux", un vertige conceptuel empreint d'une forme de confiance et d'émerveillement. Cette qualité a été perdue dans les années 80: aujourd'hui, la contre-culture consiste à combattre les avancées scientifiques parfois avant même qu'une étude véritable ne puisse se faire. (A tort ou à raison, je ne dis pas, ce n'est pas la question.) Bref, la science a connu une période où elle était une doctrine de salut terrestre, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui, d'où, je pense, une désaffection. J'irais même jusqu'à dire que bien des gens pensent que la science leur a menti sur ses potentialités (cf le brouillage malencontreux du scientisme) et lui en tiennent, consciemment ou pas, rigueur.
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Fabien Lyraud
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Message par Fabien Lyraud » lun. juin 07, 2010 10:04 am

Sinon j'en connais un qui était doué, et qui a laissé derrière lui une génération d'auteurs qui cultivaient l'optimisme et le désamorçage des murphyismes. Seulement le relais avec la génération suivante semble poser problème.
C'est vrai que Vance a influencé un tas d'auteurs à la fin des années 70 allant de CG Cherryh à Gene Wolfe en passant par GRR Martin et beaucoup d'autres. Beaucoup d'auteurs féminins d'ailleurs dans le lot. Toute la vague néo classique de l'époque.
Mais bon déjà Farmer ou Le Guin sont influencé par Vance également.
Aujourd'hui l'influence de Vance se fait sentir en fantasy plus qu'en SF d'ailleurs.
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Lensman
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Message par Lensman » lun. juin 07, 2010 10:08 am

Papageno a écrit :Il y a un grand nombre de récits de Simak (par exemple) ou il n’y a aucun affrontement.
Dans d’autres, il désamorce complètement l’affrontement (« Pour sauver la guerre », « honorable adversaire »)
Simak est-il optimiste ? (pas certain!)
Un affrontement, ce n'est pas forcément une baston à coup de tentacules ou de pistolasers (même si on peut aimer!)... ça peut être un peu psychologique, intellectuel, subjectif, rentré,... si, si!

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Don Lorenjy
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Message par Don Lorenjy » lun. juin 07, 2010 10:14 am

Papageno a écrit :Il y a un grand nombre de récits de Simak (par exemple) ou il n’y a aucun affrontement.
Dans d’autres, il désamorce complètement l’affrontement (« Pour sauver la guerre », « honorable adversaire »)
Simak est-il optimiste ? (pas certain!)
Excellent !

C'est exactement en ces termes que je le vois : adopter une structure narrative qui tourne le dos à certains réflexes ne veut pas dire "être optimiste".

C'est juste chercher une autre voie et une autre façon de raconter des histoires en laissant peut-être une chance à l'humain.
Ce que je vais dire là est trrrrrèèès grave, mais j'assume : la litt gén, même (voire surtout) nombriliste, le fait souvent, et pas toujours de façon chiante.
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Eric
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Message par Eric » lun. juin 07, 2010 10:40 am

Si je dis que si tu laisses sa chance à l'humain c'est l'assurance d'un conflit, ça fait de moi un pessimiste, alors ?

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Roland C. Wagner
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Message par Roland C. Wagner » lun. juin 07, 2010 10:45 am

LDavoust a écrit :Ce qui m'amène à la question de la science et le rapport de celle-ci au public. Oui, dans les années 50, il y avait la guerre froide et la menace d'une troisième guerre mondiale, mais je crois que la science suscitait encore quelque chose de "numineux", un vertige conceptuel empreint d'une forme de confiance et d'émerveillement. Cette qualité a été perdue dans les années 80: aujourd'hui, la contre-culture consiste à combattre les avancées scientifiques parfois avant même qu'une étude véritable ne puisse se faire. (A tort ou à raison, je ne dis pas, ce n'est pas la question.) Bref, la science a connu une période où elle était une doctrine de salut terrestre, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui, d'où, je pense, une désaffection. J'irais même jusqu'à dire que bien des gens pensent que la science leur a menti sur ses potentialités (cf le brouillage malencontreux du scientisme) et lui en tiennent, consciemment ou pas, rigueur.
Je suis tenté de penser que la technologie est au cœur du truc, notamment via l'industrie.

Je prends un exemple simple : les OGM.

Le principe de l'OGM est neutre sur un plan moral laïc.

L'application de cette technologie ne l'est pas vraiment. Elle est faite dans une logique industrielle et financière, avec toutes les conséquences que l'on sait. Et la brevetabilité du vivant n'arrange rien, bien au contraire.

C'est un truisme de dire que nous vivons dans une société qui suscite partout de la dépendance — les drogues, la (mauvaise) bouffe, la télé, le tabac, le jeu (en ligne ou pas), les semences brevetées, pardon pour les clichés — et je repense souvent à ce passage de Planète à gogos qui décrit d'une manière hallucinante une dépendance croisée à deux produits conçus pour aller ensemble (je crois qu'il s'agit d'un soda et d'une marque de cigarettes) et susciter cette dépendance.

