"Kaiku avait vingt moissons la première fois qu'elle mourut." C'est sur cette phrase que débute La Croisée des chemins surprenant roman de Chris Wooding. Premier tome d'une trilogie au titre mystérieux: Les Tisserands de Saramyr, cet opus mêle la "sword and sorcery" (fantasy mélangeant complot politique et sorcellerie) aux légendes orientales, et plus particulièrement nippones. Jeune auteur anglais de 28 ans, Chris wooding a écrit une dizaine de romans pour la jeunesse dont Qui a tué Alaizabel Cray? (Prix Silver Smarties) ou encore Les Disparus du royaume de Faërie. Aujourd'hui, il se tourne vers un public adulte et démontre son talent de conteur.
"L'Empire de Saramyr est pur. Les Tisserands, une caste de sorciers, y veillent. Aucun enfant Aberrant n'a le droit de vivre: leurs pouvoirs corrompus et surnaturels sont bien trop dangereux.
Les Tisserands sont indispensables, grâce à la puissance que leur confèrent leurs Masques. Ils sont le dernier bastion contre le mal qui menace les grandes familles."
Anaïs, Impératrice, cache sa fille de 8 ans, Lucia, des regards extérieurs. Elle désire mettre tous les moyens de son côté pour permettre à la jeune fille à sa majorité, d'accéder au pouvoir. Malheureusement, Lucia est une Aberrant. Vyrrch, tisserand, découvre la vérité et décide de mettre tout en œuvre pour faire éclater la vérité...
Kaiku renaît de la mort grâce à Asara, une de ses servantes. Sa famille a été sauvagement assassinée et la jeune fille doit fuir... en attendant de trouver les commanditaires et de se venger. Son seul indice: un masque laissé par son père. Rapidement, Kaiku découvre qu'elle est une Aberrant...
N'enlèverons-nous donc jamais nos masques, même pour un instant?
La Croisée des chemins débute lentement et l'auteur se perd dans des descriptions lyriques certes, mais parfois un tantinet trop longues. Mais, après ces quelques passages, le roman prend toute son envolée. Il prend de l'ampleur et l'intrigue (que certains jugeront classique) se déroule et dévoile toutes ses ramifications. Chris Wooding nous entraîne dans une histoire riche, au parfum de médiéval japonais avec une pointe des effluves de Miyazaki. Il reprend les thèmes de la fantasy: une quête, une initiation, un complot pour le pouvoir, une lutte du bien contre le mal... Il le fait bien, même très bien, et maîtrise parfaitement son récit. Chris Wooding a un don indéniable, celui de créer une atmosphère, un décor. A travers son concept d'utilisation de la magie au moyen de masques, il s'appuie sur les contes et les légendes japonaises pour donner une atmosphère originale à sa trilogie. Ce petit plus qui donne de la fraîcheur dans la littérature de fantasy (un genre qui a tendance à tourner en rond et avoir un faux-air de "déjà lu").
L'auteur mêle deux intrigues croisées qui donnent de la richesse au récit: celle de Kaiku, qui accomplit son voyage initiatique. De jeune fille, elle va devenir femme et surtout, elle va apprendre à maîtriser son don. Puis, l'intrigue pour le pouvoir de Saramyr. L'Impératrice Anaïs veut éviter d'entraîner son pays dans une guerre civile meurtrière... Les deux trames entrelacées permettent au récit d'avoir un rythme soutenu avec des rebondissements nombreux.
Malgré quelques imperfections tout à fait pardonnables, Les Tisserands de Saramyr est une trilogie qui commence avec brio. Ce mélange des genres en fait une histoire riche et passionnante à découvrir et à suivre.