Imaginales 2010 : Conf. "Écrire pour le grand public...

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Le_navire
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Message par Le_navire » lun. juin 07, 2010 4:21 pm

MF, qui aime bien s'auto-citer, a écrit :Si tu as bien écouté, HL a donné une définition des littératures de l'imaginaire, en la mettant en opposition à la littérature blanche : "ce sont des livres avec des images dessus".

imaginaire <=> image

Et c'est pas con quand tu vois les vagues de commentaires qui accompagnent la mise en ligne des illustrations de couvertures. Finalement, on en vient à parler plus des images que des textes...
Oui, ça m'avait déjà fait rire jaunâtre la première fois.
Demain, la mode risque d'être aux livres illustrés. Rouge et Or vintage. quelqu'un veut lancer une collec avec moi ? Je suis pauvre, j'ai besoin d'argent.


@Aldaran et Algernon : merci, les garçons. Bon, deux forums, là tout de suite, ça fait beaucoup pour une seule femme un chouilla débordée (faut pas croire, hein ? je ne passe ici faire mes diatribes que quand je sature de mes correcs et que je ne vois plus le texte à corriger sans loucher. Croyez-le ou non, ça me délasse, c'est ma respiration. Je suis vraiment bizarre, des fois, comme fille. Et ça explique pourquoi je dois si souvent éditer mes posts pour l'orthographe...^^) Bref, j'attendrai du coup d'avoir un peu plus de temps. Mais oui, j'irai. Par principe.
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Algernon
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Message par Algernon » lun. juin 07, 2010 4:24 pm

Le_navire a écrit :Bref, j'attendrai du coup d'avoir un peu plus de temps. Mais oui, j'irai. Par principe.
Quand tu iras, fais-nous signe, qu'on puisse profiter du spectacle.

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Soslan
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Message par Soslan » lun. juin 07, 2010 4:26 pm

Fabien Lyraud a écrit :Littérature bourgeoise = littérature dont le coeur de cible est la bourgeoisie et les milieux aisées.
Sur l'existence de laquelle je suis sceptique, ne l'ayant jamais entendu reverndiquer. Mais ça doit être mon côté vieux con réac (et pourtant je suis prolo d'origine).

Ceci dit je te rejoins tout à fait sur un point:
Fabien Lyraud a écrit :Mais le but est de dire que la littérature populaire doit exister et doit avoir une place dans les médias. En fait ils bossent pour nous quelque part et ça doit déraanger certains
Là je suis d'accord. Bien que ça n'ai rien à voir avec le fait qu'ils écrivent de la merde ET qu'ils soient prétentieux, ne mélangeons pas tout, je vous prie.
"La Lune commence où avec le citron finit la cerise" (André Breton)

http://karelia.over-blog.com/
Et pour ne pas faire que ma propre promo :
http://musardises.moonfruit.fr/

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Eric
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Message par Eric » lun. juin 07, 2010 4:45 pm

Fabien Lyraud a écrit :
Nébal a écrit :Moi, ce que j'aimerais comprendre, c'est leur stratégie de subversion de la littérature bourgeoise.
Publier de la littérature populaire chez des éditeurs de littérature bourgeoise c'est de l'entrisme. C'est toi qui parle de subversion. J'y ai été un peu fort en parlant de démarche prolétarienne. Ils ne subvertissent rien. Ils utilisent les armes du système créés pour la littérature borgeoise pour vendre de la littérature populaire. Ce qui est une démarche qui a au moins le mérite de la clarté.
Faire lire le prolétariat en utilisant les méthodes marketing utilisés par la grande édition. Et ils vendent. Donc ça fonctionne.
Ils combattent cette conception bourgeoise. Il la rejette. C'est assez clair dans leur discours. Même si parfois celui la est exagéré notamment chez Celui dont le nom ne doit pas être prononcé parce que ça fout la merde sur les forums. Ils défendent une conception populaire de la littérature et la littérature populaire comme une littérature aussi noble qu'une autre. Et comment défendre la littérature populaire sinon en prouvant qu'elle peut vendre et pour cela ils utilisent l'image. Peut être que la ligue c'est de l'image. Mais le but est de dire que la littérature populaire doit exister et doit avoir une place dans les médias. En fait ils bossent pour nous quelque part et ça doitdéraanger certains.
Bullshit !

