On ne connait pas ici Vincent Gerber, historien et militant proche dans l’esprit des libertaires et des écologistes. Notons qu’il préside l’association des « Amis de la Maison d’Ailleurs » en Suisse. Son essai L’imaginaire au pouvoir remet en lumière la façon dont la Science-fiction s’intéresse à la politique et à l’utopie : rien que cela !
SF et politique
Diantre, dirait mon vieux père, la SF fait de la politique ? De fait, elle a longtemps été vu comme du divertissement, sans compter les cuistres qui en faisaient de la sous-littérature. Mais le genre s’intéresse à l’avenir. Si beaucoup d’auteurs se contentent de décalquer la société présente en la modernisant (une tendance chez Poul Anderson, contrebalancé par son individualisme libertarien), ils ne peuvent pas complètement faire abstraction de la politique. Ainsi, à la télévision, un Gene Roddenberry a accompli un geste politique en donnant majeur à une jeune actrice noire pleine de talent, Nichelle Nichols, dans le feuilleton Star Trek, fresque dépassant la querelle raciale qui empoisonne les Etats-Unis. La New wave et la SF politique en France ont proposé au genre des histoires souvent politiques, mettant en question la société actuelle (songeons à Jack Barron et l’éternité de Spinrad). De quoi donc décoder les failles de notre système et ses possibles dérives. Mais quid de l’utopie ?
L’utopie de science-fiction
La dystopie est présente depuis longtemps dans nos imaginaires : songeons à l’impact du 1984 de George Orwell. Cependant, des auteurs comme Dick, Ursula Le Guin ont aussi bâti des intrigues proposant des modèles alternatifs de sociétés, des sortes d’utopies. Dick avec Loterie solaire remet au goût du jour le tirage au sort des dirigeants et Le Guin avec Les dépossédés peint elle une société anarchiste. Iain Banks avec son cycle de la Culture propose avec son roman une société galactique gérée par des IA plutôt bienveillantes (mais avec des travers, lisez le cycle). Kim Stanley Robinson joue avec le thème de l’utopie avec passion, tant avec sa trilogie sur la terraformation de Mars qu’avec son dernier roman Le ministère du futur. Au final, voici un excellent essai de Vincent Gerber qui souligne bien que nous avons besoin d’utopies pour bâtir le monde de demain (mais en restant toujours critique), surtout dans ce moment si incertain et anxiogène.
Sylvain Bonnet