Aujourd’hui, les éditions ActuSF continuent leur campagne Ulule pour le livre Révolution, sur toutes les révolutions de l’imaginaire, en dévoilant des extraits de l’article de Justine Niogret qui y sera publié !
Juste après avoir dépassé le palier des 7000 € qui permet de débloquer une impression de l’ouvrage en bichromie, le prochain palier de 9000 € vous offrira encore plus de goodies. Pour vous remercier, ils ont décidé de vous dévoiler un morceau de l’article de Justine Niogret, sur la réécriture de l’histoire par les vainqueurs. Un sujet qui nous est cher tant il est actuel, indémodable ; les exemples sont multiples dans les médias de l’imaginaire et Justine Niogret s’appuie sur un corpus pour le moins… éclectique. En tirant des parallèles entre l’histoire de l’humanité et Pokemon, The Last of Us, Tolkien en passant par le Cycle des Seuils et d’autres encore, l’experte propose une analyse extrêmement poussée du sujet.
En voici quelques bribes :
« L’histoire est écrite par les vainqueurs. »
Cette phrase, que la légende attribue à Winston Churchill mais anonyme, peut sembler d’une limpidité évidente, être l’une de ces citations relevant du simple bon sens.
Mais pourquoi cette affirmation semble si évidente aux cultures pouvant être définies comme dominantes et occidentales, à leurs façons de lire le monde ? Ont-elles pratiqué, et pratiquent-elles encore, un lien, factuel, entre l’écriture de l’histoire et les vainqueurs ? Se trouve-t-il réellement, dans cette phrase, une logique entendue par les individus qui les composent ? Fait-elle réellement, et profondément, partie de leurs coutumes ? Et dans ce cas, comment la mettent-ils en œuvre ? Sont-ils allés jusqu’à l’intégrer à leurs mondes imaginaires ? Et, surtout, sont-ils capables d’imaginer un autre rapport à la victoire et à l’écriture de celle-ci ?
Le champ lexical et les thèmes développés sont résolument guerriers et agressifs, ainsi que l’univers en lui-même, dont nous nous permettons de résumer un passage ici : lorsque, dans les jeux vidéos de la licence, on vainc un pokémon sauvage en combat, on en devient le maître, le « dresseur ». La première proposition faite au joueur ou à la joueuse, une fois la victoire remportée, est de renommer la créature.
Ajoutons une note sur le traitement réservé au vaincu : son anonymisation, sa silenciation, la destruction de son histoire, l’utilisation de ses restes comme support scientifique ou de curiosité, par exemple, peut créer le désir de ne pas se projeter, ou s’imaginer, à sa place. Il est bien plus confortable de vivre en s’imaginant partager un état, une situation, avec les visiteurs d’un musée, plutôt qu’avec un individu anonyme dont la tête, coupée, est exposée derrière une vitrine. Ignorer la culture de l’Autre, lui faire subir un traitement douloureux, méprisant ou angoissant, c’est aussi dresser une barrière entre l’individu actuel, qui n’a pas participé au conflit, et le vaincu.
L’univers de The Last of Us considère donc que « nous » possédons les clefs de lecture traditionnelles des cultures dominantes occidentales : y compris cette évidence du « l’histoire est écrite par les vainqueurs ». Et pourtant, dans ce monde, les vainqueurs n’écriront, jamais, aucune histoire. Ils sont infectés par le cordyceps, ont perdu tout usage de la parole, ainsi que d’une intelligence capable de manipuler l’écrit.
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