C’est l’histoire d’un come-back littéraire. Il y a dix ans, en 1997 et 1998, Jean-Michel Calvez publiait coup sur coup deux romans au Fleuve Noir : Huis clones et Planète des vents. L’accueil n’avait pas été très bon à l’époque. Pour autant cela n’a pas découragé cet ingénieur en construction navale né en 1961 et qui a par la suite publié de nombreuses nouvelles (dont certaines très remarquées comme dans l’anthologie Parfums Mortels). En 2006, les éditions Rivière Blanche lui ont redonné sa chance côté roman en publiant La Boucle d’octobre, suivi par les éditions Glyphe avec cet étonnant STYx.
L’homme et les Lutins
Depuis que l’homme a réussi à franchir les barrières des longs trajets dans l’espace, il essaie de s’implanter sur toutes les planètes où il peut faire du profit en l’exploitant. Orfeu est un de ces colons partis vivre loin de la Terre. Il travaille comme journaliste sur une planète où les humains doivent cohabiter avec la population locale : les Lutins. Malgré leurs différences, les deux peuples parviennent à maintenir la paix. Un équilibre fragile qui est en train de se fissurer à cause de STYx, une étrange maladie qui frappe les nouveaux arrivants. Parce que son ami est touché par STYx, Orfeu cherche à comprendre le fléau mais également par ricochet les Lutins. Et parce qu’Orfeu est son frère, Lucio prendra plus tard la relève dans cette quête.
Noirceur
STYx est un roman étonnant. Il nous emmène en pleine science fiction avec non pas un mais deux personnages principaux qui vont faire la même démarche pour comprendre les autochtones, l’un continuant l’œuvre de l’autre tout en refaisant tout seul une partie du chemin. Cela donne un aspect un peu déséquilibré au livre, la partie consacrée à Orfeu étant un peu moins longue que celle de Lucio. Cette double quête initiatique à la découverte de l’autre se mêle avec le mystère du mal qui décime les colons. Une maladie intrigante qui se transmet mentalement lorsque l’on « ressent » de la pitié ou de l’amour pour un Lutin, et dont Jean-Michel Calvez explore non seulement les aspects médicaux (un peu bancals) mais aussi toutes les conséquences sociales et même politiques. Il met en exergue la perte de l’être aimé, mais aussi comment certains Lutins vont jusqu’à torturer et tuer les malades en phase terminale, comment ceux-ci sont rejetés par leurs propres amis par peur de la contamination, comment cela affecte l’économie et les comportements, et comment cela menace la position même du gouverneur humain.
Evidemment, et Jean-Michel Calvez le reconnaît très rapidement dans le livre, STYx n’est pas sans rappeler le drame du Sida. Mais pour l’aborder, il a le mérite de prendre une piste décalée. Orfeu n’enquête pas vraiment sur STYx au niveau médical. Il essaie dans un premier temps d’en cerner les contours pour faire écho à son propre drame, la perte de l’être aimé. Et puis lorsqu’il couvre le procès de trois Lutins qui ont assassiné un malade, il se lance dans une vengeance elle-même horrible. C’est d’ailleurs l’un des aspects les plus intéressants du livre. Le héros commet des atrocités, mais elles le conduisent à mieux connaître le monde des Lutins. Comme si sa violence l’amenait à plonger plus loin qu’aucun autre dans une société extraterrestre. Jean-Michel Calvez refuse ainsi tout manichéisme à ses personnages. Son premier héros n’en est pas vraiment un tout comme Lucio d’ailleurs. Juste des hommes avec des sentiments forts, même dans la haine, mais avec également une soif de comprendre intarissable.
C’est donc un roman étrange car on ne peut pas complètement s’identifier aux personnages, tout du moins à leur face obscure. On aime leur quête, moins leur violence. Néanmoins parce qu’il y a tout l’exotisme du monde des Lutins à découvrir, on s’enfonce agréablement dans les pages de STYx, curieux rapidement de connaître le final vers lequel Jean-Michel Calvez nous conduit et se délectant de quelques images particulièrement fortes comme ces vieux Lutins qui semblent dormir à longueur de journée à l’air libre, le porteur de petites fioles contenant les cendres de ses pairs ou bien encore l’ombre des monts Kearsen qui ressemblent à des crocs sanglants. On lui reprochera simplement quelques longueurs et des langueurs qui alourdissent la narration.