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Nébal
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Message par Nébal » lun. juin 07, 2010 4:45 pm

Le_navire a écrit :Hééééé ! Mais mon p'tit cœur, on est frère et sœur de merguez, t'es fou toi ! C'est à Fabien que je disais ça, toi je t'avais parfaitement compris, hein ? C'est même pour ça que je nous voyais assis sur une borne, la merguez dans une main et le Marx dans l'autre, à faire "hinhinhin" au passage de la manif "prolétarienne" des "hauteurs" qui vendent à plus de 100 000 exemplaires...
Ah ! Ouf, Jésus peur. :)

Bon, merguez et Kapital, donc.

@ Fabien Lyraud : Mais... mais... la SF ne serait-elle pas dans ce cas atrocement (petit-)bourgeoise ? Gasp !

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Le_navire
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Message par Le_navire » lun. juin 07, 2010 4:49 pm

Tiens on a jamais évoqué sérieusement San Antonio, ici.

San-A, plus populaire, y a pas. Vendu dans les gares, jugé affreusement vulgaire par les milieux bourgeois (bon, et réac par les mecs de gauche, ça je m'en souviens encore, mais c'est pas le propos), c'est un des rares à avoir bénéficié d'études sérieuses et d'une vraie reconnaissance de son boulot avant d'avoir cassé sa pipe.

Pourquoi ?

Parce que tout le monde était d'accord pour admettre que, quoi qu'on en dise et même s'il torchait ses bouquins comme d'autres sifflent leur whisky :

1) San-A ne prenait pas ses lecteurs pour des cons : ses personnages, hauts en couleurs, étaient des reflets de leur époque, réacs, caricaturaux sans doute, mais chiadés et soulevant régulièrement des lièvres gros comme des trains de grande ligne.

2) Et qu'un type qui est capable d'écrire "la nuit était humide comme un mouchoir de veuve" est un type qui écrit foutre bien, même s'il déroule ses copies à la ligne. Et je ne vous parle même pas de tout ce que Coluche lui a piqué ("je ne la connais ni des lèvres ni des dents", "c'est vieux comme mes robes", "il est fier comme un bar tabac"...) parce que San-A inventait une langue vernaculaire d'une richesse telle qu'elle s'est faite adopter par le lecteur populaire avec une facilité incroyable, comme s'il était évident qu'il avait toujours parlé comme ça.


Le jour où Werber réussit à faire ça, et en demande reconnaissance, juré, je ferme ma gueule, et je lui donne la mienne.
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fabrice
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Message par fabrice » lun. juin 07, 2010 6:26 pm

J'arrive un peu après la bataille mais il y a un truc dont personne, ne semble-t-il, n'a encore parlé : la nécessité de différencier ceux qui pensent que l'écriture n'est qu'un moyen de raconter une histoire (et qui, donc, n'en ont rien à foutre du style) et ceux qui estiment qu'elle peut véhiculer, par sa beauté, sa complexité, une grâce ou des émotions indépendantes du récit (et je ne dis pas ça uniquement parce que je suis en train de terminer CosmoZ de Claro, un livre dont l'écriture peut, par endroits, vous faire monter les larmes aux yeux et qui - ô miracle - raconte aussi une histoire).

J'appartiens, on l'aura compris, à la seconde catégorie. BW et HL se rangent manifestement dans la première. BW l'a assez dit et répété : mort aux phrases trop longues, mort aux mots trop compliqués, le style ne sert à rien, etc. Sur facebook, il y a quelques mois, Henri nous disait tout le bien qu'il pensait du dernier roman de Marie NDiaye, phrases trop longues à l'appui, donc - je pense qu'il n'est pas nécessaire de revenir là-dessus.

Peut-être, en poussant le raisonnement un cran plus loin, peut-on même verser les écrivains en deux camps : ceux qui veulent avant tout vendre des livres, et ceux qui veulent avant tout écrire de beaux (bons) livres. La qualité et le succès ne s'excluent pas mutuellement mais au niveau des intentions initiales, un choix s'opère de façon quasi systématique, consciemment ou non, d'ailleurs.

A partir de là, il devient difficile de discuter. Quand on me demande, comme Denis Guiot l'a fait non sans élégance au début de ce thread, pourquoi je ne suis pas allé exposer mon point de vue aux intéressés, ma réponse est : parce que ça ne sert à rien. Nos positions sont irréconciliables. Je ne vais pas essayer de les convaincre - à supposer qu'ils en soient capables - de faire des phrases plus belles notamment parce, sur un plan strictement commercial, ils ont raison : ça ne sert à rien, et ils ne me convaincront jamais que McCarthy et Chattam, c'est la même chose, chacun ses goûts parce que j'aime suffoquer de bonheur et d'admiration en me grisant d'une écriture, et que je sais très bien qu'aucun des auteurs partageant leurs opinions ne m'apportera jamais ce plaisir.

