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Tè Mawon - Les secrets d'écriture de Michael Roch
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Tè Mawon - Les secrets d'écriture de Michael Roch

A l'occasion de la parution de Tè Mawon, Michael Roch revient sur l'écriture de ce nouveau roman paru aux éditions La Volte.

A noter également que Michael Roch est le Coup de cœur des Imaginales 2022.

Actusf : Après Le Livre jaune, paru en 2020, vous voici de retour avec Tè mawon, aux éditions La Volte. Comment est né ce roman ?

Michael Roch : Ce roman est né de l'envie d'apporter à l'imaginaire une représentation plus centrée des sociétés afrodescendantes. Bien avant Moi, Peter Pan et Le Livre Jaune, finalement, l'idée était déjà là, d'aller explorer le futur de tels personnages.

Actusf : De quoi cela parle-t-il ? Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

Michael Roch : Tè Mawon suit la quête d'une bande de débouya persuadés que la terre perdue de leurs ancêtres, le Tout-Monde, est restée cachée, quelque part sous l'immense mégalopole qu'est devenu l'arc antillais, à l'horizon 2070. C'est une quête identitaire forte et complexe qui leur demande de déconstruire – littéralement – les fondations de Lanvil.

Actusf : À travers ce texte, qu’aviez-vous envie d’aborder ?

Michael Roch : J'avais envie de parler la diversité – des diversités – qui anime la société caribéenne, qui ne pourrait se résoudre à une identité-racine, car Lanvil est cosmopolite et a pour fondation un coup de machette dans le tronc de l'Humanité.

Actusf : Tè mawon est le premier roman de science-fiction caribéen francophone. Comment définiriez-vous cette SF ? Est-ce également de l’afrofuturisme ou est-ce différent ?

Michael Roch : C'est effectivement un afrofuturisme, à ceci près qu'il prolonge les récits afrocentrés venus des territoires nord-américain ou africain, car il entre en relation avec l'ensemble des cultures présentes sur la Caraïbe : amérindiennes, africaines, européennes, asiatiques et proche-orientales. C'est un afrofuturisme qui entre en relation avec le processus à l'origine de la société caribéenne : la créolisation, c'est-à-dire la rencontre brutale et accélérée de plusieurs cultures ainsi que la création d'une nouvelle culture à partir de ces apports divers.

Actusf : Imaginer le futur des Antilles est-il radicalement différent d’imaginer le futur de nos sociétés occidentales ?

Michael Roch : Je ne sais pas. Si cette différence est effectivement radicale, cela pourrait être le fait que la pensée fondatrice d'une société caribéenne a été construite in situ et n'a jamais vraiment été travaillée dans l'imaginaire occidental…
Je ne pense pas que ce soit radicalement différent. Les phénomènes de créolisation ne sont pas le seul fait des Antilles. On retrouve se processus dans de nombreuses autres régions du monde, ou de nombreuses villes cosmopolites. Penser le futur y serait sans aucun doute le même : penser le futur des Antilles, c'est aussi présager d'un devenir du monde.

Actusf : Dans Té mawon, on suit plusieurs personnages, Pat, Joe, Ezie ou encore Lonia. Qui sont-ils ? Comment les avez-vous créés ?

Michael Roch : Pat, Joe, Ezie et Lonia sont les multiples facettes de cette quête pleine d'espoir d'un monde meilleur. Il fallait plusieurs personnages pour exprimer et faire l'expérience de la diversité de Lanvil. Cela reste néanmoins une petite part de cette diversité. Ils ont été pensé par couple, Pat et My Flingue, Joe et Patson, Ezie et Lonia, aussi dans un souci d'une représentation équitable en âge, en genre, en intention…

Actusf : On peut également voir Lanvil comme un personnage à part entière, qu’en pensez-vous ?

Michael Roch : Oui, même si elle est peut explorée – car assujettie aux déplacements des personnages, à leur habitus. On la retrouvera néanmoins dans plusieurs de mes autres nouvelles pour s'en faire une idée plus précise et complète. Ou bien dans mes prochains ouvrages… Lanvil s'étend dans l'espace et le temps, presque comme la Jerusalem d'Alan Moore.

Actusf : Comment avez-vous travaillé ? Avez-vous dû faire beaucoup de recherches pour créer votre univers ? Quelles ont été vos sources d’inspiration ?

Michael Roch : L'écriture du roman a demandé 3 ans d'attention, une bourse du Centre National du Livre qui a cru en ce projet, de nombreux entretiens pour l'apprentissage personnel de la langue créole, de nombreux relecteurs et relectrices pour éviter qu'on se perde trop dans les dédales de Lanvil. Toutes mes sources d'inspirations viennent de la culture populaire, ce que les films, les séries, les romans, les essais, les clips musicaux, mon vécu aussi, oui, ont imprimé en moi et sur moi, comme un corps-palimpseste, pour être régurgité comme une définition plus précise, plus nette et plus éclairée de ma pensée.

Actusf : Les Imaginales viennent d’annoncer que vous étiez leur Coup de cœur 2022. Qu’est-ce-que cela vous a fait ?

Michael Roch : C'est absolument génial. C'est un super honneur qui m'est fait et j'en suis tout à fait heureux. Comment pourrais-je l'être autrement ?

Actusf : Et maintenant, sur quoi travaillez-vous ?

Michael Roch : Je travaille sur le prochain roman : Les Choses immobiles. Toujours aux Antilles. Toujours de l'anticipation. Mais quelque chose de plus centré sur un voyage émotionnel.

Actusf : Où peut-on vous rencontrer dans les semaines à venir ?

Michael Roch : D'abord sur le net. Toujours sur le net : Twitter, Instagram et Facebook (@mchlroch), je suis très accessible. Sur Twitch aussi, tous les jeudis soir à 20h pour des ateliers d'écriture en live. Et je communiquerai très bientôt sur les festivals où je serai présent ce semestre (Les Intergalactiques, Colères du Présent, les Imaginales et Étonnants Voyageurs, entre autres…)

Actusf : Enfin, pourrais-tu également nous présenter 3 textes d’afrofuturisme que tu trouves incontournables ?:)

Michael Roch : Je conseille Rosewater, de Tade Thompson, Qui a peur de la Mort, de Nnedi Okorafor et Nos jours brûlés, de Laura Nsafou à toutes celles et ceux qui souhaitent se familiariser avec le genre. C'est une redécouverte, je n'en dirai pas plus pour ne rien gâcher des expériences de lecture.

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