STYx est au final la preuve que Jean-Michel Calvez a des choses à dire et une voix qui lui est propre. On le savait excellent novéliste, on le découvre en romancier prometteur. Un auteur décidément à suivre.
L’homme et les Lutins
Depuis que l’homme a réussi à franchir les barrières des longs trajets dans l’espace, il essaie de s’implanter sur toutes les planètes où il peut faire du profit en l’exploitant. Orfeu est un de ces colons partis vivre loin de la Terre. Il travaille comme journaliste sur une planète où les humains doivent cohabiter avec la population locale : les Lutins. Malgré leurs différences, les deux peuples parviennent à maintenir la paix. Un équilibre fragile qui est en train de se fissurer à cause de STYx, une étrange maladie qui frappe les nouveaux arrivants. Parce que son ami est touché par STYx, Orfeu cherche à comprendre le fléau mais également par ricochet les Lutins. Et parce qu’Orfeu est son frère, Lucio prendra plus tard la relève dans cette quête.
Noirceur
STYx est un roman étonnant. Il nous emmène en pleine science fiction avec non pas un mais deux personnages principaux qui vont faire la même démarche pour comprendre les autochtones, l’un continuant l’œuvre de l’autre tout en refaisant tout seul une partie du chemin. Cela donne un aspect un peu déséquilibré au livre, la partie consacrée à Orfeu étant un peu moins longue que celle de Lucio. Cette double quête initiatique à la découverte de l’autre se mêle avec le mystère du mal qui décime les colons. Une maladie intrigante qui se transmet mentalement lorsque l’on « ressent » de la pitié ou de l’amour pour un Lutin, et dont Jean-Michel Calvez explore non seulement les aspects médicaux (un peu bancals) mais aussi toutes les conséquences sociales et même politiques. Il met en exergue la perte de l’être aimé, mais aussi comment certains Lutins vont jusqu’à torturer et tuer les malades en phase terminale, comment ceux-ci sont rejetés par leurs propres amis par peur de la contamination, comment cela affecte l’économie et les comportements, et comment cela menace la position même du gouverneur humain.
Evidemment, et Jean-Michel Calvez le reconnaît très rapidement dans le livre, STYx n’est pas sans rappeler le drame du Sida. Mais pour l’aborder, il a le mérite de prendre une piste décalée. Orfeu n’enquête pas vraiment sur STYx au niveau médical. Il essaie dans un premier temps d’en cerner les contours pour faire écho à son propre drame, la perte de l’être aimé. Et puis lorsqu’il couvre le procès de trois Lutins qui ont assassiné un malade, il se lance dans une vengeance elle-même horrible. C’est d’ailleurs l’un des aspects les plus intéressants du livre. Le héros commet des atrocités, mais elles le conduisent à mieux connaître le monde des Lutins. Comme si sa violence l’amenait à plonger plus loin qu’aucun autre dans une société extraterrestre. Jean-Michel Calvez refuse ainsi tout manichéisme à ses personnages. Son premier héros n’en est pas vraiment un tout comme Lucio d’ailleurs. Juste des hommes avec des sentiments forts, même dans la haine, mais avec également une soif de comprendre intarissable.
C’est donc un roman étrange car on ne peut pas complètement s’identifier aux personnages, tout du moins à leur face obscure. On aime leur quête, moins leur violence. Néanmoins parce qu’il y a tout l’exotisme du monde des Lutins à découvrir, on s’enfonce agréablement dans les pages de STYx, curieux rapidement de connaître le final vers lequel Jean-Michel Calvez nous conduit et se délectant de quelques images particulièrement fortes comme ces vieux Lutins qui semblent dormir à longueur de journée à l’air libre, le porteur de petites fioles contenant les cendres de ses pairs ou bien encore l’ombre des monts Kearsen qui ressemblent à des crocs sanglants. On lui reprochera simplement quelques longueurs et des langueurs qui alourdissent la narration.
STYx est au final la preuve que Jean-Michel Calvez a des choses à dire et une voix qui lui est propre. On le savait excellent novéliste, on le découvre en romancier prometteur. Un auteur décidément à suivre.