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Le monocle de Georges - Septembre 2016
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Le monocle de Georges - Septembre 2016

 Des petites filles modèles…, Romain Slocombe, Belfond, Collection « Remake », janvier 2016, 18 €.
 
Sélectionné pour le Goncourt avec son roman de la rentrée « L'affaire Léon Sadorski » chez Robert Laffont, c'est pour son « Des petits filles modèles... » que nous avons l'honneur cette fois-ci d'évoquer Romain Slocombe. Titre quant à lui sélectionné pour le prix Sade.
 
Vous avez aimé Shéridan le Fanu ?
 
En particulier Carmilla et Oncle Silas…
 
Vous avez aimé La Vénus à la Fourrure ?
 
Y compris celle du Velvet Unerground...
 
Vous avez aimé les Malheurs de Sophie ?
 
Vous aimez les auteurs qui se livrent au pastiche habile, créatif, en effeuillant leur thématique propre ?
 
Vous allez adorer ce « Des petites filles modèles... », pour adultes, de Romain Slocombe. Même si vous n'êtes pas un fétichiste de la Velpo !
Avec un style digne des romans du début du XXe siècle qui nous immerge encore plus dans cet univers obsédé et obsédant, Romain Slocombe nous offre un roman saphique et  vampirique, à l'ancienne. Et l'intrigue s'en dénoue sous la rage sanguinaire d'un Général Dourakine amoureux !
 
Dans cette collection « Remake » chez Belfond, Romain Slocombe marie habilement les thématiques chères à la littérature fantastique de la fin du XIX° siècle dans le décor décalé de l'entre deux guerres…
 
Mesmérisme, aliéniste, dépression ou vampirisme satanique et saphisme y sont aussi le prétexte, pour notre auteur, à ne pas oublier ses propres obsessions. Bandages façon bondage et tout un sulfureux érotisme du médical et de la blessure qu'on lui connaît déjà dans ses dessins, ses photos ou ses autres écrits… Avec une prédilection pour les libidineuses « positions immodestes » imposées aux pudibondes par les nécessités médicales.
 
Bref : pour reposer les nerfs éprouvés de sa fille comme les siens, une dame de la bonne bourgeoisie parisienne décide d'une cure dans le sud-ouest. Mais un étrange accident en décide autrement !
 
Mal en point, les voici toutes deux recueillies par Mme de Fleurville, jeune veuve vivant dans un château isolé, avec ses deux adolescentes de filles…
 
Des liens encore plus étranges vont alors lentement se tisser entre les mères d'un côté et les filles de l'autre. D'autant que, issue de vieille noblesse des Carpates, Mme de Fleurville n'en est pas moins... libertine.
 
On sait Romain Slocombe habile pour lier... les histoires.
 
Issu des brumes britanniques, Slocombe a dû se glisser dans la plume d'un de ses proches ancêtres, tant il nous hypnotise avec cette histoire, sans jamais lasser ni choquer, malgré le sulfureux constamment instillé.
 
Il joue sur un velours louche et exigeant jusqu'à la fin, belle et bien surnaturelle. Slocombe ne cède rien à la facilité. Grâce à son art de la monstration allié avec finesse à celui de la suggestion, il ligote son roman avec deux points forts : l'écriture qui se coule dans la mentalité de l'époque, avec ses belles phrases suspendues aux mots désuets, puisque nous sommes censés découvrir un récit écrit par un témoin de ces horreurs.
 
La plus grande prouesse de Slocombe est justement d'avoir su se couler dans l'esprit du temps et de nous convaincre que son récit a bien été écrit par un témoin de l'époque tout assujetti à la morale et aux préjugés de son temps.
 
Un roman obsédant à lire au coin du feu par une soirée d'automne qui mériterait sans conteste de devenir un « Classique » du gothisme saphique, revu et corrigé par un auteur qui sait personnaliser à plaisir ses sujets.
 
Georges FOVEAU
 
 

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