Gérard Klein
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Message par Gérard Klein » lun. juin 07, 2010 6:55 pm

kibu a écrit :ça y est !
Vous m'avez donné envie de lire le tome 3 de la Moïra. Je ne vous félicite pas ! Et puis, les vacances approchant, j'ai du temps qui se libère.
Désolé Nébal, ce ne sera pas objectif.
L'énigme n'est pas là, enfin telle qu'elle est rapportée sur ce fil. Pour moi elle réside dans le fait, difficilement contestable, que quand je lis un BW récent (je ferai une exception relative pour les Fourmis) ou feuillette un HL, ces livres me tombent des mains au bout de trente pages. Or ils ont un réel succès.
Quelle différence y-a-t-il entre leurs lecteurs et moi?
Je ne crois pas une seconde à l'hypothèse marketing, totalement métaphysique. J'ai été un spécialiste et praticien du marketing et on n'en fait, en réalité, que sur ce qui marche déjà. Pratiquement jamais dans l'édition: beaucoup trop cher.

Je prendrai un autre exemple: j'ai lu les deux derniers Marc Lévy, crayon en main, au prix d'un effort héroïque (je recommande la page 394 du vol. 2 La première nuit et les quelques précédentes d'où il ressort que le système métrique était déjà utilisé par des ET humains il y a quatre cent millions d'années) et je n'arrive pas à comprendre comment ils auraient tapé à ce qu'on dit le million d'exemplaires chacun.
J'ai également lu, pour comprendre, par curiosité professionnelle, Le Da Vinci Code, avec le même effet débilitant.

Bref, je lis de teps en temps des Best-sellers pour essayer de comprendre. Pas toujours de façon ausi pénible du reste; J'ai lu avec plaisir les cinq premiers volumes d'Harry Potter dont le dernier en anglais. Pas eu le temps de lire les deux derniers.

Il ne s'agit pas ici de critiques, mais d'observations.
Encore une fois pourquoi est-ce que ceci fonctionne auprès de ceux-là, et pourquoi est-ce que cela que je tiens en bien plus haute estime ne fonctionne pas du tout ou peu?
Je pensais que c'était la question centrale de ce fil, à voir son titre.
Mon immortalité est provisoire.

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Anne
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Message par Anne » lun. juin 07, 2010 7:14 pm

Gérard Klein a écrit :
kibu a écrit :ça y est !
Vous m'avez donné envie de lire le tome 3 de la Moïra. Je ne vous félicite pas ! Et puis, les vacances approchant, j'ai du temps qui se libère.
Désolé Nébal, ce ne sera pas objectif.
L'énigme n'est pas là, enfin telle qu'elle est rapportée sur ce fil. Pour moi elle réside dans le fait, difficilement contestable, que quand je lis un BW récent (je ferai une exception relative pour les Fourmis) ou feuillette un HL, ces livres me tombent des mains au bout de trente pages. Or ils ont un réel succès.
Quelle différence y-a-t-il entre leurs lecteurs et moi?
Je ne crois pas une seconde à l'hypothèse marketing, totalement métaphysique. J'ai été un spécialiste et praticien du marketing et on n'en fait, en réalité, que sur ce qui marche déjà. Pratiquement jamais dans l'édition: beaucoup trop cher.

Je prendrai un autre exemple: j'ai lu les deux derniers Marc Lévy, crayon en main, au prix d'un effort héroïque (je recommande la page 394 du vol. 2 La première nuit et les quelques précédentes d'où il ressort que le système métrique était déjà utilisé par des ET humains il y a quatre cent millions d'années) et je n'arrive pas à comprendre comment ils auraient tapé à ce qu'on dit le million d'exemplaires chacun.
J'ai également lu, pour comprendre, par curiosité professionnelle, Le Da Vinci Code, avec le même effet débilitant.

Bref, je lis de teps en temps des Best-sellers pour essayer de comprendre. Pas toujours de façon ausi pénible du reste; J'ai lu avec plaisir les cinq premiers volumes d'Harry Potter dont le dernier en anglais. Pas eu le temps de lire les deux derniers.

