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Découvrez les éditions Musidora avec Nicolas Tellop
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Découvrez les éditions Musidora avec Nicolas Tellop

Toute nouvelle maison d'édition dans le paysage des littératures de l'imaginaire, découvrez les éditions Musidora.
Actuellement, son premier ouvrage, L'Anachronopète, est en cours de financement sur Ulule jusqu'au 14 avril prochain.

Actusf : Première question, mais pas des moindres. Qu’est-ce que les éditions Musidora ? Qui se cache derrière ?

Nicolas Tellop : Les éditions Musidora, c’est une hydre à deux têtes. L’une s’appelle Yann Serizel et l’autre porte mon nom. En convoquant le pseudonyme d’une fameuse actrice du cinéma muet et muse des surréalistes, célèbre en particulier pour son rôle d’Irma Vep dans Les Vampires de Louis Feuillade, nous affichons l’ambition de publier des livres qui ont à voir avec l’imaginaire, sans aucune œillère. Bien sûr, nous allons faire la part belle aux principaux genres, comme c’est déjà le cas avec la science-fiction pour L’Anachronopète. Mais nous comptons aussi nous orienter vers des récits qui échappent à ces catégorisations et qui définissent plus largement un autre rapport au monde et à la réalité. Bref, de la fiction. Pour résumer, avec les éditions Musidora, nous souhaitons inviter les lecteurs à la (re)découverte de textes rares, inédits ou oubliés, qui nous semblent capables de nourrir le réel en abolissant les frontières communément admises.

Actusf : Pouvez-vous s'il vous plaît nous dire un mot sur comment l'aventure a commencé ? Pourquoi vous lancer dans l’édition ?

Nicolas Tellop : Lorsque Yann et moi étions étudiants, il y a de cela près de 25 ans, nous échafaudions en compagnie d’autres camarades des tas de projets, tous plus farfelus les uns que les autres. Créer une maison d’édition en faisait partie, et ce n’était pas notre rêve le moins raisonnable. Nous lisions alors beaucoup de littérature policière, fantastique ou de science-fiction (et au-delà) que nous ne pouvions souvent pas trouver ailleurs que chez les bouquinistes. Comme nous étions ébahis par les découvertes que nous faisions et scandalisés en constatant que, pour beaucoup, elles n’étaient plus éditées, nous fantasmions une maison dont le but aurait consisté à sauver ces titres du cimetière des livres oubliés. La vie en a décidé autrement, nous obligeant à remiser, pour un temps, toutes nos idées un peu folles. Et puis, il y a dix ans, j’ai commencé à croire de nouveau à mes rêves, mais en cherchant cette fois-ci à les concrétiser. Cela m’a permis d’évoluer dans le monde de la presse et de l’édition et d’acquérir suffisamment d’expériences pour décider que, peut-être, il serait temps d’exhumer ce projet. Alors que j’avais déjà quelques idées en tête, dont L’Anachronopète, un jour que je discutais avec Yann, je me suis aperçu qu’il repensait, lui aussi, à cette vieille histoire de maison d’édition. J’y ai vu un signe et lui ai proposé d’unir nos forces pour y parvenir. On ne serait pas trop de deux pour mener à bien l’aventure qui nous attendait.

Actusf : L’Anachronopète, un roman d'Enrique Gaspar, classique de la littérature de l’imaginaire, est assez peu connu du public. Pourquoi choisir ce roman pour inaugurer votre catalogue ?

Nicolas Tellop : Avec L’Anachronopète, nous annonçons clairement la ligne éditoriale de Musidora, tracée en direction de la curiosité pour les trésors cachés. En d’autres termes, nous avons jeté notre dévolu sur ce roman précisément parce qu’il n’était pas connu. Pour être plus exact, il n’avait encore jamais été traduit en français. En Espagne, c’est un classique, toujours édité, qui retrouve même une nouvelle jeunesse grâce à la récente série télévisée El Ministerio del Tiempo (littéralement Le Ministère du temps). Dans les pays anglo-saxons, sans être célébrissime, le roman est reconnu pour la place primordiale qu’il occupe dans l’histoire de l’imaginaire. Il s’agit là en effet du premier roman à faire intervenir une machine à voyager dans le temps. Et non seulement l’auteur, Enrique Gaspar, peut se targuer de l’antériorité, mais en plus il définit déjà tous les thèmes et les motifs associés aujourd’hui au genre : paradoxes temporels, rétroactions, influences du futur sur le passé… Le tout en 1887, quelques années avant H.G. Wells. C’est très impressionnant.

Actusf : Pouvez-nous parler un peu de son intrigue ?

Nicolas Tellop : L’action se déroule en 1878, à Paris, pendant l’Exposition Universelle. Un savant espagnol, Don Sindulfo, s’apprête à inaugurer sa grande invention : une machine à remonter le temps. Avec lui, il emmène son fidèle ami et assistant Benjamin, sa pupille, la jeune et belle Clara, et leur domestique haute en couleur Juanita – et quelques invités surprise. Commence alors un incroyable voyage à travers le temps mais aussi autour du monde, où rien ne se déroule tout à fait comme prévu et où l’Histoire elle-même se montre sous un jour inattendu. On est donc dans un roman d’aventures à la Jules Verne, auquel Gaspar adresse d’ailleurs de multiples clins d’œil (ce n’est pas pour rien si l’action commence à Paris). Sauf que même l’auteur des Voyages Extraordinaires n’avait pas pensé à cette excursion des plus spectaculaires : celle qui consiste à voyager dans le temps. Et puis, le récit donne lieu à de nombreux moments de comédie, puisque L’Anachronopète est aussi une histoire d’amour contrarié et contrariante, comme il y en a beaucoup au théâtre. Il faut dire que, avant de devenir un roman, L’Anachronopète avait connu une première existence sous forme de zarzuela, l’équivalent espagnol de l’opéra-comique. Autant de choses qui assurent un authentique plaisir de lecture.

