Bonjour Francis et merci de ton (on ne se connaît pas mais je suis l'usage forumesque, j'espère que tu ne t'en formaliseras pas!) intervention.
On pressentait effectivement
chez moi que les deux milieux, polar et SF étaient différents (j'ignore quasiment tout du premier) - et si WP n'avait pas planté, j'aurais eu une réponse autrement plus argumentée que le minable article réducteur de trois lignes par lequel j'ai dû la remplacer. Cela génère forcément des attitudes différentes, notamment cet aspect communautaire de la SF qui implique probablement beaucoup plus que tout auteur est ou a été un fan à la base. C'est très sympa parce que tout le monde est accessible, cela peut aussi générer des copinages et un amateurisme (au sens: pas d'argent pour faire les choses) qui ne servent pas forcément la Cause. Avantages et inconvénients des petits milieux, bref, rien de neuf.
Je trouve pour ma part en revanche que les dédicaces restent particulièrement utiles en terme de promotion, d'image et surtout de rencontre. Les deux tiers des lecteurs qui repartent avec un de mes bouquins ou, à défaut, la carte de mon site pour lire les textes en accès gratuit parce qu'ils sont fauchés, sont des personnes que jamais je n'aurais pu toucher par d'autres biais. On peut penser que dix lecteurs par jour (c'est une moyenne), c'est peu, mais vingt fois dans l'année, plus le bouche à oreille et la relation qui va s'établir et, espérons-le, se pérenniser à travers les réseaux sociaux et le blog, je trouve ça au contraire d'une importance capitale en terme de communauté.
Avec cette activité online que je considère indissociable des rencontres IRL, je me suis aperçu que je me vois comme un proprio de bar qui anime un peu la conversation des habitués et accueille les nouveaux. Bien sûr, il faut que les clients commandent un verre pour que la boutique tourne (faut que je gagne ma vie), sinon je suis obligé de fermer, mais ce n'est pas le but premier du site, ni de mes déplacements (même si je suis évidemment ravi quand ça marche).
Après, je suis chez de petits éditeurs sans diffusion / distribution; notre façon de faire est forcément différente, avec une collaboration réelle avec les blogueurs, etc., et je ne prétends pas comparer les échelles. De plus, là encore c'est peut-être dû à une dynamique différente des deux milieux, notamment le fait qu'à ma connaissance, l'imaginaire est largement plus ghettoisé que le polar, ce qui implique d'aller chercher les lecteurs réticents par la main et les convaincre que non, ce n'est pas sale.
Dans cette dynamique et ce milieu, les salons du livre tels qu'ils sont conçus actuellement restent encore très utiles à mon sens. Ne serait-ce qu'à travers les festivals grand public où, quasiment tous les ans, il faut reprendre une partie de "l'éducation" aux fondations: qu'est-ce que l'imaginaire, pourquoi c'est une vraie littérature, pourquoi c'est bien et intelligent. Il y a un véritable travail de fond dont on commence tout juste à voir les fruits mais qu'il faut maintenir en permanence (et contre laquelle - je vais me faire taper mais tant pis - l'attitude clanique de l'Initié Qui Sait joue hélas pas mal).
Ce qui ne signifie pas que l'imaginaire n'arrivera pas un jour à la même situation que le polar ni qu'on ne peut pas envisager d'autres façons de faire, bien sûr. Il existe assurément des salons d'imaginaire pleins de bonne volonté mais un peu improductifs, souvent à cause d'un enthousiasme que dépasse de très loin la modestie des moyens. Pour moi, c'est le jeu.
Lionel Davoust