Mélanie a écrit :silramil a écrit :Quant à l'explication fournie par les mythologies de fantasy, c'est toujours un dispositif narratif de justification dissimulant l'irrationalité fondamentale du monde. Si des dieux ont créé le monde et ses habitants, ils sont responsables des conventions physiques : en priant ces dieux, on peut obtenir des miracles, c'est-à-dire de s'affranchir de ces conventions, ce qui signifie que ce n'est que de manière temporaire et arbitraire que ce qu'on prend de prime abord pour des lois physiques s'appliquent en général. Une intervention divine n'implique pas de revoir tout le système des lois - ce n'est que la manifestation du fait que tout l'édifice physique repose sur le bon vouloir d'entités surnaturelles.
Une question d'ailleurs, comme ça fait plusieurs fois que tu parles d'intervention divine. Il y en a tant que ça, des dieux, en fantasy ? Il me semble que c'est fréquent sans être systématique pour autant. Quand je lis tes explications à ce sujet, ça me fait tout de suite penser à la série de Chalion de Lois McMaster Bujold, dont l'un des ressorts est la possibilité, en priant les dieux, de les faire intervenir - mais ce n'est jamais sans conséquences. Mais sinon, je vois pas mal de romans de fantasy ou la question de la divinité n'intervient jamais. C'est plutôt comme si les lois naturelles de ces univers étaient différentes, mais on ne parle pas de dieux pour autant.
Oui, tu as raison. J'ai de ce point de vue une déformation due à ma pratique du jeu de rôles, dans lequel l'arrière-plan mythologique est toujours précisé, puisque les JDR fonctionnent comme des nomenclatures destinées à devenir des matrices narratives.
J'ai par ailleurs toujours en tête l'univers de Pratchett, qui joue justement avec ce type de représentation maximaliste. Pratchett me paraît un bon guide pour réfléchir à la création en fantasy, en raison justement de ses tendances parodiques.
Enfin, je parlais plus spécifiquement de l'heroic fantasy : dans la belgariade ou les romans de Moorcock, les dieux interviennent et expliquent un certain nombre de règles (auxquelles ils sont souvent soumis aussi) - ces règles sont aux lois physiques ce que les rituels de sorcellerie sont aux expériences scientifiques - ça ressemble de loin, mais ça n'a rien à voir.
Et on peut trouver des exemples de dieux intervenant dans le quotidien dans la fantasy urbaine. Sans parler de Neil gaiman, je pense par exemple à Wonderful, de david Calvo, dont le pivot narratif est la révélation que les représentations rationnelles humaines ne sont qu'une aberration temporaire due à la maladie d'une divinité et que le monde suit bien d'autres règles, en rapport avec le bon vouloir des planètes.