Même s'il a un peu touché à tous les genres (de sa Tétralogie fantasy Les Flammes de la Nuit, au Space Opera avec La Sirène de l'espace, en passant par le délirant Pour une poignée d'Helix Pomatias), Michel Pagel est avant tout reconnu pour être une figure marquante du fantastique français. Parmi ses maîtres, il cite volontiers King, Barker et Koontz (il a d'ailleurs été traducteur de ce dernier). Seconde partie de la réédition J'ai Lu de La Comédie inhumaine, ce volume comprend deux récits : Le Diable à quatre, court roman de 160 pages, et Désirs cruels, recueil de nouvelles habilement liées par une trame digne des Mille et une nuits.
Mort-vivant et récits sanglants d'une Shéhérazade pas très fleur bleue
Attaquer un roman, même court, tournant autour du thème de la vengeance d'un mort-vivant peut a priori faire craindre une légère impression de déjà vu. Il ne faut pourtant pas s'y fier et pousser l'exploration un peu plus loin que la quatrième de couverture. Sur les quais de la Seine, un jeune homme rencontre celui qu'il attendait depuis longtemps. Le cadavre d'un ami tué quelques années auparavant au cours d'une cérémonie satanique revient hanter ses anciennes fréquentations pour échanger quelques mots… Certes l'histoire est on ne peut plus classique mais le but affiché de Monsieur Pagel derrière les récits de sa Comédie inhumaine est justement de revisiter les mythes fantastiques pour leur donner une nouvelle jeunesse. But atteint puisque, avec des personnages crédibles, une intrigue bien ficelée et un mort-vivant à l'humour à peine débridé, Le Diable à quatre réussit le pari de nous tenir en haleine du début jusqu'à la fin, sans douleur ni ennui. Les premières lignes de Désirs Cruels, quant à elles, laissent les meilleurs espoirs quant aux nouvelles de ce recueil.
De nuit dans une maison isolée, Marylith se fait prendre la main dans le sac par le propriétaire de la maison qu'elle s'apprêtait à cambrioler. Flanqué de son garde du corps inquiétant et libidineux, il ne souhaite pourtant ni la livrer à la police, ni à se livrer sur elle à une quelconque barbarie. Pour la laisser en vie, il ne lui demande qu'une chose : le sauver du mal qui le ronge. Depuis qu'il n'a plus d'inspiration, cet écrivain à la retraite forcée est rongé des pieds à la tête. N'ayant plus un seul centimètre carré de peau qui ne soit pas à vif, il a l'intime conviction qu'il retrouvera son état normal le jour où il recommencera à écrire des histoires. Il demande donc à sa visiteuse inattendue de lui servir de muse en lui racontant tous les soirs une histoire totalement inédite et effrayante, qu'il réécrira à sa manière. Si quelques-unes des histoires contées par l'inquiétante jeune fille sont seulement sympathiques (comme par exemple la " gentillette " histoire revisitée de la femme gorille) , Rosie et Les Mains de Farah Yole valent par contre le détour.
Bonne réécriture de mythes classiques
Vous l'aurez compris, les récits contenus dans ce second tome de la réédition de La Comédie inhumaine (qui peut d'ailleurs se lire totalement indépendamment du premier, composé de deux courts romans) ne brillent pas par leur originalité mais bien par la manière dont ils ont été écrits. S'il n'y a rien à reprocher au roman Le Diable à quatre, les nouvelles, mêmes les moins bonnes du recueil qui suit vous tiennent également en haleine, ne serait-ce que pour connaître la fin de leur trame commune. Dernière petite suggestion, si l'humour sous-jacent à ce bouquin vous a donné un arrière-goût de trop peu, je ne peux que vous conseiller de vous jeter sur l'excellent Pour une poignée d'Helix Pomatias réédité dans le volume Les Escargots se cachent pour mourir aux éditions Le Bélial. Ce volume contient également la réédition du Cimetière des astronefs. A bon entendeur…
La chronique de 16h16 !