Ancien hippie allergique à la ganja, ça ne s'invente pas, auditeur libre de la contre-culture sixties, cursus normal de freaks à San Francisco (où son allergie lui attire un temps la réputation d'être un agent des stups) et de baba au Nouveau-Mexique, John Varley se décide un beau matin de 1973 à devenir écrivain de SF. Premier essai pas vraiment concluant, et 4 ans plus tard il écrit d'un jet Le canal ophite, qui fait soudain de lui "le nouveau Heinlein", rien de moins. C'est donc une sorte de classique que Folio SF exhume une fois encore du catalogue PdF. Baptême du feu, où il pose les fondations de l'univers qui sera par la suite le théâtre de la majeure partie de ses romans et nouvelles : Les Huit Mondes.
Condamnée à mort
Lilo a été condamnée à mort, et attend en prison l'heure de son exécution. Et ce n'est pas une mince affaire que de condamner quelqu'un à une mort définitive, maintenant que le Canal Ophite traverse l'univers de part en part.
Le canal est un laser émis depuis Ophuicus 70, et porteur d'informations scientifiques en avance de plusieurs siècles sur la technologie humaine. Nul ne sait pourquoi les Ophites mettent depuis 400 ans ces informations à notre disposition, mais tout le monde les utilise. C'est grâce à elles par exemple que les Humains, chassés de la Terre par de mystérieux Envahisseurs, qu'ils n'ont d'ailleurs jamais vus, ont pu essaimé dans le système solaire. Grâce à elles encore qu'ils ont pu expérimenter le clonage ou manipuler l'ADN de plantes pour les adapter à la vie en milieu confiné que leur impose leur exil.
Toutes les données ne sont pas exploitées toutefois. Ainsi, la législation des Huit Mondes interdit-elle sous peine de mort, la manipulation de l'ADN humain. Ce qui nous ramène à l'avenir très limité de Lilo.
Coupable de s'être essayée à des mutations génétiques sur matériel humain, elle attend la mort définitive, ce qui implique aussi l'effacement de toutes ses copies de sauvegardes. Alors bien-sûr, lorsque Tweed, l'ancien président des Huit Mondes lui propose de la faire évader, elle accepte.
La trame se complique au fur et à mesure
Si le retors politicien a de grands projets pour la reconquête de la Terre, il a aussi un gros problème. Il vient d'intercepter un message en provenance du Canal Ophite, qui ressemble fort à une demande de paiement pour utilisation des données en provenance d'Ophuicus 70. Sans quoi l'Humanité s'expose à des "sanctions sévères".
Sur une base simple la trame se complique à mesure qu'entrent en scènes les clones de Lilo, et des personnages secondaires de l'histoire. Des histoires devrai-je dire, puisque rapidement nous nous retrouvons à suivre trois intrigues croisées, menées par les mêmes protagonistes mais en des lieux différents. Un univers solide et cohérent, imprégné par le passé vaguement hippie de son auteur, on navigue agréablement entre réflexion politique sur le terrorisme, critique goguenarde du capitalisme et rapports humains joyeusement baisouillards. L'écriture est vive, même si les apartés à la première personne, sensés être écrits par Lilo elle-même, sont ratés. Toutefois, comme on démarre tout en douceur, on se dit que finalement 350 pages c'est un peu juste. La fin se hâte un peu trop vite, laisse un drôle de sentiment d'accélération, de déséquilibre qui au final nous gâte un peu le plaisir.