charlotte
- le 31/10/2017
Quai des Brunes
Grand Vampire revient pour notre plus grand plaisir. Joann Sfar, son créateur, lui redonne la parole et nous gratifie d'une aventure supplémentaire. Sfar est un scénariste-dessinateur comblé, ses bandes dessinées sont un succès auprès du public d'une part mais aussi auprès de la critique qui voit en lui un des grands acteurs et créateurs du 9ème Art. Il a à son actif un nombre de séries impressionnant. Trop prolixe pour être honnête ? Peut-être, s'il ne faisait pas preuve d'un talent évident et d'une générosité à toute épreuve. Son plaisir est le plus souvent communicatif, transcendant le média pour toucher réellement le lecteur. Ses personnages de papier prennent vie et l'on se surprend à croire en son monde imaginaire qu'il ne cesse de développer selon deux voies, d'un côté l'univers de Donjon (le cinquième tome de Donjon Monsters vient de sortir) et de l'autre le reste de ses BD qui sont les composantes d'un même univers d'où les nombreuses apparitions en " guest star " de personnages possédant leur propre série. On peut suivre les aventures de Grand Vampire après sa " régression " dans la série Petit Vampire qui paraît également chez Delcourt.
Entre enquête policière et intrigues amoureuses, la vie de Fernand est une nouvelle fois bien remplie.
La police est sur les dents, un tueur en série fait des ravages dans la ville. Le problème est qu'il n'opère que de nuit, d'où les planques répétées depuis dix jours qui commencent à lasser Humpty Dumty et l'ami Vincent. Ils font alors appel à Fernand qui est le candidat idéal pour les enquêtes de nuit. Le vampire accepte à contre cœur parce qu'en ce moment, il a autre chose à faire que d'aider la police à faire son travail. Il a envie d'être amoureux, il ne reste plus qu'à se trouver une fille. Plus facile à dire qu'à faire.
Plus noir que le précédent tome.
L'album s'ouvre sur une énième aventure amoureuse avortée de Fernand, et quelques pages plus tard on assiste à une volée de râteaux dans la plus grande tradition du genre. On notera le changement de comportement de Fernand avec les représentantes de la gent féminine, il est plus entreprenant et plus téméraire qu'avant, mais cela ne l'empêche pas d'être toujours aussi embourbé dans ses histoires sentimentales et de désespérer de se trouver une copine. Ah, il n'y rien de plus compliqué que les relations entre les hommes et les femmes, et ce grand adolescent de vampire ne parvient pas à y trouver de solution. C'est plus simple lorsqu'il s'agit des autres à l'instar de ce couple d'automates sans bouche qui n'ont de cesse de pleurer depuis qu'ils ont été séparés par un marchand véreux, la solution est vite trouvée : il faut les réunir. Au-delà des intrigues amoureuses qui sont au centre du récit, on voit Fernand se transformer en " enquêteur de terrain " et suivre la piste d'un tueur en série qui massacre les jeunes filles de la ville. Il y perdra sa conscience. L'humour est plus noir que dans les tomes précédents, mais ce n'est pas pour nous déplaire. La planche 25 restera certainement dans les annales de la BD, tant elle est drôle, originale et inattendue. Sfar prouve qu'il sait jouer des possibilités que lui offre la bande dessinée et c'est jubilatoire. Mais on n'en dira pas plus de peur de gâcher l'effet de surprise. Le plaisir de la lecture vient aussi des clins d'œil qui parsèment la série, on ne peut s'empêcher de lire Quai des Brumes pour le titre et on est surpris de trouver au détour d'une case l'évocation du "Katabar", haut lieu de la vie nocturne de la place Pigalle bien connu des "Métalleux", "Gothics" et autres…