Avec Le Rat mangeur de noms, Claire Ubac nous avait charmé à travers une histoire drôle et ludique à la fois, puisqu'elle abordait les rapports entre les mots et les objets. Avec L'Histoire impossible à peindre, elle revient avec une histoire différente pour des enfants un peu plus grands. Dans ce magnifique récit à tiroir (plusieurs histoires dans une histoire), elle aborde le thème des contes, contes classiques et modernes.

Un talent peut s'avérer devenir un fardeau

Jala habite dans le Royaume d'Urcande, un pays mélangeant modernité et tradition. Orpheline, elle possède un don: elle peint comme personne. Grâce à son talent de dessinatrice, la reine la choisit comme héritière. Dans ce royaume matriarcal, la tradition veut que seules les femmes gouvernent. Pour faire fuir les prétendants, la jeune fille doit utiliser son talent. Jala doit ainsi dessiner chaque histoire contée par les jeunes aspirants. Les princes se suivent, les jeunes hommes de tous les royaumes environnants poussent la porte du château, mais personne ne parvient à destabiliser la jeune fille. Jusqu'au jour où Jala commence à douter du bien-fondé des traditions. À ce moment-là, arrive un jeune berger, un conteur hors pair.

Un conte peut en cacher un autre

Claire Ubac nous offre ici un conte des temps modernes ou plutôt plusieurs contes. Car à travers une trame principale, l'auteur réussit un exercice difficile, celui d'y ajouter quatre petites histoires totalement différentes les unes des autres. Ces nouvelles sont des petites merveilles pleines de poésie et d'humour. L'histoire d'une jeune fille invisible qui trouvera l'amour auprès d'un aveugle, celle d'un grand-père qui affronte sa peur de la mort pour sa petite fille, celle d'une jeune fille qui lèvera la brume qui pèse depuis des années sur son village ou bien encore l'histoire de Loubilou, l'œil qui voulait faire le tour du monde et qui va vivre le plus fabuleux des voyages. Surprenants, drôles ou intenses, ces petits contes modernes apportent une petite touche de grâce à l'histoire principale.

J'avoue avoir adoré les aventures de Loubilou, cet œil naïf qui découvre "l'Australie" grâce à des kangourous (des souris grises), qui manque de se noyer en traversant la "Mer Rouge" (une délicieuse gelée de groseille) ou bien encore qui fait la connaissance d'un "hippotame" (qui croasse et a des yeux globuleux). Un jardin peut sembler très grand, voire à l'échelle planétaire quand on est tout petit.

Quant au récit de Jala, il aborde avec ingéniosité le rapport entre la femme, l'homme et le pouvoir. La jeune héritière devra faire un choix important. Courageuse et ingénieuse, elle ne choisira peut-être pas le chemin le plus facile, mais cela vaut le coup non? L'Histoire impossible à peindre est un roman riche qui aborde de nombreux concepts: les contes, les rapports homme-femme, la manière de voir notre monde... Un très bon et très beau livre à découvrir.