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La Métalienne -

Aux éditions : 
Date de parution : 31/07/04  -  Livre
ISBN : 9782748305777
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jean   - le 20/09/2018

La Métalienne

Agop Karakaya est d’origine Arménienne. Il s’est installé en France et est Docteur en Génie Civil. Il écrit surtout des poèmes (il en a publié trois recueils) et des articles sur le génocide arménien.

Quand l’Amour transcende tout...

Jacinthe Moutonneau est une Métalienne. Mère, épouse, elle vit sans se poser de questions en suivant le troupeau de ses compatriotes dans le monde organisé et sans surprises qui l’entoure. Sa vie est réglée par les Bergers, avançant sur des rails, comme sa voiture lorsqu’elle va en ville. Son fils Reptune, lui, est plus turbulent et voudrait changer de vie, quitter le troupeau et aller dans l’espace pour voir des Extramétaliens.
La vie tranquille de la famille va éclater lorsque Jacinthe va tomber amoureuse d’Adonis, un humain, animal esclave de ses amis les Tentakule et que Reptune, parti avec ses parents et leurs amis sur la station Vega-X, va rencontrer enfin des Zodiakais, extramétaliens agressifs et guerriers. Chacun sortira changé par la violence de ses sentiments, l’humain, la métalienne comme son fils. Ils termineront l’aventure face à un destin enfin ouvert et en forme de point d’interrogation.

Cosmiquement raté...

Karakaya est avant tout poète dans ses écrits. Il tente dans ce roman de mêler sa poésie à de la science-fiction. Le constat est clair : il n’y parvient pas.
Son sujet, l’Amour au-delà de tout, même entre espèces différentes, est respectable en soi. Mais la réalisation de l’ouvrage est bâclée et confuse. Nous noyant parfois sous un déluge d’information, l’écrivain oublie aussi de donner au bon moment des clés essentielles à la compréhension de l’histoire. Par exemple, le lecteur découvre page 47 que les personnages qu’il suit depuis le début ne sont pas humains et qu’ils traitent les hommes comme des animaux, les réduisant en esclavage. Rien auparavant ne laissait supposer une quelconque inhumanité des Moutonneau.
La texture de la narration est aussi difficile à supporter. Le phrasé utilisé est emphatique, cherchant à intégrer une dimension poétique dans la structure même du texte. L’impression obtenue est une grande confusion, une incompréhension de certains termes. Des mots sont employés parfois à la place d’autres, hors de leur contexte habituel. Ainsi beaucoup de mesures sont cosmiques, que ce soit les mètres ou les heures. Le mot revient plusieurs fois dans certaines pages, sans aucune nécessité. Il en est de même pour les actions qui, sans explication, sont qualifiées de verticales. Les répétitions de ces formules alourdissent le texte et deviennent rapidement lassantes. Le lecteur perd peu à peu le fil de l’histoire en butant constamment sur des expressions douteuses ou incompréhensibles. Cela brise la magie de la poésie qu’essaye de générer le texte. On notera que l’auteur lui-même a dû prendre conscience de ce que certains de ses effets avaient d’artificiels, car certains mots ou des phrases entières sont imprimées en italique, comme pour indiquer l’indécision de l’auteur quand à leur intérêt dans l’histoire, ce qui n’améliore pas la fluidité du discours.
Ce roman veut être à toute force un ouvrage de science-fiction. Ceci n’était en fait pas réellement nécessaire pour obtenir le résultat escompté. Le contexte aurait pu rester suggéré et brumeux, plus onirique – ce qui conviendrait mieux au propos. Mais au contraire la formation technique de Karakaya ressort par moments et il nous offre alors de longues digressions sur des sujets techniques ennuyeux et sans apport à l’histoire, tels que les notions d’architecture des Métaliens. Parfois, à l’opposé, il décide d’oublier l’aspect réaliste des ses explications technologiques et nous décrit – toujours de manière aussi détaillée - un univers décalé et à la limite du rêve. Rien ne permet de prévoir le passage d’un mode descriptif à l’autre. Pris dans l’alternance de ces deux visions différentes, le lecteur est déstabilisé et désorienté. Il se détache de l’oeuvre sans arriver à entrer dans le jeu de l’écrivain.
Un peu perdu dans ce monde aux clés distribuées dans le désordre, noyé dans une sémantique fluctuante et obscure, encombré par des tonnes de détails techniques étrangers au sujet du roman, le lecteur doit s’accrocher fortement pour ne pas refermer le livre en cours de lecture. Il est difficile d’arriver jusqu’aux dernières pages, pourtant les plus poétiques, ouvrant l’histoire et invitant à imaginer selon son propre désir la suite des aventures de chaque personnage.
Karakaya devrait en rester aux poèmes. Son roman est ennuyeux et difficile à lire, ce qui le rend impossible à appréhender sereinement. C’est dommage, car au-delà de l’idée magnifique qui fonde ce récit (l’Amour inter-racial), l’auteur laisse apparaître par ci-par là des ébauches de critiques politiques qui auraient pu être franchement intéressantes si elles avaient été développées et mieux rendues, dans un texte plus clair.

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