[Une partie de cet article a été précédemment publiée dans le no 84 de la revue Bifrost, consacré à Robert E. Howard, sous le titre « Howard le barbare et Lovecraft le Romain civilisé ». Nous remercions Olivier Girard d’en avoir permis la reprise sous cette forme.]
Cet article a été republié dans la monographie consacrée à Lovecraft - Au cœur du cauchemar. Dans un soucis de lisibilité, celui-ci sera découpé en trois parties.
Découvrez aujourd'hui, la 2nde partie (1ère partie).
Lovecraft, en outre, recourt volontiers au sarcasme, trait fréquent de sa correspondance… mais qui passe ici très mal ; car Howard s’en offusque bientôt (tempérament paranoïaque ou pas, c’est à débattre – on a pu parler de l’obsession de l’auteur pour ses « ennemis »…), d’où des réponses parfois cinglantes, qui stupéfient Lovecraft de par leur violence soudaine : il ne s’attendait pas du tout à une réaction aussi exacerbée – et, pour le coup, en toute bonne foi !
C’est, à vrai dire, au-delà de sa richesse thématique (le débat est complexe, longuement discuté, au travers de quasi-essais pointus aux nombreux enseignements et d’une rhétorique subtile), un atout essentiel de la correspondance entre Howard et Lovecraft, finalement, et qui la distingue des autres correspondances des deux auteurs. Car le Texan, tout déférent voire timide qu’il ait été tout d’abord (abondant systématiquement aux propos de son estimé correspondant, voire faisant la course avec le gentleman sur des sujets où son sentiment réel pouvait être tout autre, ou du moins autrement nuancé – le racisme, par exemple), ne compte pas éternellement se laisser marcher sur les pieds : il n’apprécie pas qu’on se moque de lui, et ne tolère pas indéfiniment la stature un tantinet condescendante de son collègue, étalant volontiers son érudition – et usant d’un rationalisme à tout crin pour asseoir la justesse « scientifique » de ses interprétations contre les simples « intuitions » préconçues de son camarade… Sa plume remise bientôt la courtoisie de côté, pour exprimer au plus près le fond de sa pensée, sans s’embarrasser de ménager son interlocuteur. On pense à Conan, dans « La Tour de l’éléphant » : « En règle générale, les hommes civilisés sont plus malpolis que les sauvages car ils savent qu’ils peuvent se montrer grossiers sans se faire fendre le crâne pour autant. » Même si, quand les lettres abandonnent le temps d’un paragraphe ou deux la virulente discussion, la cordialité revient aussitôt chez les deux, mettant en avant le respect qui demeure pour « l’adversaire », quitte le cas échéant, et côté Howard, à s’excuser des emportements les plus sanguins de la lettre précédente…
Mais tout porte à croire, en fait, que Lovecraft, aussi surpris qu’il ait été des assauts vengeurs de Howard, y voyait bien des raisons supplémentaires d’accorder une valeur à part au Texan. Il n’a finalement pas, pour Howard, que ce soit au cœur même de la joute ou dans ses échos épistolaires, de ces expressions très dures qu’il employait parfois pour d’autres correspondants moins doués – ainsi d’August Derleth, « aveugle volontaire absorbé dans des contemplations terrestres »… La philosophie de Howard n’est pas la sienne, et sans doute n’est-il guère en mesure de la comprendre, d’une certaine manière ; il n’en reste pas moins que l’antagoniste, exceptionnellement, est de taille à l’affronter, et mérite bien qu’on envisage sérieusement ses arguments, qui n’ont rien de lubies creuses et improvisées, mais témoignent d’une vision du monde aussi valable que la sienne. Ce qui n’est cependant pas toujours facile à accepter…
Les prémices de la controverse arrivent assez tôt dans les échanges des deux auteurs. En fait, dès les premières discussions sur le peuplement de la Grande-Bretagne, quelques aveux de part et d’autre présagent de la suite : Lovecraft affiche bien vite son amour de Rome, et son identification, le cas échéant, à tel centurion de l’Empire – comme dans son « rêve romain », qui donnera lieu à une nouvelle de Frank Belknap Long ; c’est là une passion ancienne, sensible dès son enfance (et ses premiers écrits !), et qui ne l’a jamais abandonné – quand bien même il a ensuite développé une un goût prononcé pour le XVIIIe siècle anglais (et ses essayistes), mais que l’on peut voir, d’une certaine manière, comme une prolongation ou une variante du thème romain originel, lequel demeure, imperturbable – incarnation parfaite des bienfaits de la civilisation.
