L’Abîme

L’Abîme

John Crowley est un auteur un peu à part en fantasy, sans doute encore assez méconnu chez nous. Et pourtant, son Parlement des fées a reçu par deux fois le World Fantasy Award. Malheureusement, la publication de son autre cycle d’Aegypt a été interrompu en France. Depuis plusieurs années maintenant, on attend sans y croire les deux derniers tomes de cette tétralogie. On peut toujours se consoler en découvrant ou en redécouvrant L’Abîme aux éditions Points avec une louange de poids en quatrième de couverture : celle d’Orson Scott Card : « L’abîme est un étrange et merveilleux roman de fantasy (…). J’ai plus appris sur les potentialités de l’écriture avec ce livre qu’avec aucun autre livre que j’ai pu lire ». Pas mal comme compliment…

Lorsqu’il s’éveille, celui que l’on nomme le visiteur ne sait pas vraiment d’où il vient. Sans doute de l’espace, mais rien n’est moins sûr. Toujours est-il qu’il découvre autour de lui un monde en plein chaos. Déchiré entre les Rouges et les Noirs, entre les Gris et les Justes, les rois ne font pas long feu et de grands changements sont à venir… Mais lui, quel est son rôle dans tout cela ?

Etrange… et opaque…

L’abîme est un roman de fantasy comme on en trouve peu. Il y a ici une exigence littéraire qui donne une épaisseur incroyable au récit. Sans doute un peu trop d’ailleurs. Le style utilisé par Crowley rend le récit particulièrement exigeant et plus d’un lecteur sera rebuté, restant complètement à l’extérieur du roman. Dommage. Car il y a dans ce livre un monde d’une belle richesse et qui là encore s’éloigne assez de ce que l’on a l’habitude de lire. Mieux, John Crowley a le bon goût de ne pas trop en faire et de se cantonner à 240 pages, sans prévoir de suites au long court. Mais croyez-moi, rarement il aura fallu autant de courage et de pugnacité pour venir à bout d’un seul roman de fantasy, aussi court soit-il.