- le  
La Lumière lointaine des étoiles - Le mot des éditions Actusf
Commenter

La Lumière lointaine des étoiles - Le mot des éditions Actusf

Pour fêter la sortie de La Lumière lointaine des étoiles de Laura Lam, aux éditions Actusf, Marie Marquez, son éditrice, vous propose de découvrir d'excellentes raisons de le lire.

Il y a certains livres qui vous marquent tellement que vous vous souvenez exactement où et quand vous les avez lus pour la première fois. Octobre 2019. Je suis dans le train qui me mène de Vienne à Zell am See. Je pars en week-end explorer un coin encore inconnu de mon pays d’adoption, l’Autriche, avec dans ma liseuse Goldilocks de Laura Lam. Je prête à peine attention aux paysages autrichiens flamboyants qui défilent derrière la fenêtre tant l’histoire de Naomi me happe. Je suis tour à tour fascinée, révoltée ou émue aux larmes en lisant certaines scènes du livre. Tout le week-end, alors que je me promène au cœur des montagnes, une partie de moi flotte à des millions de kilomètres de la Terre, dans le vide de l’espace. Je termine le roman en un temps record, subjuguée. Certains de ses aspects me font tiquer – quand même, cette vision pessimiste de l’avenir des femmes, alors que les avancées n’ont jamais été aussi importantes ces dernières années, ce n’est pas très crédible – mais au fil des mois, des années, je repense régulièrement à ce texte. Il ne me lâche pas.

2022. Les contrats sont signés et le travail sur Goldilocks peut commencer. J’ai déjà envoyé depuis quelques mois le texte à Hermine Hémon et Erwan Devos, un couple de traducteurs qui se trouvent aussi être des amis. Le texte les botte bien et, avant de traduire la moindre ligne, on réfléchit déjà au casse-tête que sera le titre – La Zone Boucle d’or, ça vend du rêve, non ? Ça cogite, ça pétille, tout le monde est impatient de bosser dessus. C’est de bon augure.

Puis la traduction est rendue et commence le travail éditorial. C’est l’étape cruciale, le début d’un long tunnel où je vais relire le texte 2, 3, 4 fois, disséquer chacune de ses phrases, remettre en cause le moindre mot. Une relation intense et fusionnelle de plusieurs mois qui va mettre à l’épreuve mon attachement au texte, qui va peut-être remettre en question ma décision de vouloir le publier. Une relation amour/haine toujours unique, attendue, redoutée. Car qui vous assure que le texte que vous aviez lu avec insouciance il y a quelques mois, quelques années, aura gardé la force de sa découverte ? Sans surprise, le plaisir est intact. Le coup de foudre est toujours présent. Mais la surprise est quand même au rendez-vous.

Car depuis 2019, notre société a bien changé. Nous avons vécu une pandémie ; l’urgence climatique n’a jamais été aussi palpable ; et les droits des femmes ont subi de profonds reculs un peu partout dans le monde. Tous ces thèmes, abordés dans La Lumière lointaine des étoiles, titre finalement adopté, prennent soudain une nouvelle dimension, alors que le texte français prend forme. Au fil des relectures, des détails sautent aux yeux, des références prennent une autre dimension. Ce qui semblait improbable hier paraît aujourd’hui bien trop crédible – alors qu’en sera-t-il de demain ? Même en connaissant son histoire, son dénouement, La Lumière lointaine des étoiles continue de me bouleverser. C’est rare, c’est précieux. Et cela me conforte que nous avons fait le bon choix de publier ce roman.

Tout le monde s’était habitué à donner des ordres aux robots dotés d’agréables voix féminines. Alexa, Siri, Sophia, Sage, tu peux faire ça. Un guilleret « okay » pour toute réponse, et elle accomplissait vos ordres. Tout le monde l’avait fait pendant des années jusqu’à ce que les femmes remarquent que les hommes de leur vie avaient été conditionnés à en faire tout autant avec elles. Mais il était alors trop tard.

La Lumière lointaine des étoiles n’en est pas pour autant une lecture mortifère ou pessimiste. Cela reste un roman de pure sense of wonder, misant sur l’un des plus vieux rêves de l’humanité – la conquête spatiale – pour nous faire entrevoir des jours meilleurs... pour peu que l’on réagisse avant la catastrophe de trop. C’est aussi un thriller au rythme effréné, qui ne vous lâche plus passé les premières pages. Avec une mécanique bien rodée faite de flash-back et de cliffhangers au moment opportun, l’intrigue vous happe et vous tient en haleine, allant de révélation en surprise, et ce jusqu’à la dernière page.

Mais c’est avant tout un formidable roman de femmes, avec des héroïnes complexes, attachantes, bourrées de doutes mais pleines de volonté. La Lumière lointaine des étoiles, roman féministe ? Oui, dix fois oui. Et qu’importe si le mot fait peur, fait grimacer. Car on a encore besoin plus que jamais, en 2022, de textes qui portent la voix des femmes. Ces dernières années, on a vu des autrices s’emparer de ce genre qu’on pensait réservé aux hommes, proposer une approche différente, porter un regard autre. Laura Lam, avec La Lumière lointaine des étoiles, continue de tracer ce sillon.

Valérie avait sélectionné avec soin le premier équipage entièrement féminin à prendre son envol vers l’espace interstellaire.
Ce n’était simplement pas le premier équipage autorisé.(...)
Mais le président Cochran était si résolu à tenir ces cinq femmes à l’écart de l’Atalanta et de la destination que constituait Cavendish qu’il était prêt à tout risquer.

En ces temps incertains, La Lumière lointaine des étoiles est une lecture salutaire. De celles qui vous bousculent, vous interrogent, sans cesser de vous faire rêver et surtout de vous donner espoir. Espoir de jours meilleurs, espoir que tout n’est pas encore perdu et que nous avons encore le contrôle sur notre futur. Qu’il sorte en 2022 offre finalement un timing parfait, permettant à son histoire de résonner encore plus avec nos luttes actuelles. En tant qu’éditrice, je ne pouvais pas rêver mieux.

J’ai beaucoup parlé de moi, mais ce roman, cette version française est le fruit d’une collaboration entre plusieurs intervenants que je souhaite ici mentionner et saluer pour leur contribution :
- Laura Lam, qui ne me connaît pas mais que je voudrais remercier de m’avoir offert une de mes lectures les plus bouleversantes de ces dernières années ;
- Hermine Hémon et Erwan Devos, pour leur traduction impeccable, qui a su si bien restituer les émotions du texte original ; si la plume de Laura Lam est aussi agréable à lire en français, c’est grâce à eux ;
- Gabrielle Rodelet, pour son œil avisé, qui nous a permis de polir ce diamant encore brut – le regard extérieur du correcteur est crucial, pas que pour corriger les fautes, mais pour vous faire prendre du recul sur un texte que vous finissez par connaître par cœur ;
- Zariel, pour le superbe écrin qui sera la porte d’entrée numéro 1 de l’ouvrage – un élément à ne jamais négliger ! ;
- et enfin vous, lecteurs. Vous êtes ceux qui nous permettent de faire ce métier formidable. Vous n’avez peut-être pas encore le livre entre vos mains mais, si vous sautez le pas, je suis persuadée que vous ne le regretterez pas.

Alors que le compte à rebours démarrait, Naomi trouva sa voix.
« Là, vous nous voyez ! » lança-t-elle.
Trois. Deux. Un.
Maintenant, vous ne nous voyez plus.

Marie Marquez

à lire aussi

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?