Howard est tout aussi porté que Lovecraft à se rêver dans des époques antérieures, et notamment celle de l’Empire romain – davantage, même, lui qui s’intéresse de près à la thématique de la réincarnation. À ceci près… qu’il se figure systématiquement dans le camp opposé, celui des barbares ! Au plein sens du terme : les Gaulois d’avant César, les peuplades britanniques « originelles » surtout, éventuellement plus tard les tribus germaniques précipitant la chute de l’Empire, et donc de la civilisation. L’identification irlandaise de l’auteur, qui se mue au-delà en identité celtique, est un aspect fondamental de la personnalité de Robert Ervin Howard – il y revient sans cesse, et avec fougue42. Sa littérature en dérive pour une bonne part, même si ce n’est pas sans paradoxes – notamment en ce qui concerne les Pictes, son peuple fétiche, qui traverse tous ses cycles, en partant au moins des « Royaumes Thuriens » de Kull, jusqu’à Bran Mak Morn, et sans doute même audelà43 : non pas des géants blonds aux yeux bleus (même si ces Aryens archétypaux ne sont certes pas absents des œuvres de l’auteur – par exemple dans les nouvelles de James Allison explorant la thématique de la réincarnation ou « mémoire raciale », donc)44, mais plutôt des individus plus ramassés, à la pigmentation plus sombre, et aux cheveux noirs… Bran Mak Morn, bien sûr, le dernier et le plus grand des rois des Pictes, est ici une figure essentielle – mais Kull ou Conan, dans un passé fantasmé, ou, à l’autre bout du spectre temporel, Francis Xavier Gordon dit « El Borak » (d’ascendance irlandaise, Howard le précise), sans être eux-mêmes des Pictes (Kull et Conan les côtoient et affrontent, cependant), correspondent à certains égards à ce schéma anthropologique. La lutte vaine de Bran contre Rome prend ici une résonance toute particulière – notamment quand le roi, sous le coup d’une dangereuse colère, fait appel aux terribles « Vers de la Terre » pour briser l’avancée des légions (rejoignant ainsi la thématique du « Petit Peuple », elle aussi primordiale, et témoignant d’une pensée complexe sinon confuse quant aux Pictes, etc.). Quant à Kull ou Conan, ce sont essentiellement des étrangers, barbares au plein sens du terme : le sauvage Atlante (on est bien loin de la sophistication du mythe platonicien…) qui règne sur la Valusie, et le tenace Cimmérien qui, au fil d’une longue et riche carrière hors de sa contrée natale à jamais abandonnée une fois qu’il en a franchi la frontière (comme l’Atlantide pour Kull), carrière l’ayant vu incarner bien des rôles, posera sur son front la couronne d’Aquilonie, ce qui sera bien loin cependant de signifier la fin de ses aventures. En sens inverse, le cas d’El Borak est à relever : nous y voyons en effet un homme né dans la civilisation (texane, certes…) et décidant de l’abandonner pour vivre dans la barbarie, au milieu des clans afghans – schéma que l’on peut transposer, dans une certaine mesure, à un autre personnage howardien essentiel, à savoir le puritain Solomon Kane, qui abandonne bien vite l’Europe, aussi gothique soit-elle, pour défier les ténèbres dans une Afrique de cauchemar… N’y a-t-il pas ici quelque chose d’une idéalisation, de la part de Robert E. Howard ? Une projection, peut-être ? Un fait reste prégnant au-delà de ces différences : la conviction que la civilisation est temporaire, voire « pathologique », là où la barbarie est l’état « normal » du monde45.
