Johan Heliot fait partie de cette génération de jeunes écrivains prometteurs. Auteur entre autres, de Pandémonium, Faeries Hackers et du recueil de nouvelles Obsidio, il jongle entre les différents genres de la littérature de l'imaginaire. C'est avec La Lune seule le sait, un excellent roman Steampunk, que Johan Heliot s'est fait connaître en France. D'ailleurs, ce roman a reçu le prix Rosny-Aîné 2001 du meilleur roman de science-fiction francophone. Folio SF a donc décidé de rééditer La Lune seule le sait en format poche, un roman à lire absolument surtout pour les inconditionnels de Jules Verne.
Pour ceux qui ne connaissent pas le Steampunk, une petite définition de ce genre original s'impose. Le Steampunk est une branche européenne de la science-fiction fortement influencée par Jules Verne et H. G. Wells. L'action du roman se déroule à l'époque victorienne (fin du 19ème siècle) en Europe. Une ou des influences modifient le cours de l'histoire et les technologies évoluent alors de manière totalement différente, de celle que nous connaissons. Comme autres romans Steampunk, je vous conseille, outre celui-ci qui est excellent, Confessions d'un automate mangeur d'Opium de Fabrice Colin et Mathieu Gaborit ou La Machine à remonter l'espace de Christophe Priest ou encore la BD, La Ligue des gentlemen extraordinaires d'Alan Moore. Dans La Lune seule le sait, Johan Heliot réinvente l'Histoire et nous ramène au printemps 1889, époque à laquelle des extraterrestres débarquent sur Terre.
Une lutte lunaire pour la liberté
1889, clôture de l'Exposition Universelle, un vaisseau extra-terrestre se pose à Paris. Cet événement inattendu change radicalement le cours de l'histoire. Ces extra-terrestres, les Ishkiss, concluent une alliance avec Napoléon III, Empereur français et surtout tyran démoniaque. Ces êtres venus d'ailleurs offrent aux terriens leurs sciences en échange de notre technologie et de notre acier. Malgré cet essor, le peuple français vit dans la terreur. La résistance est étouffée et les opposants sont déportés vers le nouveau bagne, situé dans les entrailles de la Lune. Mais, quelques utopistes refusent la tyrannie de Napoléon. Parmi eux, Barbiroussa qui envoie son ami Jules Verne sur le satellite pour y retrouver Louise, chef de file de la résistance et dernier espoir de l'humanité...
Un steampunk audacieux
La Lune seule le sait fait partie de ces romans qu'on ne voudrait jamais terminer. Ce livre est bon, voir excellent sur tous les points. D'abord, l'intrigue est originale, insolite. Cette lutte de journalistes contre un pouvoir oppresseur, la censure abusive des écrits, cette révolte qui gronde depuis les bas-fonds et qui remonte peu à peu... Tous ces éléments se fondent à merveille dans ce décor victorien.
Par ailleurs, l'auteur a eu l'idée saugrenue et osée de choisir comme héros, Jules Verne, devenu pour l'occasion journaliste engagé et aventurier contre la cause napoléonienne. Quelle ironie pour cet homme qui a imaginé le voyage vers notre satellite grâce à un obus, de se retrouver à vivre et à marcher sur cette même Lune ! C'est fort ingénieux, on ne peut le contester. Cette idée n'est pas sans rappeler le roman de Christopher Priest, La Machine à explorer l'espace, où l'auteur n'hésite pas à faire vivre La Guerre des mondes à H. G. Wells lui-même.
Quant à ce concept développé tout le long du roman (mélanger la technologie de l'acier avec des êtres vivants très proches des insectes), il est fort insolite. Mais, à aucun moment, elle ne choque le lecteur. Pourtant, on pourrait s'étonner de pouvoir voyager à l'intérieur même d'un insecte. Mais là, non. Les détails et les descriptions surprennent le lecteur et on se laisse glisser dans ce voyage fabuleux. Surprenant, déroutant, La Lune seule le sait est à lire absolument que ce soit pour les amateurs de Steampunk ou pour ceux qui veulent découvrir ce genre original.
La chronique de 16h16