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Permutation mentale

Jacques Martinache (Traducteur), Damon Knight ( Auteur), José De Huescar (Illustrateur de couverture)
Langue d'origine : Anglais US
Aux éditions : Collection :
Date de parution : 31/03/1979  -  livre
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Permutation mentale

Bien connu pour ses activités dans le monde de l’édition au cours des années cinquante, à l'apogée de la presse pulp (Fantasy and science fiction, If…), Damon Knight a également laissé une empreinte durable sur la littérature de genre grâce à son travail de critique et d’essayiste, pour lequel il a été récompensé d’un prix Hugo en 1956. Bien des amateurs se souviendront en particulier de son article polémique traduit en France dans le n° 102 du magazine Fiction : « A. E. Van Vogt, gâcheur cosmique », qui provoqua l’ire de plus d‘un zélateur de l’homme du non-A. Ce coup d’éclat ne doit pourtant pas éclipser son œuvre d’auteur de fictions, qui compte une vingtaine de romans et bien plus encore de nouvelles, un domaine dans lequel il excellait particulièrement. Il y fit souvent preuve d’un sens de l’humour sheckleyien, assorti d’un regard très critique sur la société de consommation et ses dérives. Notons encore les nombreuses anthologies qu’il dirigea et dont l’une, en 1965, fut consacrée à la science-fiction française, avant de nous plonger dans Permutation mentale

Jeux d’humains, jeux de vilains…
 
Il ne faut pas jouer avec l’espace-temps ! Les lois de la physique sont implacables et tout déplacement de matière dans le passé ou l’avenir cause inévitablement des perturbations… Ces conséquences seront particulièrement fâcheuses pour Fritz, la créature extraterrestre exposée au zoo de Berlin, et pour le bipède Martin Naumchik, qui se trouvait là au mauvais moment. En échangeant leurs corps respectifs, ils vivront des expériences dont ils se seraient bien passés. L’humain se retrouvera prisonnier du zoo, exposé au regard de la foule des badauds amusés par sa ressemblance avec un perroquet végétal et intrigué par la conduite craintive de la femelle avec qui Martin-devenu-Fritz partage sa cage de verre. Quant à l’extraterrestre, il errera dans la capitale allemande sans bien comprendre ce qui lui arrive. Il est bien difficile d’assimiler les usages de la Terre lorsqu’on vient d’une planète située à des millions d’années-lumière de là…

L’échangisme, une pratique bien ancrée dans la SF…
 
En littérature comme dans d’autres domaines, une idée particulière peut donner lieu à bien des variations sans que l’on doive forcément crier au plagiat. De la même façon que la suite d’accord simplissime du blues classique a donné plusieurs centaines de milliers de chansons différentes, un certain nombre de récits ont ainsi employé le ressort de l’échange corporel. La science-fiction n’a pas attendu 2009 et Avatar, le blockbuster de James Cameron, pour se pencher sur la question. Parmi les textes les plus connus, nous trouvons Robert Sheckley avec au moins un roman et des nouvelles comme « Invasion avant l’aube ». Citons également pour mémoire L’idiot roi de Scott Baker, L’Esprit de la chose (The Mind Thing) de Fredric Brown en 1961… En 1965, la même année que Sheckley et son fameux Échange standard, Damon Knight optera lui aussi pour une approche humoristique du concept (notons au passage la curieuse similarité des titres originaux, Mindswap pour Sheckley et Mind switch pour Knight…) Objet d’une commutation mentale, Fritz l’extraterrestre découvre la société humaine avec une innocence qui préfigure Pardon, vous n’avez pas vu ma planète ? de Bob Ottum et rappelle Les Erreurs de Joenes du grand Robert, le Candide de la SF. Les déboires du pauvre Fritz chez les bipèdes constituent rapidement l’indispensable complément à ceux du journaliste, piégé dans une cage avec une alien dont il a bien du mal à comprendre le comportement. Notre extraterrestre en balade dans Berlin se montrera-t-il plus adroit lorsqu’il fera la connaissance de la petite amie du journaliste dont il a pris la place ? Permutation mentale ne révolutionne peut-être pas le genre mais, avec une idée de départ assez simple et un traitement qui l’est tout autant, le roman tient largement ses promesses. Suffisamment, en tous cas, pour convaincre ses lecteurs de hanter les bouquinistes pour chercher (et trouver !) au moins un des recueils de nouvelles de l’auteur : Le livre d’or ou, à défaut, Les univers de Damon Knight.

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