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L’Homme Illustré

Ray Bradbury ( Auteur), Brigitte Mariot (Traducteur), Philippe Gady (Illustrateur de couverture), Constantin Andronikov (Traducteur)
Aux éditions : 
Date de parution : 30/06/05  -  Livre
ISBN : 2070417794
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Nestor   - le 20/09/2018

L’Homme Illustré

On ne présente plus Ray Bradbury, écrivain américain qui débuta sa carrière dans les années 1950, père des inévitables et désormais classiques - même dans les programmes scolaires - Chroniques martiennes (1953). L’Homme illustré a été composé, s’agissant également d’un recueil de nouvelles, deux ans avant le chef d’œuvre du maître. Ici le recueil ne se donne pas comme tel et utilise le bon vieil artifice issu des Mille et une nuits : la mise en abyme, les histoires dans l’histoire amenant à un dénouement de celle-ci.

A fleur de peau

Tatouées sur la peau d'un artiste de cirque, les histoires sont révélées au lecteur peu à peu, jusqu’à la dernière, celle qui « rattrape » le prologue-prétexte de l’homme illustré. Mis à part ce prologue, la patte de Bradbury se retrouve sans aucune fausse note dans chacun des textes au style précieux du livre et l’on y croise ses fantasmes et ses peurs qui sont aussi ceux d’une partie de l’Amérique des années 1950, de la Guerre Froide, de la ségrégation, de la lutte contre l’ennemi intérieur. Un couple fuit dans le temps vers le passé pour ne plus avoir à travailler sur une arme surpuissante (Le Renard et la forêt), les auteurs « incorrects » morts vivent sur Mars grâce à la survie physique de leurs ouvrages en voie de destruction sur Terre (Les Bannis), les murs interactifs d’une chambre d’enfant prennent vie et menacent leurs parents (La Brousse)…

Autant de courtes fables s’affichant comme telles - Le Renard et la forêt  -  à la morale relativement limpide, à mi chemin entre Esope (pour la forme) et Bukowski (pour le regard désabusé sur une certaine Amérique, mais le  jugement en plus), qui ne dénoncent finalement qu’une seule chose : le libre arbitre et la propension humaine à s’en séparer au plus vite ou à en user pour nuire. Le plus souvent la technologie - le mythe du Golem est d’ailleurs repris dans Automates, Société anonyme - est stigmatisée comme étant un vecteur de paresse et de totalitarisme. On décèlera d’ailleurs souvent les prémisses de la thèse de Fahrenheit 451 ici. Mais il ne faut pas s’y tromper : nous ne sommes pas chez Philip K. Dick et 20 ans séparent les deux auteurs : chez Bradbury pas de salut hors de la famille, lieu de tous les risques mais seul environnement  normal de l’homme, ultime « terra incognita » dont l’exploration et la découverte se jouent dans ce récit qui n’est pas encore du space opera.

Le charme désuet des années 1950

On l’aura compris, ceux qui aiment le style un peu désuet - ah ces « Ici la terre, nous nous adressons à la flotte d'invasion martienne » -, l’ambiance des pulps et la morale, la vraie, aimeront. Pour les autres restent la valeur historique et les scénarisations finement ciselées d’un père de la SF, formé au feuilleton radiophonique, magnifique conteur, capable de vous tenir en haleine les quelques heures de la lecture de ce livre avec une roublardise et un sens consommé de la narration « à chute ».

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