Roma Aeterna - Robert Silverberg

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Eons
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Message par Eons » dim. juil. 19, 2009 2:09 pm

Patrice a écrit :
Donc, un peu décevant pour un véritable amateur d'uchronie.
C'est quoi, donc, la vraie uchronie? Celle où ça se passe obligatoirement différemment?
Mais comment faire quand le propos de l'auteur est justement de montrer que c'est impossible?
J'ai dit "véritable amateur d'uchronie", pas "amateur de véritable uchronie". :roll:

Il n'y a pas de "véritable" uchronie. il y a simplement des divergences plus ou moins importantes.
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr

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Patrice
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Message par Patrice » dim. juil. 19, 2009 2:57 pm

Salut,
J'ai dit "véritable amateur d'uchronie", pas "amateur de véritable uchronie". Rolling Eyes
Ca change quoi? Si tu supposes qu'il y a des "vrais amateurs", ça laisse à penser que les "faux amateurs" aiment quoi?

Les jugements en "vrai" et "faux" sont toujours biaisés.

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Patrice

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bormandg
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Message par bormandg » dim. juil. 19, 2009 3:23 pm

Patrice a écrit :Salut,
Donc, un peu décevant pour un véritable amateur d'uchronie.
C'est quoi, donc, la vraie uchronie? Celle où ça se passe obligatoirement différemment?
Mais comment faire quand le propos de l'auteur est justement de montrer que c'est impossible?

A+

Patrice
Autrement dit qu'il veut reprendre l'idée évoquée par Barjavel dans le Voyageur imprudent: si on empêchez un architecte de construire un immeuble, un autre architecte construira le même immeuble. Personnellement, je n'y crois pas trop, sauf à envisager comme Pullmann un ange mégalomane qui a son idée à exécuter nonobstant le fait de lois naturelles différentes.
Et c'est pourquoi je préfère de très loin Pavane ou les aventures de Lord Darcy à The years of salt and rice ou à Roma eterna., toutes deux basée sur l'idée d'une structure inévitable de l'histoire qui resterait inchangée nonobstant le point de divergence. Je préfère même un "retour à l'histoire connue par le plus pur hasard" comme dans Le Complot contre l'Amérique.
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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silramil
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Message par silramil » dim. juil. 19, 2009 3:44 pm

Même s'il n'est pas inutile de connaître les intentions et la philosophie de l'auteur, il est rare que cette connaissance modifie l'opinion qu'on se forme d'un bouquin.
De plus, il me semble qu'il n'y a pas une seule conception générale de l'histoire à l'oeuvre dans ces textes disparates.

Pour prendre deux exemples précis, l'auteur postule que la conquête des Amériques est impossible dans cette ligne de temps, parce qu'un viking est devenu roi du Yucatan ; puis il met en scène quelques siècles plus tard une "Terreur" modelée sur ce qui s'est passé en France à peu près à la même époque.
Dans le premier cas, un changement radical est possible, définitif, et susceptible d'entraîner à sa suite des changements profonds.
Dans le deuxième cas, une homologie de situation initiale entraîne une crise de même nature que dans notre ligne de temps.

Je ne crois pas dès lors qu'on puisse soutenir la thèse selon laquelle Silverberg aurait une conception spécifique de l'uchronie, qu'il mettrait en scène dans différents tableaux. Selon moi, il privilégie au contraire l'effet obtenu dans un tableau à une quelconque réflexion historique. Et je ne lui en fais pas reproche : je trouve simplement que ses effets sont souvent ratés.

D'après moi, ce qui constitue l'uchronie est un jeu sur la reconnaissance des formes et des structures. L'auteur peut s'appuyer sur la culture générale de ses lecteurs (ce qui implique alors parfois des approximations et des raccourcis) ou fournir en cours de route les éléments nécessaires. Il décide ce qu'il garde et ce qu'il modifie, tout en prenant garde à ne pas trop changer ce dont il parle, car sinon cela gâcherait le plaisir du lecteur.

