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Les Contes du vagabond

Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/01/08  -  Livre
ISBN : 9782917035030
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Laurent Lavadou   - le 31/10/2017

Les Contes du vagabond

Né à Rouen en 1973, Claude Mamier a publié ses premières nouvelles en 2000 puis un premier recueil, Récits des coins d’ombre (L’Oxymore) en 2003. Passionné de littératures de l’imaginaire (King, Poe, Barker…), son travail de chef de projet informatique a dû progressivement ménager de plus en plus de temps à ses activités jumelles : écrire et voyager. De ces deux pôles indissociables, Mamier tire une inspiration infinie qui lui a déjà valu de rédiger une vingtaine de nouvelles. Les Contes du vagabond constitue son second recueil et confirme son talent indiscutable (et rare) de conteur : voilà un livre qu’on referme avec un pincement de cœur mais les oreilles plus aiguisées…

Des contes à rendre…

« Alors le conteur prit la parole… et l’histoire les enveloppa… » Les neuf histoires principales de ce recueil ont toutes été inspirées par près de 200 contes glanés tout autour du monde par l’auteur et Dul, son partenaire de bourlingue, qui clôt cet ouvrage d’une postface. De retour en mai 2006, c’est au cours d’un voyage de mille jours que Claude Mamier (alias Claudio) a écouté les conteurs de trente pays. Il faut voir dans cet ouvrage-témoin le support de paroles offertes par des dizaines de griots, passeurs d’histoires de père en fils, et de criards, raconteurs improvisés (et non moins talentueux). Sous la plume de Mamier, le verbe et l’écriture offrent certainement le plus bel usage pour lequel l’homme les a inventés : immortaliser ses rêves et ses histoires.
En réinterprétant les contes qu’il a récoltés, Mamier insuffle un vent de merveilleux au cœur même des plus grands traumatismes de l’humanité. Un pari difficile à tenir sans tomber dans le frivole ou le pathétique. Mais à travers ses histoires, il dépeint avec poésie et une large gamme de magie des vies qui se cherchent, des douleurs cachées et des rêves trop longtemps contenus.

Un beau livre de contes

La préface de Patrick Eris pose un constat : du Net à Grands Reportages, ce qui est destiné à rapprocher les hommes ne les rend pas meilleurs et finit par les éloigner un peu plus. Claude Mamier est allé écouter cet Autre et cueillir ses légendes. Le connaître par ce qu’il a à dire de sa culture, plutôt que par l’image qu’on veut en montrer. Chaque récit des Contes du vagabond est un voyage. Et la structure même du livre est au service du périple qu’il annonce : un premier chapitre d’ouverture, où Vagabond nous invite au voyage dans la salle bruyante d’un pub de Liverpool. Il y trouve Carlo, à qui il conte une première légende pour finir par l’entraîner malgré lui. Alors, comme Carlo, Vagabond nous immerge dans les histoires qui constituent les sept chapitres suivants. Ce sont pour beaucoup des légendes et croyances du monde qui sont à l’origine de ces nouvelles. Enfin, le dernier chapitre clôt le voyage de Vagabond et révèle la destinée de Carlo sur un pont qui n’existe que pour eux.

Tous contes faits

Les sept nouvelles du recueil offrent une libre interprétation par l’auteur des histoires dont il a été l’auditeur. Toutes inédites (sauf Les Cendres du monde déjà parue dans Chimères - 15 récits d'animaux fabuleux). Pour la plupart, ça n’est pas un hasard si les personnages s’accomplissent pendant ou au terme d’un voyage. Et pour nous rappeler que chaque histoire est une synthèse romancée de légendes orales et courtes, Vagabond égrène ces dernières tout au long du recueil en une multitude de petits cailloux sur le chemin qu’il nous ouvre ; comme cette légende khmère de l’éléphant blanc, celle du lac Yanayaco, celle du tonnelier normand ou encore celle du roi qui voulait apprendre toutes les histoires du monde. Mamier nous affirme que « les histoires sont forcément vraies. Ou alors elles l’ont été, ou le seront […] oui, elles sont vraies, par définition ». Et l’on s’empresse de le croire…