Il ne s'agit pas ici de critiques, mais d'observations.
Encore une fois pourquoi est-ce que ceci fonctionne auprès de ceux-là, et pourquoi est-ce que cela que je tiens en bien plus haute estime ne fonctionne pas du tout ou peu?
Je pensais que c'était la question centrale de ce fil, à voir son titre.
Y z'avaient plus Télé7 jeux, chez le marchand de journaux?

Gérard Klein
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Message par Gérard Klein » lun. juin 07, 2010 7:22 pm

Erion a écrit : Est-ce que Loevenbruck et Werber adaptent leur écriture en fonction de leur projet, de ce qu'ils veulent dire/exprimer/faire ressentir, la réponse est oui.

Ce sont donc des écrivains.
Je ne le crois pas. Je ne crois pas qu'ils adaptent leur écriture mais simplement qu'ils ne peuvent pas écrire autrement.
J'ai une certaine expérience d'éditeur et pas seulement dans la sf, et j'ai souvent essayé de faire écrire de bons écrivains sans succès dans un style plus populaire dans l'espoir de leur sauver la mise et je n'ai pour ainsi dire jamais réussi. Chaque écrivain, bon ou mauvais, a son ton et il s'en écarte très difficilement.
À Dumas, on n'a jamais reproché son écriture, ou alors on l'a aussi parfois reprochée à Hugo. On lui a reproché ses sujets, ce qui n'est pas la même chose. Or notre point de vue sur ses sujets a évidemment radicalement changé.
Mon immortalité est provisoire.

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Sybille
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Message par Sybille » lun. juin 07, 2010 7:33 pm

La relativité...
Gérard Klein a écrit :J'ai également lu, pour comprendre, par curiosité professionnelle, Le Da Vinci Code, avec le même effet débilitant.
Mon père, qui lit très peu (de romans, l'aime les articles d'économie, de politique...) a dévoré le Da Vinci Code en une journée.
Bref, je lis de teps en temps des Best-sellers pour essayer de comprendre. Pas toujours de façon ausi pénible du reste; J'ai lu avec plaisir les cinq premiers volumes d'Harry Potter dont le dernier en anglais. Pas eu le temps de lire les deux derniers.
Pas pu avancer dans les Harry Potter, trop mal écrit à mon goût.
Il ne s'agit pas ici de critiques, mais d'observations.
Encore une fois pourquoi est-ce que ceci fonctionne auprès de ceux-là, et pourquoi est-ce que cela que je tiens en bien plus haute estime ne fonctionne pas du tout ou peu?
Face au bouquin, l'influence de la mode et des autres s'estompe ; je veux dire, la mode peut faire acheter le premier tome de Twilight, mais elle ne te fera pas dévorer tous les tomes. Et ceux, autour de moi, qui ont aimé Twilight, sont de gros lecteurs pas sots.
Bref, quand t'es face au bouquin, y'a que toi et ton plaisir, et je crois que c'est ce qu'on n'arrive pas à extraire, car ce n'est tout simplement pas possible.
Pourquoi tombe-t-on amoureux ? Pourquoi préfère-t-on les bruns aux blonds ?
Lire est un plaisir perso, contrairement aux sorties au ciné, aux randonnées entre copains. C'est presque plus perso que le sexe où, en général, on s'accorde à dire que c'est pas mal d'être au moins deux.
Moi qui aime une belle langue, et qui, je crois, la manie bien, je peux aimer des bouquins "non littéraires" juste pour l'histoire : je cite souvent, à ce propos, la Dragonlance. C'est pas super original ou bien écrit ou... mais j'y sens l'odeur de l'acier des lames, des composantes nécessaires pour les sorts, du sang sur le champ de bataille...
Et j'ai relu mille fois Papa Longues-Jambes.
La lecture fait appel à nos souvenirs, à nos émotions...
Alors peut-être que j'aime la Dragonlance parce que son héros est mon amour de 13 ans. Je n'en sais rien, mais, quand je la lis, yep, je me sens aussi bien que quand j'avais 13 ans.
Peut-être que, tout simplement, certains auteurs populaires savent toucher plus de gens parce que leurs émotions sont plus communes, qu'ils ont plus d'empathie...

Argemmios

Message par Argemmios » lun. juin 07, 2010 7:42 pm

fabrice a écrit :j'aime suffoquer de bonheur et d'admiration en me grisant d'une écriture.
Je partage ça. Totalement. J'aime rencontrer, au fil d'une lecture, des phrases d'une beauté poignante, que je me répète (à haute voix, ou en chuchotant pour ne pas déranger) à plusieurs reprises, subjuguée par ce moment de perfection, avant d'être capable de passer à la suite. Parfois, c'est une scène entière, voire un dialogue, avec des répliques qui sonnent si juste, qui touchent en plein coeur...

