Ecken est un auteur qui commence à avoir un beau parcours. Après quelques incursions au Fleuve Noir, on a pu le redécouvrir l’année dernière avec Le Monde, tous droits réservés, publiés aux éditions du Bélial. Un recueil de nouvelles plutôt de haute tenue qui venait rappeler son talent de conteur, jonglant aussi bien avec une SF scientifique qu’avec la politique fiction voir l’émotion pure… Publiés aux éditions Nestiveqnen, Les Hauts Esprits donne cette fois dans le fantastique.
Le virage maudit…
Dans un petit village perdu en France, les accidents à répétition alimentent toutes les conversations. Il semble que tous les carambolages et sorties de route se concentrent dans un seul et même virage. Et à chaque fois, il y a des morts. Comme si le virage ne laissait jamais de survivants. Du coup, les rumeurs et les interrogations vont bon train. L’endroit est-il hanté ? Quelqu’un dans le village a-t-il le mauvais œil ? Et si le vieux Stanislas reclus sur sa colline était le vrai responsable ? Déjà que certains le considèrent comme un peu sorcier et qu’il a été obligé de s’éloigner devant la suspicion des habitants… Sandrine, jeune et jolie institutrice va tenter de mener l’enquête.
Esprit es-tu là ?
Avec ce roman, Claude Ecken donne dans un genre de fantastique plutôt courant mais qui fait souvent recette : le fantastique rural. Il tente de donner toute une ambiance à son histoire de fantôme en instaurant un huis clos élargie autour du village et en se servant des rumeurs et des ragots de bistrot pour alimenter la vindicte et la suspicion populaire, et en un mot la pesanteur d’un climat houleux. Mais, il faut bien l’avouer, il rate complètement sa cible. Autant dans Enfer Clos il était parvenu à nous enfermer avec ses personnages dans une ambiance malsaine, violente et glauque, autant dans Les Hauts Esprits, l’aspect caricatural de ses personnages et des situations laissent un sentiment d’incrédulité. Pas une minute, on ne croit à ces violentes pluies qui apparaissent spontanément pour empêcher l’héroïne d’aller voir son ami Stanislas sur sa colline. Pas plus qu’on ne croit à la vieille folle qui prêche le malheur sur les habitants de Vallargues ou aux conversations embrumés d’alcool dans le seul café du village, sans parler de l’explication et du dénouement final. Seules quelques scènes sont assez fortes et rattrapent un peu l’ensemble (comme une fameuse séance de spiritisme). Mais globalement, le frisson n’est pas au rendez-vous. Et on pourrait encore lui pardonner si l’on avait le sentiment qu’il a voulu tirer un peu à la ligne. Claude Ecken pêche parfois par excès, nous racontant dans le détail le CV des victimes des accidents et le récit de leur mort… Et ces trépas sont assez nombreux. Sans doute plus d’une dizaine. Il y a de quoi lasser le lecteur… Le jugement bien sûr est sévère. Mais la déception est à la hauteur de l’agréable surprise que constituaient ses derniers livres au Bélial et chez Eons. Dommage.