Décédé en 2014, Graham Joyce reçut de son vivant deux prix Masterton (2006 et 2009) et un World Fantasy Award en 2003 : autant dire que le bonhomme s’était bâti une sacrée réputation dans le monde anglo-saxon des amateurs de fantastique. Précédemment publié chez Bragelonne, Lignes de vie s’avère un roman très intéressant, parfois agaçant à certains moments (on y reviendra), qui augure bien de l’avenir du fantastique dans la lointaine Albion tentée par le grand large…

 

 

Jeune femme fragile, Cassie Vine vient un soir près de la cathédrale en ruines de Coventry. Elle serre contre elle son bébé. Dans quelques minutes, elle doit le donner à une famille d’accueil, sur les conseils de sa famille. Belle fille d’apparence frivole, Cassie, selon sa mère Martha, n’est pas en mesure d’élever un enfant seule. Cassie attend et à l’heure fatidique, il n’y a personne. Elle décide alors de garder l’enfant au grand dam de sa mère et de ses sœurs, qui essaient de la faire revenir sur sa décision, sans résultat. La famille/gynécée décide alors d’élever collectivement le petit garçon, prénommé Frank. Frank grandit donc, parfois sans sa mère, internée lorsque le quotidien lui paraît insupportable… Cassie souffre en fait de ses capacités « particulières » : elle est capable de parler aux morts, dont son père (ce qui agace profondément sa mère). Et Frank semble avoir hérité de ses capacités, au grand dam des sœurs qui aspirent toutes à une vie normale, après la guerre…

 

 

Véritable chronique familiale, Lignes de vie séduit par son ton : on découvre l’histoire d’une famille anglaise, ses joies et ses peines. Lignes de vie est plein de l’ambiance de la société anglaise de l’époque : des membres de la famille Vine n’hésitent pas à s’engager, avec la foi du charbonnier, dans la construction d’une société nouvelle et plus juste.  Remarquons aussi que les interventions des morts s’intègrent parfaitement dans le quotidien de la famille Vine (surtout Cassie et Frank), accentuant une impression d’étrangeté familière… Dans le dernier tiers du roman, le récit du bombardement de Coventry, vu par les yeux de Cassie, éclaire l’intrigue et explique certains de ses comportements jugés dérangés. Cependant, ce roman frôle parfois la mièvrerie, surtout lorsque sont évoqués les problèmes sentimentaux de certains personnages… Reste que cela fait partie des buts du roman et des intentions de l’auteur manifestement.

 

 

Pour les moments de ce fantastique du quotidien qui rappelle les meilleures nouvelles de Mélanie Fazi (ici traductrice), Lignes de vie est cependant à découvrir.