Mais là, il me semble qu'il y a un glissement perceptible dans ton raisonnement, Tonton : tu parles des lecteurs, plutôt que des textes, en disant : voilà comment la plupart des gens lit la SF. Cela ne signifie pas pour autant que la SF se réduit à cette dimension "affective et ludique" que la majorité de ses lecteurs (qui au passage ne sont pas légion, en France, on le sait bien) y trouve.Lensman a écrit : La SF n'est pas tellement un littérature du raffinement littéraire. Elle peut évidemment l'être, ponctuellement, mais ce n'est pas si fondamental. C'est par contre une littérature d'un grand investissement affectif et ludique.
Quand on dit ça, on est en porte à faux avec la notion même de littérature, et les critiques "prescripteurs" ont une moue de mépris, un geste de rejet. Admettre une littérature "non littéraire"! Ils se feront tailler en pièces sur place plutôt que de céder, et au fond, ils auront bien raison. Il ne s'agit pas du même type de culture.
Attention aux représentations biaisées que l'on peut se faire, au travers d'un tout petit milieu, d'un mico-milieu de gens qui apprécient la SF ET ont un intérêt puissant pour la Littérature (Joyce et toutes ces choses). Je ne suis nullement certain qu'ils soient représentatifs de grand chose à part d'eux-mêmes (c'est déjà ça, et c'est une excellente chose, par ailleurs).
Oncle Joe
Pour ma part, je ne cherche pas à être "représentatif" de quoi que ce soit, mais à montrer que malgré (et peut-être paradoxalement grâce à) tout ce qui les distingue de ce que tu appelles la "grande" littérature, les oeuvres de SF peuvent être lues comme des oeuvres littéraires, parce qu'elles en sont, qu'on le veuille ou non, à partir du moment où elles engagent un rapport fictionnel au monde. Il n'y a aucun "mépris" là-dedans ; il me semble justement que le mépris est du côté de ceux qui, de part et d'autre, considèrent que la SF n'a rien à voir avec la littérature, en disqualifiant tantôt la SF (des textes pour ados mal dégrossis), tantôt la littérature (verbiage inutile, etc).
Et Lem a raison, c'est en train de changer. De plus en plus d'études, d'articles, de thèses prennent la SF au sérieux, la considèrent comme une branche de la littérature, tout en lui reconnaissant un statut à part ; pourquoi cette acceptation serait-elle gênante ?