Bokor Palace – Samrin, fils métisse d’une française et d’un cambodgien, retourne à Phnom Pen et erre sans but dans les hauts lieux de mémoire consacrés au génocide perpétré par les Khmers Rouges durant les années 70. Sur les traces de sa mère morte depuis longtemps, il retrouve les vestiges du Bokor Palace à la frontière thaïlandaise, ancien lieu de villégiature de la bourgeoisie cambodgienne et théâtre des amours parentales. Mais après y avoir passé une nuit irréelle, il en ramènera plus que des réponses à ses questions erratiques : une nouvelle raison de vivre.
J’écris ton nom avec des ailes de papillon – En Grande-Bretagne, malgré un bonheur annoncé, Lisa plaque tout et part chercher en Turquie le tournant d’une vie qui ne la comble pas. C’est après une errance et un voyage initiatique qu’elle va découvrir la magie qui la lie à l’écriture. Un magnifique moment de poésie onirique…
Flammes de nos corps – Anton Slansky, un vieil homme juif rescapé de la Shoah, avait cessé de penser à l’officier allemand qui a détruit sa vie un jour de 1945. Jusqu’au jour où il l’aperçoit dans la cour de son immeuble de Bucarest. Et où, au crépuscule de sa vie, il découvre sous les traits de son bourreau, les secrets d’une délivrance que la Libération ne lui avait jamais réellement apportée. Quand au milieu des horreurs de l’Holocauste le merveilleux trouve son chemin pour distiller une essence de vie pure…
Les Cendres du monde – Au tournant de sa vie, Haruna termine avec son grand-père Kisumu le périple qui scellera sa vie d’enfant et fera de lui un Guerrier du Peuple. Au pied du Kilimandjaro, Kisumu s’arrête et écoute finir sa vie dans le chaos qui s’annonce. Depuis les hauts plateaux du Rift, le Marcheur se rend là où les Dieux ont figé le souvenir de l’échec qu’ils ont subi après la création de l’homme. Il doit y rejoindre le peuple des Gnous et finir la route avec lui. Sur les rives du lac Natron en Tanzanie, Iona abandonne son troupeau de chèvres pour rejoindre le Flamand Bleu, tandis que le Mont Lengai s’obscurcit… Trois légendes africaines, trois visions de la nature dans lesquelles le grand cycle qui voit le monde disparaître et renaître se répètera jusqu’à ce que l’homme accomplisse son devoir.
Légendes de la Selva – La Selva, c’est la jungle amazonienne des indiens Pemon. Bolivie, Santa Elena de Uarien : Klaus, son meilleur ami Rolf et sa compagne Anna passent leurs vacances à la pension de Madame Rosa. Au premier jour, Anabel d’une beauté sylve hypnotique les aborde et Klaus ne prendra jamais le chemin du retour. Sur l’Amazone, Ramon Ribeiro n’imagine pas que ce qu’il doit livrer au terme de son voyage, ça n’est pas le petit sac de poudre au fond de son sac. La Selva attend de lui autre chose… Manuel a grandi auprès d’une tribu qui l’a recueilli après un naufrage sur l’Amazone. Mais c’est aux côtés d’un vieux gringo en pleine jungle qu’il s’avèrera être l’instrument de la forêt blessée. Trois destins liés par un dessein commun qui les dépasse. Trois légendes sud-américaines à priori sans lien que Mamier réunit avec brio et subtilité en une magnifique légende écologiste.
L’Image de mes désirs – Un tatoueur voyage de ville en ville. Lorsqu’il s’installe discrètement dans un local inoccupé de Bangkok, il transforme la vie de trois adolescents. Mais parce qu’à cet âge les désirs sont des plus ambitieux et débridés, la note sera salée. Tous les ingrédients du conte sont là : un postulat (le tatoueur qui donne vie aux désirs) et une morale courte (il y a toujours un prix à payer).
Je reviens – À Paris en 2032, la célébrité de la tombe de Jim Morrison au Père Lachaise a depuis longtemps été détrônée par celle du prêtre sataniste Alexander Karel. Avec l’anniversaire de sa mort et le rassemblement de centaines de fidèles, la nuit promet d’être longue pour le guide Marc Autret et le capitaine Brisson… Bien loin des contes poétiques du reste du recueil, Je reviens revisite le mythe du plus grand démon de la chrétienté.