Si un auteur postule que certains événements se produisent malgré une modification de l'Histoire, il a intérêt à modifier quand même certaines choses, sinon il risque d'irriter le lecteur. Par exemple, malgré la mort imprévue de Bonaparte en 1798, il existe un Empereur des Français en 1808 : rien à redire à cela, mais si l'auteur décide d'appeler cet empereur Napoléon, le lecteur risque de trouver qu'on se moque de lui.

A contrario, s'il change trop de choses, il court le risque de diluer le plaisir de la reconnaissance (ou alors, il ne fait pas une uchronie). Toujours sur le même postulat, la mort de Bonaparte en 1798 pourrait difficilement justifier à elle seule une invasion massive de l'Angleterre par une coalition russo-française en 1801.

Pour résumer mon opinion, l'écriture et la lecture d'une uchronie sont des activités ludiques, dont la règle première est de jouer sur le plaisir de la reconnaissance, tout en imposant des déformations.
A mes yeux, l'échec de Silverberg n'a rien à voir avec une quelconque philosophie de l'Histoire. Il tient à des fautes de goût dans ce qu'il change et ce qu'il conserve, fautes de goût qui sont parfois des fausses notes historiques (je n'arrive toujours à avaler un Mahomet envisageant l'Islam sans qu'il y ait eu d'expansion du judaïsme, par ex), soit des extrapolations peu convaincantes (je trouve que cet Empire romain est plat et sans imagination...)
Donc c'est une uchronie, mais elle est ratée.

Enfin, pour ce que j'en dis...

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Hoêl
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Message par Hoêl » dim. juil. 19, 2009 4:33 pm

Il y a au moins un livre qui contredit ta théorie , c'est Chroniques des années noires , il n'y joue pas avec la "reconnaissance de telle ou telle période mais invente vraiment une nouvelle histoire dont l'Europe ou , en tout cas , les Européens est (sont) absente (s), et ça m'a paru tout à fait crédible , sans parler des nombreux côtés passionnants du bouquin .
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silramil
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Message par silramil » dim. juil. 19, 2009 4:49 pm

Je ne l'ai pas encore lu, mais je ne vois pas en quoi ce bouquin contredit ma description (je décris, je ne théorise pas dans mon message précédent).
Robinson postule comme point de divergence une virulence si importante pour la peste que la population européenne disparaît.
Néanmoins, il joue sur la reconnaissance quand même, puisqu'il conserve autant que possible les caractéristiques des pays et peuples qui restent.
Le plaisir de la lecture doit venir en grande partie de ce que le lecteur retrouve des choses connues (les philosophies chinoises et musulmanes, leurs conceptions politiques...) appliquées à des situations qui divergent toujours plus de l'Histoire officielle, tout en ménageant des invariants (la découverte du nouveau monde, certaines évolutions scientifiques).

Il y a peut-être un malentendu dans mon message précédent : je ne voulais pas délimiter de manière restrictive ce que peut être l'uchronie (une uchronie ambitieuse comme celle de Silverberg ou de Robinson peuvent impliquer de très grandes variations), mais simplement mettre en valeur le fait que l'écriture d'une uchronie procède non pas d'une philosophie de l'Histoire, mais de la mise en place d'effets de reconnaissance et de variation sur du connu.

(après, une philosophie de l'Histoire peut animer tel ou tel auteur, mais ce n'est pas indispensable pour qu'il y ait uchronie).
Modifié en dernier par silramil le dim. juil. 19, 2009 5:00 pm, modifié 1 fois.

