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La Marche du Nord, suivi de Un port au Sud

Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/08/06  -  Livre
ISBN : 2070312658
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Clement   - le 27/09/2018

La Marche du Nord, suivi de Un port au Sud

Né en 1964 à Marseille, Georges Foveau a fréquenté des domaines aussi différents que le journalisme et la marine marchande. Passionné par les mythologiques nordiques, celtes et amérindiennes, il est l’auteur d’essais sur le cinéma et sur le chamanisme, d’une série de polars pour les jeunes et d’une autre pour les moins jeunes, ainsi que d’une tétralogie de fantasy, Le Cycle de Soze. Les Chroniques de l’Empire, 1 réunit dans une « nouvelle édition revue et augmentée » les deux premiers romans de ce cycle, La Marche du Nord et Un port au Sud, ainsi qu’une nouvelle située dans le même univers, Chienne de vie.

Ne perdons pas le Nord

Jeune fonctionnaire inexpérimenté et prétentieux, Soze est Enquêteur impérial. Son rôle est de se rendre aux confins des territoires de l’Empire pour y représenter l’Empereur et incarner sa justice. Sa première enquête le mènera dans les forêts du Nord, où le Commandant en charge d’une lointaine colonie est accusé de manquer à ses responsabilités, tandis qu’une bande de sauvages habitant les bois menace la sécurité des colons. La seconde l’enverra au contraire dans le sud, dans un port bien loin de la capitale impériale et de son autorité, où règnent les trafics et la corruption, pour enquêter sur un culte sanglant. Deux enquêtes où Soze apprendra que les apparences ne sont pas toujours ce qu’elles semblent, et dont il reviendra changé.

On dirait le Sud

Autant le dire tout de suite, Les Chroniques de l’Empire, ne sont pas à mettre entre toutes les mains. Loin des schémas classiques de la fantasy, Georges Foveau nous entraîne dans une aventure mystique et anthropologique où l’on ne trouvera ni elfe, ni nain, ni grossière magie. D’ailleurs, est-ce bien de fantasy dont il s’agit ? L’Empire où évolue Soze pourrait bien se situer quelque part dans notre passé, à quelques détails géographiques près. Le présent utilisé tout au long des deux récits contribue d’ailleurs à rendre l’histoire très actuelle, très réaliste. Policier, alors ? La structure du récit, sous forme d’enquête, le statut du héros, la bibliographie de l’auteur aussi le suggèrent. Mais c’est sans compter sur l’attachement de Foveau à décrire en détail les cultes et rites des différentes peuplades que croise son enquête, avec une ferveur ethnologique. Les Chroniques de l’Empire, c’est un mélange de tous ces genres, un cocktail unique dont il faut bien comprendre toutes les saveurs pour l’apprécier.

Soze lui-même n’est pas un héros de fantasy classique. Il n’a ni force surhumaine, ni pouvoirs magiques, il n’est pas l’Elu et n’est d’ailleurs pas très courageux. D’abord prétentieux et peu sympathique, il évolue tout au long de l’histoire pour s’ouvrir au monde et aux gens qui l’entourent. Dans Un port au Sud, cinq ans après, il n’est déjà plus le petit fonctionnaire naïf et imbu de lui-même. A mesure qu’il grimpe les échelons hiérarchiques, il devient un Enquêteur fin, qui a pris du recul sur l’Empire et sur sa cour, qui s’interroge sur lui-même et sur la notion de Justice. A travers Soze et les personnages à qui il est confronté, l’auteur lance une réflexion sur le pouvoir, le désir qu’il suscite et sur les usages qu’on en fait.

On peut regretter, dans le second tome, l’abandon de la première personne qui avait cours dans La Marche du Nord et qui nous permettait de partager l’intimité des réflexions de Soze, mais c’était sans doute nécessaire au vu de la complexité de l’histoire. Ainsi, la première enquête est rapidement résolue et dans le premier tome, le héros se contente surtout d’être un observateur passif des rites et des cultes des Louxouns, peuple des bois. Ici tout est clair et Soze, qui possède le pouvoir de déclencher une action de l’Empire, est finalement le seul véritable danger. Mais dans Un port au Sud, rien n’est aussi simple : les personnages sont plus nombreux, plus mystérieux, plus changeants, les complots sont partout, et bien malin qui peut dire où est le mal.

Cette « nouvelle édition revue et augmentée » chez Folio SF a été pour Georges Foveau l’occasion de relire sa tétralogie et de retravailler certains de ses personnages. On trouve également dans ce volume Chienne de vie, une nouvelle inédite, sans Soze, qui raconte comment Snorri, un personnage secondaire qui apparaît dans Un port au Sud, a survécu à un naufrage.

Les Chroniques de l’Empire est un livre exigeant, qui pourrait bien perdre quelques lecteurs non-avertis en chemin, mais qui saura récompenser ceux qui s’accrocheront. Le Foveau du  Cycle de Soze est à rapprocher du Kloetzer du Royaume blessé, avec qui il partage ce goût des récits complexes et des digressions, ainsi qu’une certaine exigence littéraire. Même si l’un se revendique plus de l’épopée là où l’autre flirte plutôt avec le roman policier, tous les deux nous démontrent avec talent qu’on peut faire de la fantasy de qualité sans elfe ni fée et sans être anglo-saxon. Une « nouvelle scène française » ?

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