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Mers Mortes, le nouveau roman d'Aurélie Wellenstein
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Mers Mortes, le nouveau roman d'Aurélie Wellenstein

A l'occasion de la parution de Mers Mortes, aux éditions Scrineo, le 14 mars prochain, découvrez une interview d'Aurélie Wellenstein.

Actusf : Pour commencer, est-ce qu'on pourrait faire un retour sur les Loups Chantants. Quel regard portez-vous sur ce roman ? Quelle place a-t-il pour vous dans votre bibliographie ?

"C’est fascinant d’ailleurs la force symbolique qu’a cet animal. Depuis les forêts anciennes jusqu’au bitume de nos villes, il fait résonner beaucoup de choses sur nous, nos émotions et notre inconscient."

Aurélie Wellenstein : Une place assez à part. Les Loups chantants est peut-être le roman qui est le plus proche de moi, le plus personnel. Derrière des filtres, j’y ai relaté ce que je traversais à l’époque, la période la plus noire du deuil. J’ai toujours un peu de mal à en parler, de ce que dit vraiment ce texte, au-delà de l’aventure nordique, de la course contre la montre entre les chiens et les loups. C’est fascinant d’ailleurs la force symbolique qu’a cet animal. Depuis les forêts anciennes jusqu’au bitume de nos villes, il fait résonner beaucoup de choses sur nous, nos émotions et notre inconscient. Je le vois beaucoup en dédicace : il se passe quelque chose quand la personne capte le regard de la louve sur la couverture. Souvent les lecteurs me relatent leur lien avec le loup, l’admiration, la crainte,… C’est complexe et très intéressant.

Actusf : Dans quelques jours, votre nouveau roman Mers Mortes arrive en librairie. Quelle est l'idée de départ de ce nouveau récit ?

Aurélie Wellenstein : A la base, j’avais envie d’écrire sur le syndrome de Stockholm, la relation entre un otage et son ravisseur, et mettre en scène l’évolution émotionnelle des deux personnages.

J’ai eu cette idée en écoutant une émission de radio sur l'affaire « Patricia Hearst ». Patricia Hearst était l’héritière d’une très riche famille. Promise à un avenir doré, elle a été enlevée par un mouvement d'extrême gauche américain. La jeune fille aurait alors progressivement épousé la cause de ses ravisseurs, allant jusqu’à participer à un braquage de banque avec eux. On met souvent en avant sa présumée embardée hors des chemins tracés par sa richissime famille. Elle aurait alors dévié de sa trajectoire pour faire le choix de la radicalité et de la marge. Sans être certaine de la réalité de l’engagement révolutionnaire de Patricia Hearst, c’est en tout cas une histoire qui m’a interpellée.

De la même manière que cette jeune femme, Oural, par son enlèvement, va subitement être confronté au côté obscur d’une réalité dont il ignorait l’existence.

Actusf : Il y est question d'écologie et de cause animale. Dans tous vos romans, vos futurs ne sont pas très joyeux. Est-ce que l'écriture est pour vous une manière de pousser un cri d'alarme ?

"C’est un sujet de fond, qui préoccupe tout le monde."

Aurélie Wellenstein : Je crois qu’on retrouve dans de nombreux récits SFF ce climat d’inquiétude écologique. Je suis quasi sûre que cela va même prendre de l’ampleur. C’est un sujet de fond, qui préoccupe tout le monde. On se sent désemparé, avec l’impression que quoi qu’il arrive, on se dirige vers des heures sombres. Je suis très pessimiste pour l’avenir.

Actusf : Est-ce que vous pouvez nous parler des exorcistes ? Qui sont-ils ?