Finalement, Howard pourrait rejoindre ici les conclusions de Lovecraft : ce dernier, après tout, dans la lignée d’un Spengler46, revenait souvent sur le thème du déclin puis de la décadence des civilisations – thème en fait essentiel chez les deux auteurs (ainsi que chez Clark Ashton Smith, d’ailleurs)47, et sans doute bien dans l’air du temps. Il s’agit, pour ces écrivains qui ont intégré les bouleversements scientifiques qui, en l’espace de quelques décennies à peine, ont considérablement modifié la perception du temps « historique » et au-delà, en le « dilatant », de produire un effet d’émerveillement et de vertige comparable au « sense of wonder » de la science-fiction, en plongeant le lecteur complice et curieux dans une profondeur temporelle jusqu’alors inouïe – d’où ces innombrables civilisations préhistoriques voire préhumaines dont tous sont coutumiers (et d’autres encore, tel, à la même époque, si les publications seront bien plus tardives, J.R.R. Tolkien – mais la dimension métaphysique du « Légendaire » tolkiénien marque certes une différence capitale avec nos deux auteurs) : il y avait chez Howard, avant l’histoire, « l’Âge Hyborien » de Conan, lequel plonge lui même ses racines dans les « Royaumes Thuriens » de Kull, tous ces cycles se mêlant pour esquisser la probabilité de mondes encore plus anciens, et en même temps se prolongeant vers l’avenir, via un Bran Mak Morn dont l’antiquité était déjà ô combien exotique (en notant que ce héros ranimait déjà un passé aussi indicible pour lui que pour les lecteurs avec « Les Vers de la Terre »… et un autre encore en ressuscitant Kull dans « Les Rois de la nuit » !), jusqu’à l’époque contemporaine, plus que jamais insignifiante, mais où demeurent, parfois, des échos de ces mondes anciens, pas tout à fait disparus. Et, à chacune de ces époques, il se trouve donc toujours tels endroits oubliés de tous où les civilisations d’antan, réduites à une ombre parodique de leur grandeur passée, végètent tant bien que mal, offrant un spectacle peu ragoûtant – ainsi dans « Les Clous rouges », ultime nouvelle de Conan, mais les exemples sont légion (mentionnons peut-être, dans un cadre plus contemporain, « La Vallée perdue », qui mêle « Petit “Peuple” et cadre western »)48. La décadence inéluctable est ainsi représentée dans tout ce qu’elle a d’insupportable – et le barbare est bienvenu, qui y met charitablement un terme49…
Lovecraft jouait de même de cette dilatation, de manière très récurrente – nombre de textes anciens et éventuellement mineurs s’en faisaient déjà l’écho, comme « Dagon » ou « La Cité sans nom », ou encore « Polaris » ou « La Malédiction de Sarnath », dans un contexte tout autre, mais le procédé trouve sans doute son aboutissement dans les « utopies préhumaines », décrites avec un luxe de précision tendant à l’exhaustivité, des Montagnes hallucinées ou de « Dans l’abîme du temps » (à compléter avec la « révision » intitulée « Le Tertre », signée Zealia Bishop – qui n’en a toutefois pas écrit le moindre mot ; rappelons aussi le cas de « Surgi du fond des siècles », censément de Hazel Heald, nouvelle évoquée plus haut, et qui relie Lovecraft et Howard à travers Von Junzt et son livre maudit). Ajoutons que la décadence de ces civilisations, chez Lovecraft, pouvait aussi se compliquer de dégénérescence, de dévolution ou a minima d’atavisme (c’est parfois le cas chez Howard – avec le folklore commun du « Petit Peuple », éventuellement via Machen50 –, mais c’est moins systématique). Autant de thèmes qui, cependant, débordent la seule question de la décadence des civilisations (voyez « Faits concernant feu Arthur Jermyn », « La Peur qui rôde », « Les Rats dans les murs », ou « Le Cauchemar d’Innsmouth »).
Mais le regard que les deux auteurs portent sur la civilisation n’a rien de commun. Lovecraft se raccroche à la civilisation comme à une bouée de sauvetage – il sait pourtant que c’est vain, ou du moins est ce ce qui ressort de ses fictions… Mais la barbarie ? Inacceptable ! La grandeur de Rome demeure, au-delà de la chute (le conservatisme exacerbé de Lovecraft, louchant régulièrement sur la réaction, joue souvent de ce thème – mais l’adoration de la civilisation semble pourtant impliquer le progrès !), et l’humanité, pour insignifiante qu’elle soit, ne saurait briller (relativement…) autrement que dans les arts et autres facultés de l’esprit, à célébrer par-dessus tout le reste comme la plus grande gloire des hommes. On rejoint ici, bien sûr, le débat « physique contre mental » : toutes ces discussions s’interpénètrent dans l’ensemble plus vaste « barbarie contre civilisation ».