Les bons contes…

Sans rompre avec la structure traditionnelle répétitive du conte (un beau jour, le lendemain, le jour suivant,… puis vint un jour où…), l’art de Claude Mamier est de varier les constructions de sorte que le recueil offre une large gamme de récits et d’univers : de l’échelle cosmogonique (Les Cendres du monde) à la quête solitaire (Bokor Palace), la magie est partout, cachée dans la ville organique (L’Image de mes désirs) ou entière et établie dans la fantasy (J’écris ton nom avec des ailes de papillon). Seul, peut-être, Je reviens détone un peu par son scénario à la X-Files et la légère invraisemblance d’une compagnie de CRS débordée par une foule de satanistes en délire…

Une écriture magnifique

L’écriture de Mamier est extraordinairement imagée et intuitive. Elle est aussi vibrante qu’une pellicule de cinéma. Le rythme des phrases et de la narration sonne comme les inflexions de la voix. Chargée de parfums, de lumières et d’images, elle s’imprime avec force dans les pensées. Sans temps mort, ni rondeur ni paraboles, légère et épurée, l’écriture du Vagabond enchante le lecteur. Dans Bokor Palace, on suit Samrin au cours de ses déambulations enivrées dans les villes moites. On ressent son vertige de souvenirs qui oscillent entre invention suggérée et réalité. Mamier a le don de poser une scène inoubliable en un paragraphe. Et en quelques mots, il maîtrise l’art d’en dire beaucoup en en écrivant le moins, de camper un personnage en une phrase : « Il avait gardé de ses années en camp de réfugiés l’habitude de toujours paraître d’accord avec son interlocuteur ».
Un livre à écouter avec les yeux…

Autres petits plaisirs : une photo qui clôt chaque récit et matérialise l’inspiration de l’auteur ; et une mise en page aérée qui permet de retrouver rapidement les textes originaux en italiques lorsqu’on souhaite replonger en quelques instants dans les rêves du monde.

Mamier règle ses contes…

… avec l’homme avant tout : « Les Dieux dissertent, murmura Kisumu. Ils s’interrogent sur le monde qu’ils ont créé […] et désormais ils se parlent dans ces chants ténus pour tenter de détailler les erreurs commises » (Les Cendres du monde). Et parmi ces erreurs, l’homme tient une place de choix…
Claude Mamier reprend, au travers des multiples traditions humaines, le thème du recommencement, de la punition divine envers un homme qui s’écarte de l’ordre du monde. Ainsi, le cycle purificateur est le thème des Légendes de la Selva. Inspirée de la légende de Mui, ce triptyque onirique s’appuie sur la personnification de la jungle amazonienne dans les croyances sud-américaines. Le conte la grime en une femme aussi mystérieuse que sa beauté est grande, et qui apparaît dans les trois parties du conte.
Comme dans Les Cendres du monde, le cycle a besoin d’un guide ou d’un gardien humain pour se réaliser et déclencher le Chaos ou le Déluge qui vont laver la Création de ses erreurs. Cette nouvelle s’inspire de légendes masaï qui témoignent le mieux de cette morale commune à plusieurs des contes de ce recueil : l’homme est le seul être à ne pas avoir accès au Sanctuaire, lieu sacré où les animaux trouvent refuge à chaque fin du cycle du Monde. Il est condamné à survivre au Chaos tant qu’il n’aura pas trouvé sa place dans l’équilibre global. De la fin d’une vie en naît une autre pour que l’âme s’accomplisse.

L’auteur applique également ce principe à l’individu au travers de nouvelles davantage centrées sur un héros en particulier. Il met notamment en scène des personnages au seuil de leur histoire. Samrin (Bokor Palace), à bout de souffle, part chercher aux sources de son existence la mort ou une nouvelle force. Lisa (J’écris ton nom avec des ailes de papillon) traverse les mers poussée par une force irrépressible de rencontrer son destin. Elle fuit une vie qui lui paraît étrangère et découvre sa vraie nature dans les vallées secrètes de la Turquie.
Mais pas d’ambiguïté : il ne s’agit pas là d’un ouvrage spirituel. S’il s’inspire de légendes (donc chargées de croyances), Claude Mamier les réactualise sans en changer le sens profond et en y insufflant une poésie extraordinaire. Dans Flammes de nos corps, il réécrit avec une originalité inattendue et émouvante la légende des vampires à l’antipode de l’horreur banalisée qu’ils symbolisent.