Et je partage aussi cette ambition de faire de beaux livres, tant sur le fond que sur la forme, à la fois en tant qu'éditrice et surtout, surtout, en tant que plume. C'est... comment dire ? Une question de respect du lecteur, de respect de l'acte d'écrire, de respect pour le langage. Certains pourraient parler de "conscience professionnelle". Il paraît que ça se perd, dans tous les corps de métiers, mais pas chez tout le monde, heureusement.

Alors ça peut sembler très injuste de voir que l'application est moins bien considérée, moins bien rémunérée, que des produits qui semblent plus "faciles", limite "baclés".

Mais peut-être qu'en matière de lecture, il en va de même qu'en matière de gastronomie ? Peut-être faut-il avoir un palais éduqué, ou naturellement subtil, pour apprécier certains mets plus raffinés ? Et d'un autre côté, je sais par expérience que la cuisine dite raffinée peut aussi vous fatiguer le foie, et que, après 2 semaines dans le sud-ouest, vous pouvez réclamer une bête knackie comme repas d'anniversaire, et la trouver absolument succulente (j'avais 15 ans, c'est une circonstance atténuante ;)).

Bon, maintenant que je mange plus souvent des knackies qu'autre chose, j'avoue que je serais prête à tuer pour une autre tranche du foie gras préparé par JCD ;)

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Le_navire
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Message par Le_navire » lun. juin 07, 2010 8:34 pm

Gérard, je suis convaincue, mais ça n'engage que moi, que la différence entre ces lecteurs et toi, c'est l'habitude. Juste l'habitude.

Ils ont l'habitude d'entendre des phrases mal tournées, des expressions vides de sens, des analyses sans profondeur, de voir des gens qui ressemblent à des poupées sans âmes, de plaquer sur leur enveloppe fabriquée des rêves de midinette et des espoirs de footballeur. Ils ont l'habitude de regarder les grandes chaînes généralistes, d'écouter les radio privées, de lire le quotidien régional, d'aller se balader à la porte de Versailles ou de visiter le musée des bonbons ou celui des pompiers.
Ils ont l'habitude qu'on leur dise de ne pas parler politique à table, ça ne se fait pas. De lire et de regarder ce qui se partage dans le consensus, pour ne pas embarrasser son voisin. Et surtout, on leur dit de ne pas compliquer la vie (j'avais tapé "vide", le lapsus était révélateur) des autres en ne compliquant pas la leur, en n'allant pas au devant des ennuis.
Ce sont des gens polis, ils font ce qu'on leur dit, ce qu'on attend d'eux.

Nous, on regarde parfois TF1, on lit la presse régionale pendant nos vacances et on emmène nos gosses au musée des bonbons par gourmandise et pour se rappeler des mistrals gagnants de quand on était mômes.

Mais ce ne sont pas nos habitudes. Parce que quand on était mômes, à nous, on a expliqué que s'intéresser à la politique, ça voulait dire participer à la vie de la cité, que plus c'est alambiqué, plus c'est intéressant, que compliquer l'existence des autres, c'est une conséquence inévitable de la vie en société, et que les ennuis se gagnent en étant curieux, comme l'expérience et le plaisir de la découverte.

La différence, c'est l'éducation qu'on a reçue. C'est tout. Je ne parle pas de culture, je parle d'éducation.

(et I'm a poor lonesome cowgirl, I'm a long long way from home, tout ça...)
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Eric
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Message par Eric » lun. juin 07, 2010 8:45 pm

Argemmios a écrit :
Bon, maintenant que je mange plus souvent des knackies qu'autre chose, j'avoue que je serais prête à tuer pour une autre tranche du foie gras préparé par JCD ;)
Je demande un test comparatif officiel avec celui de Gilles Dumay.

Je me propose pour le jury, il va sans dire.

//Fin du HS//

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Bull
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Message par Bull » lun. juin 07, 2010 8:45 pm

Gérard Klein a écrit :

L'énigme n'est pas là, enfin telle qu'elle est rapportée sur ce fil. Pour moi elle réside dans le fait, difficilement contestable, que quand je lis un BW récent (je ferai une exception relative pour les Fourmis) ou feuillette un HL, ces livres me tombent des mains au bout de trente pages. Or ils ont un réel succès.
Cher Dieu,

Tout d'abord merci d'être intervenu. J'ai lu tout ce sujet ce WE et j'ai même écouté tranquillement la conf. Et en te lisant cela m'a donné la dernière petite impulsion qui me manquait pour réagir.
La question que tu sembles poser est exactement, et malheureusement, la même question que je me pose, depuis un certain temps. Et pour moi malheureusement, cela concerne quasiment tous les livres que j'ai entre les mains. Et le "réel succès" pour moi concerne aussi bien celui auprès du grand public que celui auprès du "Fandom".

