Lensman a écrit :Lem a écrit :C'est une nouvelle de SF parce que quand on la lit, on sait que c'en est. C'est comme ça que le label a été attribué tout au long de l'histoire du genre et procéder de cette manière pour écrire une Histoire ne me semble pas hors de propos.
Je dirais plutôt parce qu'on est un lecteur de SF, qu'on a une habitude, plus ou moins développée, de ce type d'interrogation sur le référent, que la nouvelle n'est pas publiée n'importe où et n'importe comment, etc.. Cette nouvelle ne sort pas de nulle part, un texte, ça ne fonctionne pas "en soi". Il s'inscrit dans toute une évolution du genre…
Nos points de vue semblent assez complémentaires, pour le coup.
Tu dis qu'un texte SF ne fonctionne pas "en soi". C'est aussi mon avis puisque j'ai écrit plus haut que je ne cherche pas à déterminer si tel ou tel texte est
intrinsèquement de la SF.
Tu dis que l'habitude de lecture et la prise en compte des indices éditoriaux fait partie du processus. Moi aussi.
Cela dit, il faut veiller à ne pas oublier une chose aussi simple qu'importante sur ce sujet : il n'y pas toujours eu "la science-fiction". La raison pour laquelle Gernsback est fondateur, c'est précisément celle-là : il prend des textes épars, les rassemble sous un label, montre ce qu'ils partagent et c'est bien la désignation de ce fond commun qui crée la science-fiction. Renard a fait la même chose, sur un plan purement littéraire, dix sept ans avant, hors toute considération éditoriale : il a pointé du doigt quelques œuvres et dit : "ici, il y a quelque chose de nouveau, un genre littéraire en germe". Et ce qui est très intéressant, ce qui prouve qu'il parle de la même chose que nous, c'est qu'il écarte les satires et les utopies de sa liste pour les mêmes raisons que nous (parce que l'émotion de lecture n'est pas exactement la même). Dans le cas de Renard comme celui de Gernsback, le geste créateur, c'est la définition d'un corpus de référence, l'invention d'un nom, la mise en évidence d'un effet cognitif qui implique "scientifique" et "merveilleux" et la liaison avec l'impact de la science sur la société pour dire "c'est la littérature de notre temps".
Après Gernsback, le genre s'autonomise et commence à suivre sa propre dynamique. On peut alors assister à des classements de textes, ou des effets éditoriaux très particuliers. Une histoire peut-elle classée SF uniquement parce qu'elle est publiée sous le label (sans rien présenter de caractéristique sur le plan du contenu) ? Est-ce le cas de la nouvelle de Bixby, par exemple ? Si elle avait été dès le début publiée sous le label horreur, aurait-on jamais songé à la ranger dans la SF ? C'est possible, mais j'en doute (le genre est annexionniste). Et de toute façon, ce n'est pas le problème. Dans la mesure où je me place du point de vue de la SF, je ne cherche pas à résoudre le problème insoluble de l'analyse des composants. Si un texte fait partie de l'histoire du genre, eh bien, c'est qu'il est dedans. On ne va pas replacer
L'homme démoli de Bester dans la fantasy sous prétexte que c'est un roman sur les pouvoirs psi et que ceux-ci ne sont plus considérés comme un sujet scientifique aujourd'hui. Et si demain, je décide d'écrire moi aussi un thriller avec des télépathes et des précogs, même en sachant que les pouvoirs psi sont déclassés en tant que sujet SF, ce sera quand même de la SF, si tel est mon souhait. Ce n'est pas une affaire de composants mais de façon d'écrire (et de lire).
Est-ce que tu inclus la Fantasy dans la SF (telle que tu la vois)? si non, pourquoi?
J'aurais tendance à dire que j'inclus les titres qui ont été considérés comme faisant partie de la SF et ont eu une influence sur elle. Hodgson, Burroughs, Merritt, certains textes de Lovecraft, de Vance, de LeGuin, de Wolfe pourquoi pas ? En France, un roman comme Ptah Hotep, certains textes de Brussolo ou, pour revenir plus loin en arrère, une partie de Jean Ray, Malpertuis par exemple. Je ne suis pas du tout un puriste. Je mets dans la SF ce qu'elle même y a mis. In fine, mon principe de définition n'a d'autre but que de retrouver le critère intuitif sur lequel le genre s'est construit lui-même.