Oui, le film est d'ailleurs plutôt bon.Erion a écrit :une adaptation filmée d'Extension du Domaine de la Lutte (par Philippe Harel, je crois), et la fin a été modifiée, en accord avec MH.
Je ne sais pas si qualifier Houellebecq de romantique a un sens ; le mot est tellement surchargé de références depuis deux siècles qu'il ne signifie plus rien. Mais dans La possibilité d'une île, il y a cette page qui se retrouve, sous plusieurs variations, dans tous ses autres textes, quand le personnage principal connaît brièvement le bonheur :
Un peu plus tôt dans le livre, quand le narrateur tombe amoureux, il dit de façon encore plus concise : "l'humanité, non, je n'y avais pas renoncé." Tu vois Navire ? Il suffit de lire.Pour la première fois de ma vie, je me sentais sans restrictions heureux d'être un homme, je veux dire un être humain masculin, parce que pour la première fois, j'avais trouvé une femme qui s'ouvrait complètement à moi, qui me donnait totalement, sans restrictions, ce qu'une femme peut donner à un homme. Pour la première fois aussi, je me sentais animé à l'égard d'autrui d'intententions charitables et amicales, j'aurais aimé que tout le monde soit heureux, comme je l'étais moi-même. Je n'étais plus du tout un bouffon alors, j'avais laissé loin de moi l'attitude humoristique ; je revivais en somme, même si je savais que c'était pour la dernière fois. Toute énergie est d'ordre sexuel, non pas principalement mais exclusivement, et lorsque l'animal n'est plus bon à se reproduire, il n'est absolument plus bon à rien. Il en va de même pour les hommes ; lorsque l'instinct sexuel est mort, écrit Schopenhaueur, le véritable noyau de la vie est consumé ; ainsi, note-t-il dans une métaphore d'une terrifiante violence, "l'existence humaine ressemble à une représentation théâtrale qui, commencée par des acteurs vivants, serait terminée par des automatesrevêtus des mêmes costumes." Je ne voulais pas devenir un automate, et c'était cela, cette présence réelle, cette saveur de la vie vivante, comme aurait dit Dostoievski, qu'Esther m'avait rendue. A quoi bon maintenir en état de marche un corps qui n'est touché par personne ? Et pourquoi choisir une jolie chambre d'hôtel si on doit y dormir seul ? Je ne pouvais, après tant d'autres finalement vaincus malgré leurs ricanements et leurs grimaces, que m'incliner : immense et admirable, décidément, était la puissance de l'amour.