Actusf : Pour ce projet, vous n’êtes pas seuls. Pouvez-vous nous présenter l’équipe ?

Nicolas Tellop : D'abord, il faut citer l'écrivain et romancier Xavier Mauméjean, grâce auquel j'ai découvert l'existence de L'Anachronopète à l'occasion d'une conférence consacrée aux machines à temps au Musée des Arts et Métiers. Xavier rédige par ailleurs la postface au roman, très éclairante et érudite, comme à son habitude. Ensuite, outre Yann et Xavier, Sophie Vallez a joué un rôle de premier plan. Elle a traduit le roman et sans elle je n’aurais pas été aussi fier de le publier. La traduction a demandé un an et demi de travail, un défi complexe à relever parce que le style de Gaspar avait subi les outrages du temps. C’est d’ailleurs sans doute une raison pour laquelle le roman n’avait encore jamais été publié en français. Si on s’était contenté d’une traduction trop fidèle à la lettre du texte, on aurait obtenu un récit difficile à lire, à l’écriture alambiquée et à la syntaxe pour le moins filandreuse. Il a fallu à Sophie opérer un véritable travail de restauration du texte, afin de lui rendre son dynamisme, le porter jusqu’au XXIe siècle et offrir une expérience de lecture à laquelle même les Espagnols n’ont pas encore eu accès. Pour cela, Sophie a entrepris d’importantes recherches pour comprendre et clarifier les nombreuses références qui émaillent le récit. Sans compter les jeux de mots les plus subtils qu’elle a veillés à retranscrire avec autant de justesse et d’humour possible. Jack Durieux, notre directeur artistique, s’impose comme un des acteurs des éditions Musidora : il a créé notre logo, que nous adorons, et il a aussi créé la ligne esthétique de L’Anachronopète. Outre la maquette des deux versions de l’ouvrage, il a aussi restauré la cinquantaine d’illustrations qui accompagnent le texte – sans parler de la couverture de la version luxe, qui reprend celle de l’édition originale, avec des critères d’impression les plus similaires possibles. L’illustrateur Laurent Durieux a réalisé la couverture de l’édition standard du roman et une affiche qui accompagne la campagne Ulule. C’est une autre grande fierté pour nous d’avoir pu compter sur un talent que nous admirons tant, et qui est également admiré de Steven Spielberg et de Francis Ford Coppola ! Dans son affiche, il rend hommage aux machines à voyager dans le temps, dont l’Anachronopète est l’ancêtre. Il faudrait aussi citer Jules Tirilly, notre graphiste pour la mise en page, et Guillaume Saki, l’indispensable relecteur-correcteur.

Actusf : Quels sont vos projets à venir après le lancement de L’Anachronopète ?

Nicolas Tellop : Ils sont nombreux et dépendent de la somme atteinte à la fin de la campagne Ulule. Nous avons beaucoup de projets de traductions, assez onéreux. De plus, nous sommes tributaires de notre exigence : voulant apporter un soin particulier à la fabrication des livres, chaque projet nécessite un budget relativement conséquent. Nous aimerions proposer systématiquement des livres illustrés, des objets très soignés, une finition de qualité et si possible réalisée à proximité… Ce n’est pas facile, surtout en ce moment, avec la crise que nous traversons, mais on est des amoureux des livres ou on ne l’est pas ! Sans en dire trop, je peux quand même esquisser quelques pistes : un court roman de science-fiction de la deuxième moitié du XIXe siècle, encore une fois fondateur mais pour le coup totalement oublié ; un roman français en forme de cauchemar halluciné, fiévreux et gothique dans les ruines de Berlin après la Seconde Guerre mondiale ; une anthologie consacrée au Merveilleux-Scientifique ; un livre sur le cinéma ; un autre sur les comics, peut-être – et tout un tas d’autres surprises qui me fond regretter chaque jour de n’avoir encore jamais gagné au loto. En même temps, il faudrait peut-être que je commence par y jouer…

Actusf : Quels seront les temps forts de cette année 2022 pour la maison d'édition (salons, rencontres…) ? Où peut-on vous rencontrer dans les mois à venir ?

Nicolas Tellop : Dès l’impression de L’Anachronopète, en juin, nous allons essayer d’organiser des rencontres et des lancements en librairie. Il y en a déjà qui sont prévus à Lille, Paris, Bruxelles, et peut-être ailleurs – là encore, tout dépend des finances et du prix de l’essence ! Sinon, nous espérons bien participer au Festival des Livres d’en Haut à Lille en octobre, ainsi qu’aux Utopiales, et partout là où on voudra bien de nous ! En attendant, on peut nous suivre sur notre site et nos pages Facebook et Instagram. Sans parler de la campagne Ulule, tant qu’elle est encore en activité !

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