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silramil
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Message par silramil » dim. juil. 19, 2009 4:59 pm

Sur le Robinson, je lis ceci, notamment, dans la critique par Sandrine Grenier dans Bifrost

"Grâce à ces quelques héros, nous allons pouvoir suivre le développement de ce monde fascinant où la puissance d'un moteur s'évalue en chameaux-vapeur, où les distances se mesurent en Li, y compris dans les royaumes musulmans, où il n'existe aucun tabou religieux sur le fait que la Terre tourne autour du Soleil, et où celui qui découvre E=mc2 est d'origine arabe. Tous les grands classiques sont au rendez-vous, de la découverte de l'Amérique à l'invention de la bombe atomique, et pourtant tout est différent, exotique, bénéficiant d'un regard résolument non occidental. Nous sommes complètement dépaysés, mais jamais en territoire inconnu, Robinson nous invitant constamment à la comparaison et à la réflexion."
http://noosfere.com/icarus/livres/niour ... re=-318975

Histoire d'enfoncer le clou, je ne conteste pas que Roma Aeterna soit une uchronie, mais bien qu'elle soit une uchronie réussie. Les extrapolations de Silverberg me paraissent trop contestables et mal foutues.

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Lensman
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Message par Lensman » dim. juil. 19, 2009 5:30 pm

silramil a écrit :Même s'il n'est pas inutile de connaître les intentions et la philosophie de l'auteur, il est rare que cette connaissance modifie l'opinion qu'on se forme d'un bouquin.
De plus, il me semble qu'il n'y a pas une seule conception générale de l'histoire à l'oeuvre dans ces textes disparates.
Ce que je voulais dire, c'est qui si le lectorat auquel il le destine n'arrive pas à se faire une idée des intentions et de la philosophie de l'auteur en lisant l'uchronie en question, ça pose tout de même un problème...
Pour que ce soit réussi, il faut que le lecteur soit en phase avec l'auteur, au moment où il lit le roman, bien sûr, pas six mois après en lisant une interview de l'auteur, pour s'exclamer: "Ah! c'est là où il voulait en venir! Finalement, le roman est réussi, dans ce cas!" Non, effectivement, le roman n'est pas réussi dans ce cas...
Il me semble que pour qu'une une chronie soit réussie, c'est une condition nécessaire (mais pas suffisante, bien sûr) que le lecteur comprenne la philosophie de l'auteur sur l'histoire, y compris si sa philosophie de l'histoire, c'est qu'il n'est pas sûr d'avoir une philosophie précise sur le sujet, et qu'il hésite fortement pour désigner les facteurs importants et ceux qui le sont moins (c'est une attitude philosophique compréhensible, et que pas mal de gens doivent partager, par ailleurs).
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Eons
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Message par Eons » lun. juil. 20, 2009 6:20 am

silramil a écrit :(...) (je trouve que cet Empire romain est plat et sans imagination...)
Donc c'est une uchronie, mais elle est ratée.
Voilà, c'est ça. :D
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr

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Lensman
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Message par Lensman » lun. juil. 20, 2009 7:41 am

Eons a écrit :
silramil a écrit :(...) (je trouve que cet Empire romain est plat et sans imagination...)
Donc c'est une uchronie, mais elle est ratée.
Voilà, c'est ça. :D
J'ai exactement le même avis, à ceci près que trouve ça réussi. Mais c'est subjectif...
Oncle Joe

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silramil
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Message par silramil » lun. juil. 20, 2009 9:01 am

Lensman a écrit : Il me semble que pour qu'une uchronie soit réussie, c'est une condition nécessaire (mais pas suffisante, bien sûr) que le lecteur comprenne la philosophie de l'auteur sur l'histoire, y compris si sa philosophie de l'histoire, c'est qu'il n'est pas sûr d'avoir une philosophie précise sur le sujet, et qu'il hésite fortement pour désigner les facteurs importants et ceux qui le sont moins (c'est une attitude philosophique compréhensible, et que pas mal de gens doivent partager, par ailleurs).
Oncle Joe
OK sur le principe, mais comme je le disais, ce n'est pas très cohérent dans R A : Silverberg change d'orientation un peu à chaque texte, ce que je ne lui reproche pas en soi (il fait ce qu'il veut et chaque texte peut être indépendant), mais qui indique, à mon sens, qu'il n'est pas hésitant sur la question des facteurs importants dans l'Histoire, mais qu'il se fiche de la cohérence et lui préfère la recherche des effets les plus frappants.(compte tenu du fait que ça a été écrit en plus d'une dizaine d'années, c'est normal, mais je refuse d'accepter l'idée que ces textes peuvent servir à illustrer une thèse précise sur l'Histoire ; il y en a autant que de textes, voire plus).

