Je sais oui. Mais, là encore, ce n'est pas pour ça qu'il fait leur donner raison. Un certain nombre de décisions aberrantes ont été prises au niveau européen, ça n'empêche rien...Erion a écrit : Tu sais que le Conseil de l'UE, c'est le principal organe de l'UE, qui rassemble les ministres et dont les décisions cadres doivent être appliquées ? Par conséquent, la Cour de Cassation peut parfaitement se servir de cette décision cadre pour refuser de transmettre une QPC concernant la loi sur le génocide arménien.
Décision purement politique, donc.Erion a écrit :Les choses sont ce qu'elles sont. Mais sur ce point, l'évocation par Badinter du risque d'inconstitutionnalité si QPC ne me semble pas très convaincant, justement par rapport à ce qui s'est passé en mai 2010.
Le seul truc qui peut sauver l'affaire, c'est que la France n'a pas inscrit la décision cadre du Conseil de l'UE dans sa législation. Très vraisemblablement, parce qu'elle ne désire pas créer un cadre général sur les génocides qui la placerait dans la ligne de mire concernant le Rwanda (pour complicité). D'où la tactique de produire une législation au cas par cas (avec tous les avantages électoraux qui vont avec).
On ne s'est pas compris sur ce point. Je ne parlais pas de décision de justice (visiblement civile) sur le négationnisme. Je parlais de décision de justice ayant ou non condamné des personnes, même par contumace ou à titre posthume, pour les crimes commis entre la fin du 19e siècle et 1915.Erion a écrit : Si. Il y a eu des décisions de justice en Argentine, en Suisse, en Belgique aussi (même si le cas est un peu baroque parce que c'est un homme politique turc qui s'estimait abusivement accusé de négationnisme). En France, dans l'affaire Bernard Lewis, le tribunal a jugé les méthodes de l'historien, mais pour cela, il lui a fallu établir la réalité historique du génocide arménien (pour évaluer si l'historien avait sciemment ignoré des preuves ou pas).
A ma connaissance, à part le procès de 1919 en Turquie, qui n'avait visé qu'une toute petite partie des faits et quelques responsables, il n'y en a pas eu (enfin, je peux me tromper).
Moralement et historiquement, en effet, non. D'un point de vue juridique, pour l'instant, si. Pas comme ça.Erion a écrit :Bref, il y a pas mal d'éléments. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas eu de procès de Nuremberg qu'on peut écarter comme ça le génocide arménien.
Là, je parlais de la loi qui est actuellement discutée au Parlement et qui vient de se prendre une brasse de la part de la commission des lois. A partir du moment où tu punis d'une peine d'amende et/ou d'emprisonnement l'expression publique d'une opinion, désolée, mais si, il y a limitation de la liberté d'opinion.Erion a écrit : Encore une fois, c'est inexact. Juridiquement, il n'y a aucune limitation à la liberté d'opinion avec la loi Gayssot.
Je crois qu'on ne se comprend pas. Les juges n'ont pas à juger l'Histoire, mais uniquement des faits. Et la loi n'a pas à dire l'Histoire.Erion a écrit : Au contraire, c'est une loi pour protéger les juges. Parce que si ce n'est pas la loi qui fournit les moyens, ce sont les juges qui doivent juger l'histoire. Ils le font régulièrement pour des problèmes assez mineurs (par exemple, le descendant d'une personnalité qui s'estime insulté par un historien ayant diffamé son ancêtre).
Je vais poser le problème autrement.
La raison d'être de la loi pénale (et j'insiste sur "pénale"), c'est de protéger la société et les citoyens en réprimant les actes susceptibles de leur porter atteinte.
Explique-moi en quoi la répression pénale d'une opinion telle que la négation d'un évènement historique, quel qu'il soit (on parle de peine de prison là, nom de dieux de merde), protège la société et les citoyens ?
On n'est pas, par exemple, dans le cadre de l'injure publique (pour quelque motif que ce soit) qui aura pour effet direct et immédiat de blesser moralement et d'humilier publiquement la personne visée, ou de porter atteinte à sa réputation, etc (je ne vais pas citer le code pénal...).
Là, quel est le dommage ? Est-ce que ça menace la sécurité de la société française ? non. Est-ce que ça porte atteinte à l'intégrité physique, morale ou financière de citoyens français ou non ? Non plus.
Est-ce que ça fait de la peine aux descendants des victimes ? Sûrement. Mais la loi pénale n'est pas faite pour que les gens se sentent bien. Seulement pour les protéger.
Au fait, ton histoire de bonhomme qui attaque un historien pour diffamation de son ancêtre, c'était devant quelle juridiction ? Civile ou pénale ? Parce que c'est très différent quand même. Et surtout, ça a donné quoi ? Parce que je suppose que ce monsieur a quand même du démontrer le préjudice allégué, qui me semble assez ardu à démontrer si les "faits" sont très anciens...
En général, la jurisprudence a tendance à considérer que lorsque l'on prend en compte l'action qui est offerte aux héritiers pour défendre la mémoire de leur auteur, on s'aperçoit que la défense des intérêts du mort passe exclusivement par la défense de ses proches vivants. Jusqu'à quel degré peut-on se considérer comme étant "proche" du défunt diffamé ? On ne peut pas ad vitam exiger le "respect" dus aux morts et leur réputation par égard envers leurs descendants. Et ça, les juges l'ont généralement très bien compris: les rares demandes qui leur sont soumises à ce titre sont, la plupart du temps, écartées quand les faits et le décès de la personne concernées sont très anciens...