L’inéluctable et l’inconnu

Les héros de Mamier voyagent et souvent de façon aléatoire, se laissant porter alors qu’en fait un fil secret les mène là où ils devaient arriver. On retrouve là le côté inéluctable de la narration des contes. Ce sentiment que ce qui est écrit doit se réaliser, qu’il faut en passer par là pour découvrir le sens caché de l’histoire. C’est le cas de Samrin et Lisa qui se lancent sur un coup de tête dans une quête solitaire et initiatique.

Dans Légendes de la Selva, le deuxième volet est entièrement construit autour de la dialectique de l’informe et de l’indéfinissable : le bateau entre deux rives et jamais amarré, la brume, les silhouettes et les formes : « Le corps flotta un moment, tache claire sur l’immensité sombre, jusqu’à ce qu’une forme gigantesque, plus noire que l’eau, ne l’avale d’un coup avant de replonger. Aucune parole ne fut prononcée ». L’embarcation qui conduit ses passagers sur le fleuve Amazone se transforme peu à peu en geôle sans barreaux d’où s’échapper ne ferait que s’exposer à davantage d’inconnu. Et les disparitions s’enchaînent, aussi inéluctables que le temps qui s’écoule. Et l’inéluctable devient absurde quand face à ces disparitions, les survivants attendent dans la plus profonde résignation : « Il ne pensait pas qu’ils aient la moindre chance d’influer sur les événements ». À tel point que l’inexplicable prend un tour banal alors que la situation ne saurait être plus extraordinaire.

Une ode à la féminité

Mamier met en scène la fascination des hommes envers la femme, fascination qui transpire des diverses légendes du monde. Dans Légendes de la Selva, la jungle c’est aussi la femme, la mère et la maîtresse. Tantôt protectrice, nourricière et punisseuse, elle prend les traits d’une fille aux cheveux d’ébène qui enjôlera Klaus et révèlera à Manuel l’objet de la colère de la forêt.
C’est le cœur de l’homme et tous les visages de la femme que Mamier explore à travers son voyage littéraire et narratif. Dans Flammes de nos corps, il décrit un être dont la volupté et le plaisir charnel cachent un merveilleux secret étranger au cœur des hommes les plus tendres. Bien loin des clichés poétiques et romanesques du genre, l’auteur arrive à donner corps à une perception universelle de la femme : d’une rare intensité, la magie préside à l’essence féminine : « Les fées ont existé, Slansky, et quelques-unes existent encore, c’est pour cela que notre monde ne s’est pas complètement effondré. Ce ne sont pas de petites créatures avec des ailes, ce sont de vraies femmes […], chaque femme est une bulle d’écume sur cette incroyable vague d’énergie ».

La nature habitée

Comme dans les films de Hayao Miyazaki, Claude Mamier s’appuie sur la tradition d’une nature habitée. Légendes de la Selva en est un témoignage émouvant où les lucioles et les aras accompagnent les scènes amazoniennes, comme des animaux totems porteurs de présages dont on ne sait jamais s’ils seront heureux ou mauvais : « Lucila raconta à son fils la légende des ancêtres, celle où les lucioles qui suivaient les bateaux étaient les esprits des anciens, qui veillaient à ce qu’il n’y ait pas d’orage, à ce que le fleuve ne s’énerve pas ».
On est constamment abreuvé de vérités auxquelles on ne demande qu’à croire : « Grand-père connaissait plein d’histoires, mais il n’avait jamais parlé d’un fleuve qui grandissait ». Un conte dans le conte…
Dans J’écris ton nom avec des ailes de papillon, le monde tout entier semble tendu vers le but à atteindre : « Les étoiles se rassemblaient, attendant qu’elle délibère. Elle était le centre autour duquel le mécanisme de la nuit pivotait lentement. Elle se leva […]. Les vagues […] semblèrent pousser un soupir de soulagement ».
Le rêve, l’histoire, le récit sont des entités vivantes, chez Mamier, des créations qui se prolongent, perdurent et se transmettent à chaque occasion : « Il devait forger les mots là où l’histoire était née, les prononcer là où elle se poursuivait » (Les Cendres du monde).
Rien ne se perd, tout se raconte…

