Un Sale Boulot
Christopher Moore est un auteur de polars un peu à part. Il est arrivé à la littérature fantastique grâce à son alcoolisme. Une sorte de thérapie qui a produit une dizaine de romans noirs et déjantés parmi lesquels peuvent être cités Le Lézard lubrique de Melancholy Cove et Un blues de coyote. Il écrit dans un style simple et direct, empruntant aux styles humoristiques de Neil Gaiman et Terry Pratchett.
Ames à vendre
Charle Asher a tout pour être heureux. Il est propriétaire de sa boutique, marié à une femme charmante qui vient d'accoucher d'une fillette splendide... quand tout bascule dans sa vie.
Sa femme meurt à l'hôpital, il voit des lueurs rouges émaner de certains objets, des gens meurent quand il les regardent, ou quand sa fille parle. Des voix sortent des égouts et l'interpellent, promettant tortures et blessures à son entourage.
Profondément matérialiste, il lui faut longtemps pour admettre qu'il a un nouveau job, un sale boulot qu'il ne doit pas négliger sous peine de déclencher une apocalypse et l'arrivée d'un nouvel avatar de la mort qui sèmera la destruction.
A peine s'est-il installé dans son rôle de ramasseur et de revendeur d'âmes de seconde main que les choses empirent, que des morts ne meurent plus et que la plus jolie des moines bouddhistes lui tombe dans les bras...
Saura-t-il aller au bout de son rôle et sauver l'humanité ?
Alors, c'est drôle ?
Heu... Oui, sûrement, dans un certain sens ! En tout cas, ce roman se veut amusant et léger. Mais peut-être n'ai-je pas le sens de l'humour assez développé pour comprendre la subtilité des textes. Voici un exemple, tiré des dernières phrases du livre :
-... Crois-moi, tu es superbe.
- Non, je ne mesure que trente centimètres.
- Peut-être, mais ta bite en fait vingt-cinq.
Moore se sert abondamment dans la panoplie d'effets déjà explorés par ses prédécesseurs d'humour absurde, mais s'il est possible d'utiliser les techniques des maîtres, il est beaucoup plus dur d'arriver au niveau de leur génie.
Le début de l'histoire est prenant, alléchant. Cet homme, totalement dépassé par son rôle de père veuf, qui se débat en plus face au fantastique qui envahit sa vie, ne peut qu'attirer la sympathie. Nous nous associons très vite à lui pour chercher le pourquoi de tout ceci.
Mais ensuite, l'auteur se perd peu à peu, dans des digressions et des personnages secondaires qui, quoique bien campés et dessinés avec humour, n'en restent pas moins que des coquilles vides, de simples trompe-l'œil destinés à combler les trous de l'histoire.
Le comique de répétition et les connotations graveleuses sans cesse rappelées lassent. Que ce soit la sœur lesbienne, le vendeur accro de sites internet chauds ou le flic blasé, ils ne sont que de pauvres figurants. Seule peut-être l'intérimaire punk arrive à exister dans cette galerie de portraits si plats.
L'auteur est capable de bien faire, toutefois. Il arrive à parfois nous faire sourire, ou à décrire des situations appréciables. Mais tout de suite il retombe dans son humour potache, généralement placé au-dessous de la ceinture, nous laissant seulement soupirer à ce que pourrait être ce livre sans tout ce fatras digne d'American Pie.
Quand en plus, à l'approche de la fin, le dénouement est celui que l'on a deviné depuis environ la moitié du livre, il ne reste plus qu'une envie, celle de refermer le livre avant d'être encore plus déçu par l'épilogue - ce qui ne manque pas d'arriver si l'on continue la lecture.
Visiblement, Moore travaille son humour... Mais il a encore du chemin à faire avant d'obtenir concrètement un résultat exploitable.