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Biotope 2

Laurence Croix (Coloriste), Brüno (Dessinateur), Appollo (Scénariste)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 24/08/07  -  BD
ISBN : 9782205059380
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Lavadou   - le 31/10/2017

Biotope 2

Appollo (alias Olivier Appollodorus) est un scénariste français également professeur de lettres. Après avoir créé le fanzine Le Cri du Margouillat, il scénarise la série Louis-Ferdinand Quicampoix chez Vents d’Ouest. On retiendra également La Grippe coloniale (Vents d’Ouest) qui obtint le prix de la critique du Festival d’Angoulême en 2004, ainsi que Ile Bourbon 1730 écrit en collaboration avec Lewis Trondheim, excellente BD parue chez Delcourt l’année dernière.

Brüno (alias Bruno Thielleux), dessine sa première BD, In Articulo Mortis, en 1996 aux éditions La Chose. Il dessine également plusieurs séries et albums chez Treize étrange, dont Némo (4 tomes) ou Cold Train, ainsi que chez Vents d’Ouest (Inner City Blues). Il a souvent travaillé avec Laurence Croix comme coloriste, qui l’accompagne encore sur Biotope.

Suite et fin

Sur Biotope, planète entièrement recouverte de forêt, la base scientifique humaine est en proie au chaos. Le commissaire Toussaint, venu élucider le meurtre d’un géologue avec ses deux collègues Eunice et Langevin, se retrouve pris au cœur d’une lutte interne qui aboutit à la destruction de la base. Alors qu’il s’échappe en dirigeable avec Eunice, celle-ci l’assomme et le jette hors du véhicule. C’est ainsi que s’achève le premier tome.

Mais Toussaint n’est pas mort. Blessé et épuisé, il parvient à survivre dans cette jungle hostile. Ayant retrouvé la base, il la découvre détruite et abandonnée. Puis il aperçoit au loin une colonne de fumée : c’est le camp de Doc Alex, un entomologiste qui vit en ermite depuis deux ans. Grâce à lui, Toussaint apprend ce qui a poussé une partie des scientifiques à se rebeller. Le commissaire, résigné à finir sa vie sur Biotope, décide de rester avec Doc Alex. Mais les survivants de la base les retrouvent.

Une réflexion sur la notion d’humanité

La fin du premier tome, très mouvementée, nous avait laissés dans l’attente d’une suite aussi haletante et dynamique. Il n’en est rien dans ce second volume : la première moitié est consacrée à la survie de Toussaint et à sa rencontre avec Doc Alex. Le rythme déçoit un peu : la progression du commissaire dans la jungle est lente, il n’y a pas d’action et on perd un peu de vue les événements qui se sont produits dans le tome précédent. Les révélations apportées par Doc Alex, sans surprise, ne sont que la confirmation de ce que laissait entrevoir la fin de Biotope 1. Toutefois, on ne s’ennuie pas vraiment, notamment grâce au monologue intérieur de Toussaint, sorte de Robinson Crusoé en proie au questionnement et au doute.

Et la déception est toute relative. Car on se rend compte, à partir de la moitié de l’album – lorsque Toussaint réintègre la communauté des scientifiques – que le propos d’Appollo n’est pas forcément la résolution des énigmes qui occupent le commissaire, ni même l’enjeu scénaristique de la BD, à savoir la survie de la planète. Bien sûr le discours écologique est toujours présent, mais il est teinté d’amertume. Car le regard que porte Appollo sur l’idéologie écologique, et plus généralement sur le triomphe des utopies, est totalement désabusé. Et la raison est simple : l’humanité, aussi soudée soit-elle face aux problèmes qu’elle rencontre, sera toujours en proie à l’individualisme, aux ambitions personnelles et à la soif de pouvoir. La fin de l’album, assez mélancolique malgré une petite touche d’optimisme, montre qu’Appollo ne se fait aucune illusion sur la survie de l’homme en tant que communauté.

Ce discours plutôt pessimiste est soutenu par un graphisme toujours aussi réussi mais nettement moins varié, et pour cause : on a quitté les décors technologiques et organisés de la base pour se retrouver plongé dans une forêt uniforme et anarchique. La colorisation, dominée par le vert, ajoute au sentiment de malaise et de monotonie né de la solitude de Toussaint, et rappelle le pourrissement qui a vaincu la pseudo civilisation de Biotope. La nature a ici un côté négatif : même si elle est l’objet de l’attention et de la protection des scientifiques, elle représente la déréliction d’une communauté humaine qui finit dans un désert. Tout un symbole, parfaitement mis en image par Brüno et Croix.

Un diptyque surprenant

Les deux albums de Biotope sont à prendre comme un tout. Cette histoire n’aurait d’ailleurs sans doute pas dû être découpée en deux tomes : la fin très animée du premier aiguille le lecteur dans une direction qui ne sera finalement pas suivie dans le second, ce qui peut décevoir. Cette rupture de rythme aurait probablement été mieux acceptée dans un album unique. Il n’empêche que ce diptyque, avec ses changements de direction et ses fausses pistes, est agréablement surprenant. En particulier, son discours sur l’écologie et sur la destruction inévitable d’une structure communautaire humaine – et les généralisations qu’on peut en tirer – fait de Biotope une BD intéressante et originale.

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