Howard, lui, prise la liberté de la Frontière, qui est à sa manière la liberté du barbare, aussi idéalisé (consciemment ?) soit ce dernier – d’autant que les œuvres de l’intellect n’ont pas, par nature, une valeur supérieure à quoi que ce soit d’autre, la prétention de la civilisation éclatant en fait dans ce genre de présupposés absurdes. C’est sans doute là le trait saillant de la civilisation selon Howard : sa prétention à être supérieure à ce qu’elle est concrètement (un accident historique, donc, et éphémère par-dessus le marché), prétention qui peut être, en fonction des circonstances, soit aveuglement, soit hypocrisie.
Et nous retrouvons ici le débat politique opposant « sécurité/ordre/autorité et liberté », où Robert E. Howard semble triompher (mais tout particulièrement aux yeux d’un lecteur contemporain, certes), quand il dénonce avec fougue les crimes commis par les « amis fascistes » de Lovecraft en Éthiopie : leur entreprise sanguinaire, injuste et hypocrite, au nom de la « civilisation », est-elle si préférable à la « barbarie » qu’elle est supposée « guérir » ? Le comportement de Lovecraft, remarque ici Howard, est éloquent, témoignant bien des contradictions insurmontables dont s’accommodent fort bien, dans leur fanatisme, les amis de la civilisation et autres hérauts de l’ordre : Howard, simplement parce qu’il conteste la gloire de Rome et de ses émules, et tout particulièrement telle qu’elle est supposée s’exprimer dans le fascisme, se voit aussitôt relégué au rang d’ennemi de l’humanité, voire carrément déshumanisé… Solution simple, bien plus brutale que toute barbarie. La prétention de la vieille Europe à cet égard est d’autant plus insupportable qu’elle ne saurait reposer sur autre chose qu’une série de mensonges, servant de « justifications » à des préconçus imbéciles… Le barbare, au fond, s’il tue, n’a du moins pas la mesquinerie de s’abriter derrière des concepts fantômes pour légitimer sa soif de sang et de pouvoir !
Les correspondants ne cessent d’y revenir – les escarmouches se multiplient sur ces questions, au point d’en devenir parfois lassantes ; y compris pour les auteurs, mais sans doute plus pour Howard que pour Lovecraft… Ils poursuivent cependant le combat, lettre après lettre. Tous deux ont leurs moments où ils brillent – mais quelqu’un l’emporte-t-il, en définitive ? Pour S.T. Joshi, la question n’a pas de sens : Lovecraft et Howard étaient bien trop sensés et dignes pour se vautrer dans quelque chose d’aussi futile et même puéril que la détermination d’un « vainqueur »… C’est probable en effet. D’autres, cependant, ne sont pas de cet avis – et, globalement, ce sont des « howardiens » qui donnent raison à Howard : ainsi Don Herron51, Mark Finn52 ou Brian Leno53. Mais mettons de côté les préjugés des deux camps : à tout prendre, et quelle que soit la sensibilité de chacun, oui, Robert E. Howard est probablement celui qui l’emporte – au moins au regard de la postérité, dimension que S.T. Joshi évacue sans doute un peu trop vite ; mais peut-être aussi à l’époque… On n’aura pas l’indécence de faire du suicide de Howard un argument ultime ; ceci étant, dans les semaines et mois qui suivent, Lovecraft aura amplement l’occasion d’y revenir, dans sa correspondance ou dans des notices nécrologiques – en ressort du moins l’estime profonde d’Eich Pi-El, profondément affecté par cette perte tragique, pour ce Two-Gun Bob décidément sincère avant tout, qui se mettait entièrement dans tout ce qu’il accomplissait, et l’emportait si souvent à la fin?
Car la virulence des échanges, les sarcasmes ici, presque les noms d’oiseaux là, ne changent rien au fond : les deux auteurs s’appréciaient. En fait, la durée et la précision des échanges en témoignent d’elles-mêmes : pourquoi sinon l’un comme l’autre se seraient-ils acharnés dans cette longue guerre ?
