- le  
Les Immortelles - Les secrets d'écriture de Thomas Bonicel
Commenter

Les Immortelles - Les secrets d'écriture de Thomas Bonicel

A l'occasion de la sortie des Immortelles, Thomas Bonicel revient sur l'écriture de cet ouvrage paru aux éditions Le Lys Bleu.

Actusf : Comment est né ce roman ? Qu'est-ce qui vous donné envie d'aller sur Titan ?

Thomas Bonicel : Les premières lignes de mon roman ont été rédigées le 1er janvier 2020. Voyez-le comme une bonne résolution ! Encore étudiant à l’époque, je réalise que je ne suis pas pleinement épanoui en tant qu’élève ingénieur. Il me manque quelque chose. Au cours de ces études, je constate que l’écriture m’apporte énormément. C’est la manière la plus naturelle pour moi d’exprimer mes émotions, ce que j’ai beaucoup fait à travers des récits de voyage.
En effet, en semestre académique en Corée du Sud, je vis une farandole d’émotions, que je refuse de voir s’effacer avec le temps. Persuadé que les mots retranscriront au mieux mes émotions, j’aborde la rédaction d’un carnet de voyage.
Depuis, j’écris régulièrement. Fin 2019, je suis certain que la fiction est le nouveau terrain à conquérir pour exprimer et partager ce que je ressens. Pour prendre du plaisir, mais aussi pouvoir m’engager dans un projet et m’y tenir. Un projet, quel qu’il soit, vous anime et vous offre un sentiment d’accomplissement. Ecrire un roman est un projet parfait ! Alors j’entame la structure de l’histoire.
La science-fiction, par goût personnel de lecteur et de cinéphile, s’est imposée naturellement. Mes références sont grandement teintées de SF. C’est ce genre qui permet, à mon sens, les plus grands questionnements. Car dans un monde de SF, tout est possible. Or on sait qu’entre le possible et le souhaitable, un monde existe. Donc on dispose d’enjeux extrêmement forts.
Titan m’attirait en cela qu’elle fait l’objet de nombreuses études à propos d’un océan caché sous sa surface. Cette simple hypothèse autorise toutes les supputations, du moins en fiction ! Enfin, vous aurez noté que le terme « Titan » invoque une certaine imagerie. Les Titans sont des divinités primordiales, qui existaient avant les dieux dans la mythologie grecque. Alors quand il s’agit de jouer au dieu en bravant la mort, Titan est le lieu parfait, d’autant qu’elle offre une relative cohérence narrative en matière de distance avec la Terre.

Actusf : Jouer avec l'idée des extraterrestres est un des grands tropes de la science fiction. Qu'est-ce que vous aviez envie de faire avec eux ? Pourquoi cette option (plutôt que par exemple une plante au fin fond du Pérou) ?

Thomas Bonicel : En réalité, les extraterrestres sont toujours un prétexte, une excuse, ou une métaphore. Souvent symbole de la rencontre avec l’altérité, ils permettent toujours une prise de recul, une remise en perspective. Dans mon histoire, les extraterrestres ne jouent aucun rôle. C’est à dire pourraient ne pas être là en tant que tels. C’est leur vertu « immortelle » qui m’intéresse. Alors pourquoi pas une plante au fin fond du Pérou ? L’histoire n’aurait pas fondamentalement changé, certes. Le plaisir que j’aurais pris à l’écrire, un peu plus. C’est donc en premier une attirance personnelle.
Surtout, partir hors du cadre terrestre crée les bonnes conditions dans l’esprit du lecteur. L’espace, c’est l’inconnu ultime. Cela fait appel à tout un imaginaire collectif. C’est l’introspection, l’émerveillement et la crainte entremêlées. C’est aussi l’occasion parfaite de prendre une liberté quasiment infinie en tant qu’auteur, et même de basculer vers le fantastique si je le souhaite ! Enfin, l’espace était le terrain de jeu idéal pour créer un drame filial basé sur l’éloignement physique autant que temporel.

Actusf : Le voyage est une des clefs du roman. Vous aviez envie de parler du sacrifice personnel de Pertina qui doit laisser sa fille sur Terre ?

Thomas Bonicel : Le sacrifice personnel de Pertina est important, certes. On retrouve ses états d’âme en tant que mère, ce dilemme moral qui l’anime : sa fille ou l’humanité, pour caricaturer. Ce sacrifice initial est très égoïste. Car personne ne demande l’avis de Thiam, qui grandira seule.
Ce choix de Pertina construit la personnalité de Thiam, voire la définit. Il permet de créer un enjeu simple, fort, et universel. Mais plus que le sacrifice de Pertina, je souhaitais explorer la psychè de sa fille. Jusqu’où peut-elle aller avec le simple espoir, quasiment le mirage, de retrouver une dame qui l’a pourtant abandonnée ? Aime-t-elle sa mère à l’excès, ou devrait-elle la détester ? Une forme de haine envers elle ne pourrait d’ailleurs pas être compatible avec cette attirance qui la pousse dans ses bras ? Donc je voulais surtout parler des conséquences psychologiques sur sa fille, avec une idée en tête, explorée dans le récit : et si Thiam la retrouve, que se passe-t-il après ?

Actusf : Comment pourriez-vous nous présenter Pertina et sa fille Thiam qui va quelques années plus tard partir à sa recherche ? Comment les voyez-vous, vous leur créateur ?

Thomas Bonicel : Pertina est un personnage relativement froid de prime abord. Il ne faut pas oublier qu’elle abandonne sa fille ! Mais le voyage et le temps auront un effet sur sa vision des choses.
Thiam, elle, est fondamentalement seule. Le départ de sa mère lui a interdit toute autre forme d’amour. Elle a développé une obsession au sens propre du terme. Thiam attire plus de sympathie au lecteur que sa mère.
Je vois donc la mère et sa fille comme un tout, qui s’est promis de se reformer grâce à une perspective : que le temps soit aboli par l’immortalité. Comme le premier chapitre l’aborde : si la mort n’existe plus, alors plus rien n’a de conséquence. Pertina est donc persuadée que son choix n’aura pas de conséquences sur le long terme. Hélas…

Actusf : Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous ?

Thomas Bonicel : En premier lieu, j’assure un maximum de visibilité aux Immortelles. Mais j’ai déjà une idée assez concrète de développement d’un nouveau roman, qui concernerait les rêves. Cette fois on resterait sur Terre, avec un récit qui lorgnerait du côté du thriller politique teinté de science-fiction.
J’ai également écrit quelques nouvelles de science-fiction, que je compte compléter avec d’autres cette année.

Jérôme Vincent

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?