Donc, comme uchronie, c'est faible, voire rebutant (Mahomet... le Roi viking au Yucatan...).
Comme fiction, c'est parfois correct, parfois raté. Donc ici, la recherche d'effet dramatique n'a pas relevé une logique temporelle défaillante (comme dans certains textes funs et délirants de La Patrouille du temps, par ex).

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Message par bormandg » lun. juil. 20, 2009 12:38 pm

Hoêl a écrit :Il y a au moins un livre qui contredit ta théorie , c'est Chroniques des années noires , il n'y joue pas avec la "reconnaissance de telle ou telle période mais invente vraiment une nouvelle histoire dont l'Europe ou , en tout cas , les Européens est (sont) absente (s), et ça m'a paru tout à fait crédible , sans parler des nombreux côtés passionnants du bouquin .
Parce qu'il fait exactement ce que je récuse: exprimer que même en enlevant les Européens on ne change pas l'histoire. :twisted:
"If there is anything that can divert the land of my birth from its current stampede into the Stone Age, it is the widespread dissemination of the thoughts and perceptions that Robert Heinlein has been selling as entertainment since 1939."

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Message par Eons » lun. juil. 20, 2009 3:56 pm

bormandg a écrit :
Hoêl a écrit :Il y a au moins un livre qui contredit ta théorie , c'est Chroniques des années noires , il n'y joue pas avec la "reconnaissance de telle ou telle période mais invente vraiment une nouvelle histoire dont l'Europe ou , en tout cas , les Européens est (sont) absente (s), et ça m'a paru tout à fait crédible , sans parler des nombreux côtés passionnants du bouquin .
Parce qu'il fait exactement ce que je récuse: exprimer que même en enlevant les Européens on ne change pas l'histoire. :twisted:
:shock:
L'Histoire dans Chroniques... est très différente de la nôtre. On retrouve certes un progrès technologique à peu près équivalent (ce qui est somme toute logique, vu la divergence relativement proche), mais les sociétés décrites sont très différentes.
Contrairement à Roma…, à aucun moment on n'y a l'impression de retrouver un environnement familier.
Les beaux livres, c’est aussi par ici : www.eons.fr

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Message par Hoêl » lun. juil. 20, 2009 5:32 pm

Eons a écrit :
bormandg a écrit :
Hoêl a écrit :Il y a au moins un livre qui contredit ta théorie , c'est Chroniques des années noires , il n'y joue pas avec la "reconnaissance de telle ou telle période mais invente vraiment une nouvelle histoire dont l'Europe ou , en tout cas , les Européens est (sont) absente (s), et ça m'a paru tout à fait crédible , sans parler des nombreux côtés passionnants du bouquin .
Parce qu'il fait exactement ce que je récuse: exprimer que même en enlevant les Européens on ne change pas l'histoire. :twisted:
:shock:
L'Histoire dans Chroniques... est très différente de la nôtre. On retrouve certes un progrès technologique à peu près équivalent (ce qui est somme toute logique, vu la divergence relativement proche), mais les sociétés décrites sont très différentes.
Contrairement à Roma…, à aucun moment on n'y a l'impression de retrouver un environnement familier.
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Message par kibu » lun. juil. 20, 2009 5:49 pm

Il faut m'expliquer ce que vous entendez par très différente les gars... Parce que franchement, je trouve que ce n'est pas si évident que cela. Une relecture ne serait pas de trop, AMHA.
Je vous le conseille...
A l'envers, à l'endroit

Ô Dingos, ô châteaux

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