C’est de plus en plus difficile de faire de la BD de genre (comme de la littérature, d’ailleurs). Le comics de super-héros se faisait déjà vieillot dans les années 80, quand les auteurs américains ont commencé à noircir l’univers des comics pour les rendre plus modernes. Puis, ils ont revisité les codes et les clichés du genre au vitriol, en déconstruisant les conventions, comme dans le splendide Watchmen d’Alan Moore. Puis, quand cela même a commencé à se faire vieux, ils ont commencé à s’auto-parodier dans les années 90, comme dans la série Deadpool. Et maintenant, que faire? Quand on a noirci, critiqué, parodié, réinventé un genre, est-ce qu’on a fait le tour du cycle, et qu’on peut à nouveau faire un comics de super-héros au premier degré, sans se surveiller constamment? On peut essayer, mais ce ne sera jamais comme aux temps innocents des premiers Superman.
La famille, c’est lourd
Concession obligatoire à l’évolution des univers de comics, le héros d’Invincible habite depuis le départ dans un monde plein de super-héros. Ne serait-ce que parce que son père est le fameux Omni-man, le surhomme parfait, le héros de l’Amérique. Même sa copine de lycée est une héroïne sous le nom d’Atom Eve. Avec ce genre de fréquentations, ce n’est pas très dur d’intégrer une identité de super-héros, et visiblement Mark (l’identité secrète du héros Invincible) n’a pas de problème pour accepter sa nature. Il vole, il est super-fort, relativement invulnérable... Rien que de très normal, quoi.
Par contre, il en a d’autre, des problèmes, et des plus sérieux. Dans le tome 2 d’Invincible, son père, Omni-man, s’est révélé être non seulement un membre d’une race extra-terrestre destinée à éradiquer le reste de l’univers, mais aussi un traître qui avait assassiné sa propre équipe de héros. Le fils s’est dressé contre le père, c’est un retournement des conventions habituelles, mais c’est aussi fortement mythologique, et cela contribue à rendre le personnage central d’Invincible plus fort.
Du neuf ?
L’histoire d’un super-héros qui a plus de mal avec sa vie quotidienne qu’avec son travail, ce n’est pas à proprement parler ce qu’on pourrait appeler une idée nouvelle. Il faut donc du talent pour prendre une hisoire qui parle de simplicité et la rendre originale, justement en revenant aux choses simples. L’équipe de Kirkman et Ottley, qui sort avant tout de l’univers des comics indépendants (ont leur doit en particulier la série Battle Pope), a su puiser dans le quotidien pour créer une histoire qui sonne authentique. Reste à savoir s’il sera longtemps suffisant de faire ce que tout le monde fait, mais en mieux.