Onirisme

« C’était pourtant simple. Il suffisait de trouver sa bulle et de se persuader que le monde s’arrêtait à la paroi » (Bokor Palace). Une maxime qui pourrait s’appliquer à la méthode Mamier. Chaque phrase devient une invitation à l’imaginaire. L’auteur nous offre un regard sur le monde empreint de rêve et très souvent à la faveur de légendes qui confèrent à chaque créature un caractère spirituel : « l’enfant riait. Il riait des lucioles, et il battait ses mains-fougères au rythme de la respiration des collines ». Sa poésie s’ouvre sur une magie et un merveilleux discrètement cachés derrière chaque événement anodin du quotidien : « Plusieurs papillons se relayaient pour se poser sur le livre ; […] elle s’était amusée des ailes multicolores qui passaient entre les phrases. Celle d’un papillon blanc effaçaient les lettres en avançant, et elle se demandait si les mots réapparus après son passage étaient bien ceux d’avant » (J’écris ton nom avec des ailes de papillon).
Mamier manie avec grâce les registres de l’onirisme. Entre pudeur et sensualité, il tire les ficelles d’une ancestralité latente, il déroule la pelote de croyances profondes qui résonnent en chacun de nous, à des niveaux différents.

Entre deux eaux

À chaque récit, Claude Mamier nous fait voyager entre deux eaux. Un peu comme dans cette épaisseur sous l’océan d’où la surface et le ciel apparaissent déjà lointains et déformés, mais d’où les profondeurs distillent tout ce que la terre porte de mystère et d’inconnu. C’est bien là que nous emmène Mamier, là où il faut choisir entre ses rêves et la réalité, à la limite des deux. Et l’essentiel se passe souvent sur une frontière, chez Mamier.

Dans Flammes de nos Corps, le barbelé entre Slansky et sa femme dans le camp, ou plus tard la vitre de son appartement derrière laquelle il observe, sont autant de lignes qu’il n’osait pas franchir avant d’oser enfin et de trouver la délivrance. Dans Bokor Palace, l’hôtel que cherche le héros est à la frontière thaïlandaise, au bord du monde de Samrin.
Dans Légendes de la Selva, Tabatinga est à une triple frontière où « trois pays se mêlaient si étroitement que la notion de frontière devenait un concept flou ». Voilà la recette de Vagabond : nous plonger, comme ses héros, en pleine incertitude, à la limite des choses : « […] Ils n’étaient sans doute plus sur l’Amazone. Enfin pas celui qu’ils connaissaient » ; pour en ressortir différent : « Klaus pensait à d’autres frontières. […] Ils étaient du vieux monde ».

Magnifique, en fin de conte

À l’ouverture des Contes du vagabond, Claude Mamier sous-entend que le défi du conteur est de capter l’attention de son public. Et il semble bien l’avoir relevé de main de maître. Il n'est pas sans rappeler en cela un autre Claude-conteur, un certain Nougaro qui nous racontait merveilleusement Le Gardien de phare ou Plume d'ange...
Voilà donc un ouvrage indispensable à toute bibliothèque : Vagabond nous livre des secrets de conteurs, on se sent privilégié, il entrouvre le rideau de la raison, à nous de choisir de le franchir. Et comme tout bon conte qui se respecte, une morale à ce recueil : chacun d’entre nous se trouve au centre d’un équilibre fragile et inéluctable à la fois. Le rôle qui nous est donné doit nous mener à l’accomplissement.
Pour finir, à la lecture de la postface de Claudio, peut-être ne résisterez-vous pas à l’envie de plonger dans le monde des écrivains voyageurs, des conteurs et de la tradition orale, dont Les Contes du vagabond est une des multiples portes (www.1000jours1001nuits.net).

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