Aurélie Wellenstein : Dans cette histoire, la mer a disparu. Et elle revient régulièrement sous la forme de marées hautes fantômes. C’est une sorte de brume qui déferle sur le monde et se retire au bout de quelques heures, mais durant ce laps de temps, les humains deviennent la proie des poissons fantômes. Les spectres portent encore les terribles blessures que leur ont infligées les humains. Ils errent, à moitié fous de douleur, partageant avec leurs congénères les souvenirs des grands massacres dont ils ont été les victimes. Leurs assauts sont très violents et radicaux : ils sont capables d’arracher l’âme d’un homme en traversant son corps. Du coup, le seul bouclier dont dispose l’humanité survivante, c’est les exorcistes. Ces hommes et ces femmes sont pourvus du don d’exorciser les animaux fantômes, de les faire disparaitre.

Actusf : Et pouvez-vous nous dire un mot de votre héros, Oural ?

Aurélie Wellenstein : Oural appartient donc à la caste des exorcistes. Il a toujours vécu retranché derrière les murs d’un imposant bastion de pierre et il protège les siens durant les marées hautes. Mais Oural a un petit secret : depuis l’enfance, il est ami avec un dauphin fantôme.

Tout le roman se passe de son point de vue. J’ai beaucoup aimé construire l’autre héros du roman, Bengale, le capitaine des pirates, à travers ses yeux, à travers sa subjectivité. L’autre homme renvoie d’abord une image impitoyable et glaciale, avant que les angles s’adoucissent au fur et à mesure qu’Oural apprend à le connaître.

Leur relation est au cœur de roman.

Actusf : La mer semble se venger dans votre roman. Quelle relation avez-vous avec le milieu marin ?

Aurélie Wellenstein : J’ai dû mourir noyée dans une vie antérieure. Je déteste perdre pied et encore plus sentir la profondeur de la mer sous moi (j’ai le vertige des profondeurs). Pour Mers mortes, je m’étais fait une collection d’images très impressionnantes : la gueule d’un requin à quelques centimètres de la surface, un bébé dans une bouée qui flotte sur une eau complètement noire, les gouffres sous l’eau, etc. Rien qu’en les regardant, j’ai le cœur qui accélère.

Mais bien entendu, j’aime tous les animaux, absolument tous les animaux. Dans Mers mortes, les animaux sont des victimes. On va découvrir peu à peu les tragédies qui les frappent (surpêche, massacre, barbarie, pollution, etc). Mon objectif est vraiment que le lecteur entre en empathie avec les animaux marins. Et très concrètement, je reverse 10% de mes droits d’auteur à l’association Sea Shepherd.

Actusf : Vous êtes à quelques semaines de la sortie de Mers mortes. Comment vivez-vous cette période ?

"Là où le Dieu-Oiseau est frontal et brutal, Mers mortes est plus hypnotique et onirique, même si le message qu’il véhicule est lui aussi assez dur."

Aurélie Wellenstein : Je suis impatiente d’avoir les retours de lecteurs. Un peu anxieuse forcément, d’autant plus que le Dieu-Oiseau a été très bien accueilli et que je redoute toujours un peu les comparaisons d’un roman à l’autre. Mers mortes est assez différent. Là où le Dieu-Oiseau est frontal et brutal, Mers mortes est plus hypnotique et onirique, même si le message qu’il véhicule est lui aussi assez dur.

Actusf : Quelles sont vos prochaines dates de dédicaces ?

Aurélie Wellenstein : Les Oniriques à Meyzieu ; le salon du livre de Paris ; Trolls et Légendes à Mons (Belgique) ; la librairie Chimère à Châtillon le 18 mai ; et les Imaginales.

Actusf : Sur quoi travaillez-vous ? Quel sera votre prochain roman ?

Aurélie Wellenstein : Un roman de fantasy adulte, sans titre à ce jour. C’est un récit plus long que d’habitude, psychologiquement assez fouillé et j’espère, assez dérangeant. Cela raconte l’expansion d’une forme de psychose virale, une schizophrénie transmissible par voie sexuelle, qui se répand dans une ville en quarantaine. On suit le combat d’un homme malade. Il va tout faire pour s’en sortir, y compris le pire.

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