Bien sûr, la fiction et la correspondance se renforcent mutuellement, en tant qu’expressions d’une même pensée – que celle-ci relève de la conviction ou de l’instinct. Les nouvelles illustrent le débat, qui suscite sans cesse de nouvelles interrogations et de nouvelles pistes narratives à exploiter. Le ressenti des deux auteurs, à cet égard, est toutefois on ne peut plus différent. Après le fourmillement initial, Lovecraft n’écrit finalement plus guère de nouvelles sur cette période (une par an, deux au mieux), quelles qu’en soient les raisons : d’aucuns ont mis en avant la correspondance, justement, ou peut-être la part trop importante accordée aux « révisions » (sans garantie cependant que Lovecraft aurait bel et bien écrit davantage de fictions « personnelles » sans cela, d’autant qu’il n’est peut-être pas pertinent de considérer l’œuvre « intime » qu’est la correspondance comme étant nécessairement inférieure à ses écrits « publics », a fortiori aux yeux de l’auteur lui-même) ; le rejet des Montagnes hallucinées par Farnsworth Wright y a sans doute sa part de proverbiale goutte d’eau faisant déborder le vase…
Déterminer une éventuelle influence howardienne sur la fiction lovecraftienne (ou, a minima, de la controverse si ce n’est du Barde de Cross Plains lui-même) est d’autant plus délicat – au-delà, du moins, du lexique et des références « mythiques » envisagés plus haut, qui n’engagent pas à grand-chose. Peut-être toutefois la thématique commune du déclin des civilisations s’en est-elle trouvée renforcée – quant à dire s’il s’agit vraiment d’une conséquence des échanges épistolaires…
A suivre.
NOTES ET RÉFÉRENCES
42. Par exemple, cf. PREECE (Harold), « The Last Celt », in LORD (Glenn), The Last Celt: A Bio-Bibliography of Robert E. Howard, pp. 93-102.
43. Cf. TOMPKINS (Steven), « Gigantic Gulfs of Eons: Kull, Conan and Tyrant Time », in HERRON (Don) (ed.), op. cit.
44. Sur le thème aryen, cf. CONNERS (Scott), « Twilight of the Gods: Howard and the Völkstumbewegung », in HERRON (Don) (ed.), op. cit.
45. Fameuse citation figurant dans « Au-delà de la rivière Noire », sans doute la nouvelle de Conan la plus riche à ce sujet, qui transpose la Frontière dans l’Âge Hyborien, avec un Conan qui, pour être « barbare », se bat cependant dans le camp de la « civilisation » (le royaume d’Aquilonie, dont il deviendra roi ultérieurement) contre les inévitables Pictes ; ce n’est toutefois pas Conan qui parle ici, mais un compagnon « civilisé » : « La barbarie est l’état naturel de l’humanité… La civilisation n’est pas naturelle. Elle résulte simplement d’un concours de circonstances. Et la barbarie finira toujours par triompher. » Une lutte vaine de plus pour Conan, donc – ce qui ne l’arrêtera bien sûr en rien.
46. Cf. JOSHI (S.T.), H. P. Lovecraft: The Decline of the West.
47. Cf. GUILLAUD (Lauric), « Le Thème de la décadence chez C.A. Smith et R.E. Howard », H. P. Lovecraft : fantastique, mythe et modernité, pp. 297-355..
48. Sur l’ensemble de la question, cf. TOMPKINS (Steven), art. cité.
49. Très concrètement parfois : plusieurs nouvelles de Howard évoquent un ultime représentant d’une civilisation et même d’une race antique, préhumaine – souvent un humanoïde noir doté d’ailes : sa rencontre avec tel ou tel barbare débouchera donc sur l’anéantissement de sa race, sans même que le « héros » y prête la moindre attention ; par exemple, cf. « Le Jardin de la peur ».
50. Cf. MEURGER (Michel), « Le Thème du Petit Peuple chez Arthur Machen et John Buchan », in MEURGER (Michel), op. cit.
51. Cf. HERRON (Don), « The Barbaric Triumph », in HERRON (Don) (ed.), op. cit.
52. Cf. FINN (Mark), op. cit.
53. Cf. LENO (Brian), « Lovecraft’s Southern Vacation », in LENO (Brian), op. cit.