Le rejet de la science, on le trouve chez tous ceux qui veulent sortir de la société industrielle, et le moins qu'on puisse dire est qu'ils sont divers et variés. J'imagine qu'on le trouve aussi chez ceux que cette société industrielle rend dubitatifs. Mais la science-fiction n'a-t-elle pas effectué, entre autres choses, un travail de critique sociale à partir des années 50 ? (Et la méfiance envers la science n'a-t-elle pas pour point de départ symbolique Hiroshima ?)

De toute manière, les gens sont schizophrènes, si j'étais cynique je dirais que c'est la société industrielle qui veut ça. Les gens se méfient de la science et de la technologie tout en surfant sur le net et en téléphonant avec leur portable, en se soignant à l'aide de médicaments élaborés et en se déplaçant à bord d'avions, de TGV et de voitures sans cesse plus sûres et bardées de technologie.

On ne peut plus nier que les technosciences sont aujourd'hui le principal facteur d'évolution sociale à l'échelle planétaire. L'enjeu des décennies, et peut-être des siècles à venir, c'est la manière dont elles vont être employées.

Il me semble que c'est l'une des leçons qu'on peut tirer de la science-fiction : le contrôle des applications technologiques des découvertes scientifiques, et accessoirement l'orientation des recherches en fonction des applications recherchées, procure un grand pouvoir sur la société. Regarde l'histoire industrielle des supports de stockage de musique, du rouleau de gramophone au mp3. Regarde Monsanto.

Ce n'est pas la science qui a menti sur ses potentialités, ce sont ceux qui exploitent les potentialités en question qui effectuent des choix dont l'orientation suscite la méfiance, méfiance qui rejaillit sur les sciences par contrecoup.

Mais cette méfiance laisse encore de la place à la science-fiction sociologique, à la fiction spéculative, aux formes du genre mâtinées de satire et d'utopie.

Ceux qui en doutent n'ont qu'à lire Oussama.
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Message par Eric » lun. juin 07, 2010 10:58 am

Roland C. Wagner a écrit : Je prends un exemple simple : les OGM.

Le principe de l'OGM est neutre sur un plan moral laïc.
Le pire, c'est que l'on peut dire la même chose du capitalisme (Le Capitalisme est-il moral ? de André Comte-Sponville). Il est amoral, ce sont ses acteurs (enfin un certain nombre) qui eux sont immoraux.

Ce qui nous ramène au facteur humain et à son extrême faillibilité (égoïsme, cupidité, jalousie, nombrilisme, etc...), seule constante tellement certaine qu'on peut toujours miser dessus.

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LDavoust
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Message par LDavoust » lun. juin 07, 2010 11:05 am

@Roland: Nous sommes tout à fait d'accord, nous employons juste des mots différents pour le dire, je pense (j'avais justement les OGM en ête). :)

Quand je parle de la "science", j'y inclus justement ses représentants, tels que perçus par le "grand public". Il y a dans l'esprit du plus grand nombre une association (pas entièrement illégitime...) entre science ("pur esprit", neutre et laïque, monde des idées) et applications (parfois terribles). Le merveilleux monde des idées a été remplacé par la peur des apprentis sociers (encore une fois, pas forcément à tort); dans l'esprit du plus grand nombre, la science n'est pas l'idée, c'est son application. Je crois qu'il est plus difficile aujourd'hui de parler aux gens d'un monde futur où la science aura fini par régler tous les problèmes de la planète, alors que, dans les années 50, je pense qu'on pouvait plus facilement y croire, ce qui n'excluait pas la critique évidemment.

Justement, à titre personnel, je trouve dommage que parler de SF revienne aussi souvent à se focaliser avant toute chose sur l'extrapolation purement scientifique alors que, comme tu le dis, il y a d'autres courants d'extrapolation qui ne reposent pas entièrement sur cette base. RC Wilson disait que définir la SF par la question "et si...?" est incomplet, c'est la question de base d'une dissertation; ce qui compte en fiction, c'est la question "qu'est-ce que ça nous ferait si...?"
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Fabien Lyraud
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Message par Fabien Lyraud » lun. juin 07, 2010 11:20 am

Pour rebondir sur ce que dit Lionel, je suis partisan d'une petite expérience.
On prend les sujets du bac philo et on demande à des auteurs de SF d'écrire une nouvelle sur une de ces thématiques. Je serais vraiment curieux de voir le résultat.
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Tétard
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Message par Tétard » lun. juin 07, 2010 12:45 pm

Fabien Lyraud a écrit :Pour rebondir sur ce que dit Lionel, je suis partisan d'une petite expérience.
On prend les sujets du bac philo et on demande à des auteurs de SF d'écrire une nouvelle sur une de ces thématiques. Je serais vraiment curieux de voir le résultat.
Et on aura le droit de connaître leurs notes ?

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On offre de face la vérité à son égal : on la laisse entrevoir de profil à son maître.
(Chamfort, Eloge de La Fontaine)

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Message par Nébal » lun. juin 07, 2010 12:53 pm

Tu es vil, je l'avais pas osée, celle-là... :mrgreen:

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