Quasiment tout ce que j'ai entre les mains me tombe des mains, alors qu'ils "devraient" me plaire.

Pourquoi ???




Derniers exemples en date :

-Les démons de Paris (Depotte) : je me suis "forcé" quasiment du début à la fin
-Vision aveugle (Watts). M'est tombé déjà une première fois des mains.

Et puis de temps en temps, un contre exemple, devenu de plus en plus rare, ici :

-"Petits entretiens avec l'éternité (Holstein) : je me suis régalé du début à la fin.
Un livre à la thématiques pourtant proche des "Démons de Paris". L'un m'a semblé être un alignement de mots, pas l'autre.

Je ne comprends sincèrement pas le pourquoi de la chose.

Et ce que je comprends probablement encore moins, c'est ce qui pousse ceux qui n'ont pas aimé tel ou tel livre à se sentir supérieur à ceux qui ont apprécié.

Vous n'avez pas aimé : ok, soit vous n'étiez pas le coeur de cible, soit vous êtes passé à autre chose.

Je prends et commence Outrage et Rebellion (Dufour), je me dis, je ne peux vaiment pas lire cela,
Je lis tout retour sur l'Horizon (Lehman, anthologie) : je me dis : c'est vraiment pas ma tasse de thé.
J'essaye deux fois de lire la Saison de la Sorcière (RCW) : je ne me dis pas "qui peut aimer ce livre où la Tour Eiffel est emporté par un dinosaur volant", je passe juste à autre chose.
Je n'arrive pas à m'identifier au personnage de "Gagner la guerre" (Jaworski), je ne me dis pas : quels sont les problèmes des lecteurs qui aiment ce livre.
Etc...

Comme c'est en SF que j'ai eu mes plus grosses claques, je continue à chercher mes "pépites" dans ce genre là.

Donc, pour renforcer ce qu'a écrit Dieu, je ne comprends pas.
Et pour moi, cette ncompréhension ne s'arrete vraiment pas à Marc Levy and Co.

Ceci dit, vraiment, quelle étrange idée cela serait que de prendre de haut ceux qui ont aimé tout ces livres qui ne m'ont pas touché.

Il y a deux point différents dans ce que vous reprochez (me semble t'il) à BW.
La qualité de l'écriture
La demande de reconnaissance littéraire.

Le deuxième point est assez facilement reglé :
Il vend n millions de livres.
Un autre autre vendant le même nombre de n millions de livres, mais en dehors de la sphère de l'Imaginaire, a très certainement droit à plus d'article dans les grands journaux généralistes. Non, ce n'est effectivement pas normal.
Nul demande injustifié d'un prix noble de littérature ici. Juste une juste demande je crois à être considéré de la même manière que les autres poids lourds. Qui pour la plupart n'écrivent pas "mieux" que BW.

Ce qui nous amène à la question de la qualité de l'écriture.
Et bien à chacun son niveau d'exigence. Ce que BW écrit est, le plus souvent, adapté à ceux qui vont le lire. Les thématiques, les personnages, les rebondissements, le déroulé de l'intrigue etc...
C'est comme cela que BW écrit. C'est ce qu'attendent ses lecteurs.
Ses livres vous tombent des mains. C'est votre droit, Ne l'achetez pas.

Moi, la plupart des romans me tombe des mains (je sais, je me répète, mais cela ne fini pas de m'étonner). Mais c'est avant tout moi même que je remets en cause : qu'est ce que je vais pouvoir trouver qui me plaise ?

Et en cherchant comme cela, je tombe sur Lilliputia (Mauméjean) ou La maison aux fenêtres de papier (Day. Attention, pas pour vos enfants).

Bref, critiquer BW and Co, je trouve cela inefficace et assez prétentieux.

Comprendre pourquoi tel ou tel livre va trouver un grand publique et pas un autre (de manière général), voire pourquoi un livre va vous plaire à coup sûr.

Ça ce serait vachement intéressant à suivre comme sujet.
Modifié en dernier par Bull le lun. juin 07, 2010 8:49 pm, modifié 1 fois.

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