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Trois bonnes raisons de lire Dans l'ombre de Paris de Morgan of Glencoe
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Trois bonnes raisons de lire Dans l'ombre de Paris de Morgan of Glencoe

Si vous hésitez encore à découvrir Dans l’ombre de Paris de l’autrice Morgan of Glencoe, on va vous donner trois bonnes raisons de vous y plonger.

Il s’agit du premier tome de la pentalogie La Dernière Geste, une série young-adult, éditée dans la collection Naos des éditions ActuSF. Bien que dite young-adult, cette saga conviendrait tout à fait à des amateurs adultes de fantasy. La plume de l’autrice saura vous en convaincre.

On suit Nekohaima Yuri, princesse japonaise de haut rang, qui, recevant une lettre de son père l’ambassadeur du Japon en France, s’empresse de le rejoindre. À son arrivée, elle a la mauvaise surprise d’apprendre que son père l’a promise à l’héritier du trône de France. Bien que l’héritier semble être un parti parfait, Yuri ne l’aime pas et ne souhaite pas s’attacher au royaume français. C’est alors que la reine lui son offre un choix : rester et suivre les conventions sociales ou partir et découvrir l’inconnu. La princesse va alors plonger au cœur d’un nouveau monde, où les créatures magiques, redoutées des hommes, côtoient les humains en toute égalité. Yuri réussira-t-elle à s’adapter ou les mènera-t-elle à leur perte ? Et quels liens unissent réellement la reine de France, son père, sa défunte mère, le roi de France et Sir Edward ?

Originaire de Bretagne, Morgan of Glencoe est une passionnée de légendes, de mythes et d’imaginaire. Elle commence la musique très jeune et joue de la harpe celtique depuis ses 13 ans, en parallèle de sa passion pour l’écriture. De 2010 à 2017, elle est membre d’un groupe de musique professionnel, les Ménestrels des Terres de Lune, avant de lancer sa carrière solo. Dans un même temps, l’artiste se lance dans l’édition avec l’autopublication, en 2016, du premier tome de la Dernière Geste, alors nommé Si loin du Soleil. Le livre parcourt son chemin jusqu’à finir entre les mains d’Audrey Alwett, directrice de collection chez ActuSF. L’ouvrage est alors retravaillé et republié, avec un nouveau titre. Il remporte deux prix : le prix Elbakin ainsi que le Prix Vampires & Sorcières. Un franc succès qui continue encore aujourd’hui, avec le second tome, L’Héritage du rail, paru fin 2020.

Un univers fascinant et complexe

Le récit se déroule au XXe siècle, dans un monde uchronique, proche du nôtre, qui mêle à la fois technologie et ambiance médiévale. La royauté française a survécu et le royaume de France s’étend hors de nos frontières, sur l’Europe. La France, première puissance, se partage le monde avec l’Empire Japonais, assez proche du pays que l’on connaît, ainsi qu’avec le Sultanat Ottoman, peu représenté dans ce premier tome. Cette triade réfractaire et raciste envers les fées, s’oppose au pays de Keltia, un ensemble d’états indépendants où les gens vivent en harmonie avec les êtres surnaturels. On pourrait s’attendre à un univers manichéen, mais au fil des pages et des révélations, Morgan of Glencoe dépeint des sociétés imparfaites, riches, complexes au passé douloureux et qui font face à des problématiques majeures, qu’elles soient politiques, économiques ou religieuses.

À travers ses divers personnages, l’autrice nous offre plusieurs visions de ce monde : celle de la ville de Paris, avec les riches d’un côté et les pauvres de l’autre, avec la ségrégation raciale entre les humains et les fées ; celle des égouts, sous Paris, une communauté où chacun y met du sien en fonction de ses compétences et où chacun participe aux décisions ; celle de Keltia, un pays lointain, libre et indépendant, dont tout le monde parle, mais dont on ne sait pas encore grand-chose et enfin, la vision du rail, une sorte de grande famille vivant dans un train qui parcourt le monde et où la violence n’a pas tout à fait disparu, une sorte d’entre-deux.

