Jeunesse
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Risque Zéro

Marie Cambolieu (Traducteur), Bruno Douin (Illustrateur de couverture), Pete Hautman ( Auteur)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/03/08  -  Jeunesse
ISBN : 9782745929983
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ketty   - le 31/10/2017

Risque Zéro

Macadam Milan est la nouvelle collection des éditions Milan qui publie depuis septembre 2007 des livres en direction des adolescents. « Des textes pour s'évader, pour réfléchir, pour rêver » annonce le site dédié. Il faut avouer que la promesse est honorablement tenue avec des ouvrages comme Le Complexe de l'ornithorynque ou Une Chaussette dans la Tête, qui réussissent à s'intéresser à des problèmes d'adolescents (dont les adultes ne sont pas exempts) sans tomber dans le travers de la leçon de morale, pas plus que dans l'infantilisme. Des ouvrages que nous avons eu du plaisir à vous présenter, malgré des liens ténus avec les genres de l'imaginaire.
Cette fois, c'est bel et bien de science-fiction qu'il s'agit, puisque Pete Hautman place le héros de Risque Zéro dans une Amérique futuriste qui met en œuvre, à outrance, les tendances sécuritaristes qu'on peut déjà constater de nos jours.


Sécurité et liberté

« Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux. » Cet avertissement prophétique de Thomas Jefferson est pleinement réalisé dans le monde dans lequel vit  Bo Marsten 16 ans. En 2070, les USA, sont désormais l'UESA, Union des états Sécurisés d'Amérique. Son grand-père, né en 1990, ne cesse de ressasser ses regrets d'un passé où on pouvait prendre quelques risques, boire de l'alcool, se fâcher ou posséder des outils, sans risquer l'incarcération. La mère de Bo, quant à elle, se lamente constamment, depuis que son fils aîné et son mari sont emprisonnés dans des camps de travail respectivement pour bagarre et agressivité au volant.
Bo est amoureux et, jaloux de surcroît. Lorsque Karlohs s'intéresse à Maddy,  il ressent une colère que ne parviennent pas à inhiber les pilules qu'il doit prendre chaque jour. Ses gènes le prédisposent à l'agressivité et son rival semble décidé à le pousser à bout. Réussira-t-il à se maintenir dans les normes acceptables de son monde sous cloche ?

Anticipation à court terme.

La société ultrasécuritaire présentée par Pete Hautman n'anticipe que de peu certains comportements observables en occident. Il se contente d'en exagérer les manifestations avec un humour, nécessairement grinçant.
C'est ainsi qu'en UESA, les enfants ne font de sport que vêtus d'énormes combinaisons visant à limiter les risques de blessures. Des protections couvrent les angles des murs ou le sol et les habitudes alimentaires sont strictement contrôlées. Certaines personnes acceptent même de passer leur vie entière branchés à des appareillages hors de prix pour gagner quelques mois de longévité.
L'économie fonctionne sur une base pénitentiaire puisque seuls les prisonniers, et quelques volontaires (souvent les mêmes après leur peine) travaillent dans les entreprises qui se partagent la capacité de production du pays : Philip Morris pour la santé, Coca-cola, et Mac Donald pour presque tout le reste.
Les ordinateurs personnels sont des WindO, et les IA sont capables d'usurper un temps des identités humaines.
Rien de nouveau en substance mais Hautman aborde le futur avec humour sans jamais prétendre innover. Le professeur d'arts du langage de Bo, un personnage on ne peut plus ringard, lit d'ailleurs Le Meilleur des mondes dans une vieille édition de poche.

Sans issue possible ?

Compte tenu du ton détendu et joyeux privilégié par l'auteur, on s'attend à voir s'esquisser sous sa plume des solutions originales et inventives aux ennuis rencontrés par Bo et l'UESA. On découvre le système carcéral, ses pizzas, ses fridélices et un responsable assez farfelu pour entraîner les meilleurs des prisonniers à jouer au football américain, dont on révise au passage le détail des règles et tactiques. Le sport ? Est-ce là la solution ? Cette sortie par le sport ressemble étrangement aux bases du rêve américain tel qu'il est présenté aux petits noirs des ghettos, ou aux mesures similaires proposées aux jeunes des banlieues en France : un effort individuel demandé à l'individu qui veut s'en sortir, dans un monde qui ne risque pas de changer. Tout au long de ce roman, on attend, en vain , une piste plus convaincante. Un avocat virtuel ? La fuite à l'étranger ? C'est encore au niveau individuel que tout se joue, comme si le collectif et ses possibilités d'action n'existaient pas.On saura donc tout de l'aventure de Bo Marsten, mais la société de l'UESA, donnée comme un paramètre du récit, ne semble pas vouée à une quelconque évolution. Dommage.

Risque Zéro, s'il ne bouleverse pas le monde reste un ouvrage jeunesse intéressant et propose une vision du futur qui prête à rire, donc à réfléchir. Abordable et plutôt agréable à lire, il peut constituer une excellente porte d'entrée vers une science-fiction plus aboutie.

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