yannminh a écrit :
un exemple provocateur par exemple, c'est la Joconde... qui est pour moi une oeuvre particulièrement ennuyeuse par rapport à un tableau comme celui des Ménines, mais qui est d'une valeur inestimable ne serait-ce que par son histoire...
Cela ne me semble pas un exemple provocateur, mais au contraire un très bon exemple:
La Joconde se situerait bien dans le cadre du "plus haut niveau de traitement de l'information de l'humanité", car tout le monde y trouve son compte en interprétations (et données?) informationnelles, à tous les niveaux. C'est une oeuvre d'art particulièrement réussie, il est difficile de faire mieux, si on décide de voir l'art comme cela... C'est une manière de voir les choses qui me paraît tout à fait jouable.
Cependant, elle nous rappelle, des fois qu'on l'ai oublié, que, si on veut donner une définition sérieuse de ce que l'on appelle l'Art de ci de là, on se trouve assez vite obligé de distinguer plusieurs types d'arts, et plusieurs types de publics, et plusieurs types de lectures, etc. Ce qui fait que l'on finit, au bout d'un moment, par se demander si le concept d'Art, tout court, à une très grande pertinence, et serait autre chose qu'une manière commode pour désigner des choses très disparates (ce qui est déjà ça, je l'admets!).
Je n'ai jamais trop pensé, personnellement (depuis que je me suis posé la question..) que l'art puisse être autre chose qu'une construction sociologique. Pour moi, j'en suis de plus en plus persuadé, Il n'y a pas l'"Art", même dans le sens d'un concept vague, il y a "des arts", selon les époques, les publics, les approches, etc. Il s'agit simplement (quand j'écris "simplement", je sous-entends bien sûr que c'est très compliqué, peut-être même indémêlable...) de regroupements d'objets présentant un intérêt pour des groupes sociaux (eux-mêmes variables et difficiles à caractériser, et en interaction les uns avec les autres). La désignation "Art" tout court me semble ne pas servir à grand chose.
J'aurais tendance à penser que le concept d'"Art" tout court (et prétendument "absolu", et prétendument "universel", etc) a été inventé à une époque à laquelle on manquait d'informations (on peut ironiser sur le verbe "manquer"), concept que, par respect pour nos anciens (Platon avait tort de penser que les jeunes ne respectaient plus les anciens...), on a continué à l'utiliser dans un sens "général" (à défaut d'"absolu", quand on s'est aperçu que l'on avait beaucoup de mal avec cet aspect), alors que c'est plutôt une concept sociologique (du genre regroupement d'objets où se retrouvent telles catégorie ou telle catégorie sociolologique déterminée de manière plus ou moins sophistiquée).
Cela nous ramène d'ailleurs tout naturellement à
Prometheus. Il y a des publics (qui peuvent être divers) qui verront ce film comme de l'art "réussi", dans la mesure où il aura répondu à leur attente (quelle qu'elle soit). D'autres (divers aussi) le considèreront comme"raté" (voire "nul") de leur point de vue. (sur ce forum, vu sa nature, certains participants attendaient au minimum un "bon" film de SF, vu le contrat moral (virtuel, en effet...) induit par les antécédants du réalisateur...). Les aléas de l'histoire étant ce qu'ils sont, les publics évoluant, etc,
Prometheus atteindra peut-être un jour le statut (actuel) de la Jonconde, de la Tour Eiffel
(universellement admirée aujourd'hui, alors que de très grands esprits et artistes de son époque la jugeaient hideuse...), des symphonies de Beethoven ou de Mickael Jackson. J'en doute, mais enfin, dans le principe, ça pourrait arriver, compte tenu de la vision sociologique qui est la mienne.
Oncle Joe