Des personnages profonds

Lorsque Yuri découvre un second Paris, celui des égouts, celle-ci fait face à une communauté humble et égalitaire où les fées et les humains vivent en harmonie. De quoi laisser la jeune femme pantoise, elle qui n’a connu qu’une éducation japonaise traditionnelle, sexiste et élitiste. C’est là que se joue le premier enjeu pour Yuri, s’adapter. Si ses premiers pas dans ce nouveau monde seront maladroits et difficiles par moment, la princesse va découvrir des valeurs différentes, se faire faire des amis et réveiller en elle une sensibilité qui lui est propre. Peu à peu, Yuri va se forger un caractère et sortir du carcan de son éducation stricte. Et à l’aide sa nouvelle amie, Bran, une selkie bleue elle-même marquée par la vie et la perte, celle-ci va mûrir et prendre conscience du monde qui l’entoure. Yuri en profitera alors pour en apprendre davantage sur sa mère, décédée lorsqu’elle était jeune, et qui était originaire de Keltia, dernier pays libre pour les créatures magiques.

Au-delà de la quête initiatique de Yuri, c’est également le récit d’une lutte pour la survie des cultures différentes que l’on retrouve en filigrane du récit.

D’une manière générale, tous les personnages qui gravitent autour de Yuri ont une profondeur. On apprend à les connaître au fur et à mesure, et certains peuvent paraître brusques, mais ils restent humains. Ils sont forts, libres, différents, mais profondément humains ; ils ont des sentiments, une histoire, une personnalité et du charisme. Personne n’est laissé sur le bas-côté, chacun dispose de son petit quelque chose et cela en fait une force. Ils forment un tout, et on s’attache à cette communauté éclectique.

L’utilisation d’un bestiaire celtique donne une touche particulière et se marie d’autant mieux avec la profondeur des sentiments dont fait preuve Morgan of Glencoe dans son écriture.

« — De l’amitié entre un homme et une femme, sans le moindre… pardonnez-moi, mais je ne suis pas certaine que cela soit possible.

— Si vous voyez en quelqu’un un homme ou une femme avant d’y voir un être humain, peut-être. Si vous le considérez comme un individu à part entière, tout devient différent. Mais beaucoup de gens pensent comme vous. Trop de gens. À réfléchir en termes de sexe et de genre, ils ne voient plus que ça. Tout comme ils voient les gens comme leur propriété. Ma femme, mes enfants… Parfois, ça me donne envie d’être une Selkie, vous savez. Les Selkies ne possèdent rien, et surtout pas les autres. Elles ne connaissent pas la jalousie, puisqu’elles ne connaissent pas l’appartenance. »

Une plume poétique

À l’aide d’une plume fluide et harmonieuse, Morgan of Glencoe nous immerge dans son récit. La musicalité des personnages et des langues renforce l’authenticité et la profondeur des dialogues. En effet, certaines phrases ne sont pas forcément traduites, le français s’accompagne de breton, d’anglais voire même de keltien. Étant barde elle-même, il n’est pas étonnant de retrouver une certaine poésie dans ses mots et la palette d’émotions qu’elle nous offre à travers ses personnages. C’est riche et puissant, mais tout en gardant une finesse et une subtilité d’écriture ce qui permet d’allier de l’action à des descriptions, et ce, dans un style littéraire juste, ni trop familier, ni trop ampoulé, ni trop naïf.

S’appuyant également sur un folklore celtique très riche, l’autrice en profite pour défendre des valeurs importantes telles que la liberté de choix, la tolérance ou encore l’égalité. Et s’il est question de fées, celles-ci n’ont rien avoir avec nos traditionnelles petites créatures.

« Une musique bleue pleuvait en parfums de lune un peu partout sur le vent, et dans les brumes transparentes dansaient des lueurs sucrées d’acier soyeux. En tout cas, se dit-il, c’était un endroit agréable. Il le connaissait sans doute depuis toujours, cet endroit secret, et il le découvrait pour la première fois à l’instant, ce qui n’avait pas vraiment d’importance, car cet instant était toujours. »

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